Il est encore possible d'améliorer la prise en charge de la douleur des enfants, en particulier lors des actes et des soins qui leur sont administrés, estime l'association Pédiadol qui a organisé jeudi à Paris sa 15ème journée sur la douleur de l'enfant.
Depuis 1991, année où s'est tenue cette première journée thématique, beaucoup de chemin a été parcouru avec trois plans nationaux de lutte contre la douleur, des recommandations scientifiques, une littérature scientifique abondante, rappelle l'association dans un communiqué.
Cependant, "malgré une amélioration des connaissances et l'existence de moyens efficaces, il y a encore toute une série de soins et d'actes réalisés chez les enfants sans antalgiques ou de manière insuffisante", déplore le Dr Daniel Annequin de l'hôpital Armand-Trousseau à Paris (AP-HP), président de l'association, interrogé mardi par l'APM.
La douleur provoquée par les soins, la violence utilisée et la terreur engendrée risquent de générer chez certains enfants des comportements phobiques vis-à-vis des soignants, souligne-t-il.
Cette année, Pédiadol a voulu apporter un nouvel éclairage à la question de la douleur de l'enfant, s'interrogeant sur le risque de maltraitance institutionnelle. "C'est un sujet délicat auquel il n'y a pas de réponse univoque mais qu'il faut aborder car il y a des situations inacceptables", commente le Dr Annequin.
L'association a identifié deux problématiques qui soulèvent la question de la maltraitance institutionnelle, d'une part, la variabilité des pratiques et, d'autre part, la violence subie par les enfants, illustrée par le témoignage d'une femme qui a été choquée par la prise en charge aux urgences du fils d'une amie pour une entaille à la tête.
Elle regrette que les infirmières n'aient pas essayé de réconforter l'enfant, se préoccupant uniquement que sa mère lui tienne les mains, et que le médecin n'ait pas administré de méopa (mélange équimolaire oxygène/protoxyde d'azote) pour la pose de sept agrafes.
Pourtant, elle se souvient, lorsqu'elle avait emmené son propre fils dans cet hôpital pour qu'il se fasse poser un plâtre quelques mois auparavant, que ce même praticien avait rassuré l'enfant et utilisé du méopa.
Le Dr Annequin relève que les pratiques restent encore trop dépendantes des soignants. Par exemple pour le méopa, il a été rapporté à l'association que son utilisation est parfois bloquée par un médecin ou un établissement hospitalier pour des raisons infondées ou exagérées (toxicomanie, pollution), qu'un autre médecin garde la bouteille enfermée dans son bureau, qu'une équipe au service des urgences l'utilise de manière aléatoire etc.
D'autres situations "aberrantes" sont rapportées à l'association, comme l'interdiction de solutions sucrées dans une maternité ou l'interdiction d'avoir une réserve de morphine par crainte d'une agression, ajoute le Dr Annequin.
Il note que l'immobilisation de force d'un enfant est encore observée, sous prétexte que les actes ou les soins à pratiquer sont urgents, et déplore que cette "vieille culture selon laquelle la douleur est un bienfait" soit encore ancrée chez certains soignants.
"La douleur lors des soins est perçue de manière variable: non-événement pour les uns ou dysfonctionnement pour les autres, elle peut aussi être considérée comme une maltraitance", explique-t-il.
"La tolérance sociale vis-à-vis de l'absence de mise en place de moyens antalgiques est en train de changer. Faute de réactions collégiales et concertées des professionnels concernés, il est probable que l'accusation de 'maltraitance' puisse être portée à l'encontre de structures, services, professionnels qui n'auraient pas actualisé leurs connaissances et leur pratiques pour mieux contrôler la douleur de l'enfant", prévient-il.
LA RESPONSABILITE PEUT ETRE ENGAGEE
Il rappelle que la non-utilisation ou le blocage de moyens antalgiques peut désormais engager la responsabilité des soignants et/ou des établissements, depuis la condamnation, en 2006, d'un centre hospitalier pour l'absence de prise en charge de la douleur d'un patient cancéreux admis aux urgences.
Tout en se déclarant conscient que certains actes ne peuvent pas se dérouler sans contention, le Dr Annequin appelle les soignants à se remobiliser pour continuer à faire progresser les bonnes pratiques.
"Même si on ne peut pas soulager la douleur dans 100% des situations, on peut la réduire dans une très grande partie, en mettant en place par exemple une réflexion collective pour identifier les actes douloureux et élaborer un arbre décisionnel."
Lors de cette journée, il sera aussi question de l'évaluation et de la prise en charge de la douleur chez les enfants handicapés et de pratiques innovantes aux urgences, en pré-hospitalier et en ambulatoire. Des nouveaux outils de sensibilisation et de formation seront présentés.
L'association Sparadrap a par ailleurs indiqué dans un communiqué qu'elle distribuera à l'ensemble des participants à la réunion de Pédiadol plusieurs outils destinés à faciliter l'auto-évaluation de la douleur de l'enfant, élaborés en partenariat avec le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB).
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