« Pour moi, le libéral a toujours rimé avec campagne parce que c’est là que je vis depuis de nombreuses années ». Myriam Lahitte est infirmière libérale de campagne. Elle tenait déjà un blog depuis 2015, « La petite infirmière dans la prairie » et vient de sortir son premier ouvrage : « Infirmière tout terrain », paru chez City Editions. Elle y raconte, avec humour, ses aventures de soignante plongée au cœur du monde rural. Rencontre.
Myriam Lahitte exerce dans le centre de la France, entre le Cher et l’Allier, une zone aussi surnommée « La diagonale du vide », comme elle le rappelle, sourire aux lèvres. Une région un peu oubliée des soignants, à la population vieillissante et surtout isolée, mais où il fait bon vivre. Dans l’un des chapitres de son livre, intitulé « Eloge de la campagne », l’infirmière libérale plaisante sur les conditions de vie et d’exercice dans ce coin reculé de la France : A la campagne, tout le monde se connaît ou presque (…) Alors attention à ce que l’on dit parce que la personne à votre droite est peut-être le cousin du beau-frère de la voisine de la personne à gauche… Donc chut, discrétion de rigueur
, écrit-elle. Il faut dire que son cabinet se trouve dans une commune de seulement 800 âmes. Ses patients habitent pour la plupart dans des maisons isolées. Pour aller leur rendre visite, il faut parfois suivre un chemin de terre pendant plusieurs minutes, s’engouffrer dans une grande cour et sautiller autour de flaques boueuses. Mais la Petite Infirmière dans la prairie n’a pas froid aux yeux. Toujours, quand on a besoin d’elle, elle toque à la porte. On a l’impression d’être utile
, confie Myriam Lahitte, Il y a des gens qui ne voient que nous dans la journée
.
On ne parle pas beaucoup de la campagne donc j’avais envie d’en parler.
Au départ, il y a donc eu le blog, en 2015 : J’avais envie de raconter un peu ce que je voyais. On ne parle pas beaucoup de la campagne donc j’avais un peu envie d’en parler
, explique Myriam Lahitte. Le livre est venu ensuite. Ce n’est pas toujours drôle notre travail, on est souvent seul… On a des situations difficiles, de misère, de maladie… Pour elle, l’écriture est donc un moyen d’évacuer les choses douloureuses, et de mettre des mots dessus
, confie-t-elle. J’ai souvent beaucoup de sentiments mêlés (colère, tristesse…), ce livre est aussi un moyen de partager avec les autres. J’ai l’impression d’être moins seule. C’est un peu comme si j’écrivais à quelqu’un
. Avec une belle fraicheur et un ton enjoué, elle raconte : son métier, ses patients, ses déboires et ses petits bonheurs. Chaque matin de travail, Myriam prend sa voiture très tôt pour effectuer sa tournée. Mieux vaut connaître les lieux où l’on se rend. Ici, nul panneau pour vous indiquer votre route, pas toujours de réseau téléphonique non plus pour vous venir en aide. Myriam, qu’il vente, qu’il pleuve ou qu’il neige, se rend chez ses patients, assure les soins ainsi que la conversation, leur remonte le moral ou les secoue gentiment quand elle sent que c’est nécessaire, refait un pansement, soigne une plaie, écoute, rassure.
J’ai choisi de parler de mon métier parce que j’avais des choses à dire et que j’avais besoin de les dire.
« Mon petit pépé au fond de son potager »
Dans l’un de ses nombreux chapitres (ils sont courts), « L’art de la conversation », Myriam nous enseigne en quatre leçons les trucs et astuces de l’infirmière libérale sur la faculté (indispensable à une infirmière libérale de campagne) de s’adapter à tous les échanges. Un seul exemple : la météo. C’est le sujet de conversation par excellence
, prévient-elle. Là-dessus, il ne faut pas se louper. On doit absolument connaître la température du jour, la pluviométrie (petit plus à ne pas négliger), les prévisions à sept jours sous peine d’être relégué au rang d’amateur car ici, cela ne rigole pas, mais alors pas du tout avec la météo
. Parmi les nombreux sujets de prédilection de ses patients, on trouve aussi la rumeur, appelée aussi ragot, potin ou qu’en-dira-t-on
, qui a toujours existé dans nos campagnes
ou encore le potager, là aussi, on touche à une institution : à la campagne, faire son jardin, c’est du sérieux. Combien de fois j’ai dû aller chercher mon petit pépé au fond de son potager pour lui faire sa prise de sang mensuelle !
, se souvient-elle. Son livre est truffé d’anecdotes sur ses rencontres avec des patients tour à tour attachants ou étranges, sur sa façon à elle de se réfugier dans l’imaginaire pour contrer la solitude sur les routes, ou tout simplement pour cultiver cette part de poésie en elle, sur sa passion pour la saga Star Wars ou pour les séries de fiction, sur ses petits moments de panique enfin, l’imagination aidant, quand il faut traverser, de nuit, le jardin d’un patient pour atteindre sa maison avant… les zombies.
Le livre : « Infirmière tout terrain », de Myriam Lahitte, paru aux Editions City. 16,90 euros.
Susie BOURQUINJournaliste susie.bourquin@infirmiers.com @SusieBourquin
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