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PROTOCOLES

Protocole - Du bon usage des solutions hydroalcooliques au bloc opératoire

Publié le 02/02/2012
Protocole – Du bon usage des solutions hydroalcooliques au bloc opératoire

Protocole – Du bon usage des solutions hydroalcooliques au bloc opératoire

Suivant les recommandations de la Société française d'hygiène hospitalière, le CHRU de Brest a formé le personnel des blocs opératoires au bon usage des solutions hydro-alcooliques lors de la désinfection chirurgicale des mains.

Le lavage chirurgical des mains, appris et répété maintes et maintes fois dans nos écoles d'IBODE et au sein même des blocs opératoires, est un rituel immuable et naturel, bien que légèrement différent selon le matériel disponible pour le pratiquer, les protocoles institutionnels en vigueur ou même l'époque où il a été appris. Aussi, lorsque sont arrivés massivement dans les institutions de soins les solutions hydro-alcooliques (SHA) et les recommandations des hygiénistes quant à leur utilisation pour une désinfection chirurgicale des mains, de fortes résistances ont vu le jour : contre les habitudes, contre les remises en question de nos propres pratiques, contre les croyances, contre notre époque et même contre les hygiénistes ! Il était donc nécessaire que ces derniers proposent d'expliquer et d'enseigner1 le bon usage des SHA aux professionnels des blocs opératoires ; ce qu'ils ont fait au CHRU de Brest. Quelques réunions ont donc été organisées par l'équipe d'hygiène du CHU avant la mise à disposition des distributeurs de SHA près des auges de lavages des mains, tout comme des ateliers pratiques durant les programmes opératoires, et ce pour optimiser l'assimilation du geste « technique » au plus près du patient.

Durant ces réunions, de nombreux rappels ont été fait sur la base des « Recommandations pour l'hygiène des mains »2 éditées par la Société française d'hygiène hospitalière (SFHH). On retiendra ainsi que le but de la désinfection chirurgicale des mains en vue d'un geste à niveau de risque infectieux élevé est d'éliminer la flore transitoire et de réduire la flore résidente.

Sur la base d'études solides rapportées dans le document de la SFHH, il est démontré que les savons à base de chlorhexidine sont plus efficaces que ceux à base de polyvidone iodée. Plus pertinent encore, les SHA permettent d'obtenir une réduction de la flore microbienne plus importante que les savons antiseptiques. Notons enfin qu'aucun produit hydro-alcoolique n'a une efficacité microbiologique supérieure aux autres.

Ces études prennent en compte beaucoup de critères comme la quantité de produit utilisé, le temps de friction et de contact avec les mains, la comparaison chiffrée du nombre de microbes présents sur les mains après la friction et/ou le lavage, comparaison après 3h de gantage... En matière de rémanence3, l'avantage est clairement aux SHA tout comme la tolérance cutanée des produits. Cela dit, dans tous les cas, l'application des SHA doit se faire sur des mains vraiment sèches pour une efficacité maximum, visuellement propres et non poudrées.

« Le but de la désinfection chirurgicale des mains en vue d'un geste à niveau de risque infectieux élevé est d'éliminer la flore transitoire et de réduire la flore résidente. »

Il ressort donc que une efficacité optimale des SHA, la méthode recommandée est d'effectuer un lavage des mains au savon doux avec brossage des ongles en entrant au bloc opératoire puis d'effectuer sa première désinfection chirurgicale par friction dix minutes au moins après le séchage des mains qui succède le lavage au savon doux. En effet comme une humidité persiste au niveau de la couche cornée de la peau, attendre dix minutes permet de s'assurer que les mains seront sèches au moment de l'application des SHA. Avec le produit utilisé à Brest, la quantité à utiliser est de 9 ml (1ere friction 6 ml, 2e friction 3 ml), la friction devant se poursuivre jusqu'au séchage complet du produit. Dans une vacation opératoire, il ne serait donc pas utile de répéter le lavage au savon doux si l'on ne quitte pas le bloc et si les mains restent propres (intégrité des gants, absence de sensation de mains collantes). Seule la friction entre chaque patient est indispensable. Un gain de temps que certains sauront apprécier !

En ces temps de crise économique et de restrictions budgétaires à tout va, le passage à la désinfection chirurgicale des mains permettrait une réduction de près de 67 % des coûts par rapport au lavage chirurgical des mains : réduction du coût des consommables, suppression des filtres aux points d'usage et diminution de la quantité d'eau utilisée !
Le CHU de Brest a donc adapté son matériel à l'environnement des salles de bloc opératoire et créé des supports visuels pour que les professionnels puissent suivre le protocole institutionnel pendant le geste de désinfection chirurgical des mains. Aujourd'hui, il semble que le fait de maintenir le matériel adéquat aux deux types de traitement chirurgical des mains soit un frein majeur à l'utilisation exclusive des SHA. Il apparaît aussi que l'observance des bonnes pratiques recommandées soit « équipe-dépendante » malgré la satisfaction globale de ceux qui l'utilisent. Quant aux infections du site opératoire, il semble difficile de prouver qu'elles sont moindres avec telle ou telle pratique.

En conclusion, cette mise en place aujourd'hui pérenne ne garantit pas que dans quelques temps des améliorations soient à nouveau proposées dans la désinfection chirurgicale des mains au bloc opératoire. C'est le propre de l'hygiène que de remettre les pratiques en question et aussi sans doute un autre débat...

Notes

  1. Remerciements au Dr Baron, médecin hygiéniste au CHU de Brest pour ses précisions et la mise à disposition de ses supports de formation.
  2. Recommandation pour l'hygiène des mains, Société française d'hygiène hospitalière, 2009, volume XVII, p.104.
  3. Désigne l'effet anti-microbien de l'antiseptique persistant sur la peau.

Nicolas LE VERGE
Infirmier de bloc opératoire diplômé d’État (IBODE)
rédacteur infirmiers.com
lvergeni@numericable.fr


Source : infirmiers.com