En cette période de crise sanitaire jamais égalée, l’Ordre National des Infirmiers a consulté les infirmiers pour connaître précisément leurs situations d'exercice, leurs difficultés et leurs besoins, afin de continer à alerter les pouvoirs publics pour que des actions, concrètes, en découlent. Patrick Chamboredon, président de l'ONI, ne cesse en effet de le marteler : "nous atteignons un stade critique de l’épidémie : les infirmiers sont ultra-sollicités depuis près d’un mois, notamment dans certaines régions particulièrement touchées. Et nous savons que nous sommes engagés dans un marathon. Si nous voulons, collectivement, faire face dans la durée, il est de notre devoir de mettre en place des mesures fortes pour soutenir les infirmiers afin qu’ils puissent continuer à délivrer au quotidien des soins de qualité en toute sécurité pour les patients."
Hélas, sans surprise, le besoin en équipements de protection des soignants est toujours aussi important et ce, quel que soit leur lieu d'exercice, dans les établissements comme en ville. Ce n'est pourtant pas faute de le crier tout azimut et depuis maintenant de nombreuses semaines. Récemment, une consultation similaire menée par le SNPI , ne disait pas autre chose. Les professionnels de santé sont insuffisamment protégés alors qu'ils sont en première ligne face au coronavirus.
L'enquête de l'ONI* montre que près des trois quarts des infirmiers disent ne pas disposer d’équipements de protection en quantité suffisante. Il s’agit aussi bien des masques (près de 78% des infirmiers disent ne pas en disposer en quantité suffisante), des sur-blouses (83%), des lunettes (65%)...
Pour l'ONI, l’acheminement massif et la redistribution de ces équipements sur tout le territoire et dans les meilleurs délais sont pourtant indispensables
. De plus, souligne Patrick Chamboredon, les infirmiers exerçant en EHPAD
, en établissements médico-sociaux ou à domicile, doivent être davantage considérés par les pouvoirs publics qui se doivent de les équiper afin qu'ils puissent travailler en toute sécurité
. C'est aujourd'hui loin d'être le cas. En la matière, l'ONI préconise un dépistage systématique des personnels de santé qui le souhaitent pour garantir la sécurité de leurs proches et des patients qu’ils côtoient
et demande des efforts de promotion de la part des pouvoirs publics et de l’ensemble des professionnels de santé en direction du télésoin infirmier
, obtenu le 19 mars dernier pour les libéraux. En effet, le télésoin est majoritairement plébiscité par les infirmiers (à 65%) et l'un de ses atouts majeurs est de permettre à l’infirmier libéral d’éviter le contact direct afin de garantir et optimiser la prise en charge de tous les patients.
[#Covid_19] Patrick Chamborédon, Président @OrdreInfirmiers l'a rappelé sur le plateau de @Bruce_Toussaint @BFMTV : Près des 3/4 des #infirmiers déclarent ne pas avoir accès à des équipements de protection adaptés en quantité suffisante. #SoutienAuxSoignants pic.twitter.com/84DmnxmzZB
— Ordre des Infirmiers (@OrdreInfirmiers) April 9, 2020
On l'a également tristement constaté, si les infirmiers sont applaudis tous les soirs aux balcons, gâtés de mille et une attentions
, les pressions, les menaces,
voire agressions sont également trop souvent rapportées. La consultation menée par l'ONI indique que 12% des infirmiers ont déclaré avoir subi ces incivilités en rapport à leur profession, et 6% déclarent avoir subi une agression visant à leur dérober du matériel. L’Ordre appelle tous les infirmiers victimes de tels agissements à porter plainte. Ils seront accompagnés dans leur démarche en contactant les instances locales de l’Ordre
. Par ailleurs, il se réserve le droit de se constituer partie civile dans toutes les procédures engagées par des infirmiers ayant subi de tels actes
.
Nous devons agir au plus vite, en concertation avec les pouvoirs publics, pour que ces actes intolérables cessent, dans les meilleurs délais.
Le soutien psychologique des soignants est également une urgente nécessité et les infirmiers sont particulièrement impactés, confrontés à des conditions de travail particulièrement éprouvantes. Près de 79% des infirmiers consultés ont déclaré être davantage en souffrance professionnelle au regard de la situation actuelle. Si de nombreuses ressources existent
en la matière, l'ONI, de son côté, a signé une convention de partenariat avec un collectif de psychologues solidaires qui a monté une plateforme appelée PsyCorona pour permettre aux infirmiers d’accéder, en toute confidentialité, à des consultations gratuites tout au long de la crise sanitaire actuelle. Cette plateforme, accessible en ligne, permettra aux infirmiers de prendre des rendez-vous directement avec des professionnels psychologues et psychiatres.
Enfin, l'ONI alerte sur les dommages collatéraux à craindre si la prise en charge des patients non Covid porteurs de pathologies chroniques venait à faillir. Disponibilité des professionnels de santé concernés, fréquence des visites, observance des traitements… l'épidémie de Covid-19 est susceptible de perturber certaines prises en charge, ce qui pourrait engendrer des complications, voire des séquelles, pour les patients concernés
, souligne l'ONI. Plus de 83% des infirmiers qui ont répondu à cette enquête craignent pour la qualité et la sécurité de la prise en charge des patients non Covid qu’ils suivent. En conséquence, le Président de l'Ordre appelle de nouveau les établissements de santé à poursuivre leurs efforts pour instaurer des espaces différenciés (Covid/non Covid) et les professionnels de santé qui interviennent à domicile à mettre en place des tournées différenciées
.
Nous appelons également les pouvoirs publics à considérer davantage la nécessité de veiller à la qualité et la continuité des soins pour tous, et ce, singulièrement pour les populations fragiles, à risque, et celles souffrant de pathologies chroniques.
[#COVIDー19]@OrdreInfirmiers veille à la qualité de la prise en charge des pathologies chroniques et appelle les pouvoirs publics à favoriser le maintien de la qualité et de la continuité des soins pour tous.#dommagescollateraux pic.twitter.com/Df9dPB1NRC
— Ordre des Infirmiers (@OrdreInfirmiers) April 8, 2020
Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern
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