Ce rapport a été élaboré par une association nommé PACA infirmiers libéraux, ils se veut objectif et nous permet de se faire une idée un peu plus précise de ce qu'est le PSI.
Le Projet de Soins Infirmiers (PSI) au terme de 8 années de discussions, de modifications est sur le point d'entrer en application. Les 3 principales caisses d'Assurance Maladie ont accepté le projet d'avenant[1] à la convention nationale concernant la mise en place du PSI proposé par la FNI. Deux mois, après la parution de cet avenant au Journal Officiel, il entrera en vigueur.
PACA Infirmiers Libéraux, association à but non lucratif regroupant des infirmières et infirmiers libéraux[2] en activité dont les objectifs sont de promouvoir et d'améliorer la qualité des soins infirmiers en plaçant le malade au centre de leurs actions est inquiète. Aucunes mesures d'accompagnement n'ont été annoncées. Bon nombre de personnes âgées et/ou dépendantes vont se trouver dans des situations problématiques que les promoteurs du PSI n'ont semble-t-il pas envisagées.
I Le Projet de Soins Infirmiers
A] Les propositions de PSI
Nous vous proposons une synthèse des deux projets présentés l'un par la FNI (seul syndicat signataire de la convention), l'autre par Convergence Infirmière (confédération regroupant les syndicats opposés à la FNI), sous forme d'un tableau comparatif.
Tableau comparatif des Projets de Soins Infirmiers |
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Version Convergence |
Version FNI |
Le concept de base : la démarche de soins infirmiers |
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Mise en place d'un dossier de soins infirmiers à domicile avec notamment -Création d'une grille de recueil de données adaptée à l'exercice libéral permettant d'établir différents scores significatifs (cognitif, évaluation du risque d'escarre, évaluation de la douleur, surveillance/observation, score général) -formulation de diagnostics infirmiers
-plan de soins infirmiers -diagramme de soins et transmissions ciblées -différentes fiches techniques -questionnaire de satisfaction à remplir par la personne soignée ou ses proches en fin de prise en charge |
Elaboration d'un plan de soins infirmiers
-informations d'ordre général concernant le patient
-mise en évidence des besoins non totalement satisfaits -exposés des problèmes du patient -causes de ces problèmes
-buts à atteindre -actions à entreprendre
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Les objectifs |
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1°)Définir dans le cadre de son rôle propre ce qui relève du Soin Infirmier et qui doit faire l'objet d'un financement par l'Assurance Maladie.
2°)Contribuer à une meilleure « orientation » de l'accès aux soins : à partir d'actions préventives et éducatives, de surveillance, de formation et d'encadrement favorisant l'autonomie des patients. A terme et par étapes, moduler l'intervention infirmière sur les premiers niveaux de prise en charge, autorisant ainsi la prise en charge à domicile de personnes aux déficits de santé plus lourds donc diminution des prises en charge institutionnelles donc des coûts.
3°)Fournir une réponse de santé adaptée aux besoins réels et justifiés en soins infirmiers de la population afin d'optimiser le financement de l'Assurance Maladie
4°)Concourir au recueil d'information et aux méthodes utilisées par le médecin pour établir son diagnostic
5°)Coordonner les actions des différents professionnels de santé |
1°)Améliorer la qualité des soins en différenciant les soins infirmiers de l'aide d'une tierce personne : l'aide apportée à des personnes dépendantes diffère des soins infirmiers, dans la mesure où elle ne sous-tend pas les objectifs de soins au sens du décret de compétence des infirmières mais consiste à assister la personne, la suppléer du fait de son incapacité.
2°)Différencier les financements
3°)Evoluer vers l'accréditation de chaque professionnel
4°)Organiser une complémentarité entre les infirmières à domicile et les tierces personnes qui se substituent à la famille |
Pratiquement |
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1°)Prescription médicale : "Nécessité d'une prise en charge infirmière" + prescription d'actes médico-infirmiers
2°)Recueil et analyse des données, validation de diagnostics infirmiers
3°)L'infirmière fixe le nombre d'AIS nécessaires et si besoin, propose un plan d'intervention globale(auxiliaires de vie, aides ménagères.) au réseau concerné et le met en oeuvre
4°)Demande de prise en charge infirmière à la caisse de sécu. Information du médecin prescripteur Plan de soins soumis au consenteemnt et à la signature du patient
5°)Evaluation régulière des objectifs |
1°)Prescription d'un plan de soins infirmiers sur imprimé spécifique comportant les déficiences diagnostiquées par le médecin +prescription d'actes médico-infirmiers+prescription de la surveillance demandée par médecin
2°)Elaboration du plan de soins infirmiers
3°)Selon les objectifs de soins résultant de l'analyse de la situation du malade, l'infirmière propose le type de prise en charge utile : - séances de soins infirmiers dont elle fixe le nombre(4 AIS3 par jour maxi) - surveillance infirmière =1 AIS4 (pas plus de 1 fois/sem) - soins infirmiers isolés (selon prescription médicale) - élaboration d'un plan d'aide(maximum 15 jours correspondant au délai de mise en place et de formation d'une tierce-personne.)
4°)Les séances de soins infirmiers et les séances de surveillance font l'objet d'une prescription par l'infirmière contre-signée par le médecin. L'infirmière a 10 jours à compter de la date de prescription médicale pour transmettre sa demande de prise en charge à la sécu (elle peut débuter les soins urgents. La prescription de plan de soins infirmiers est limitée à 3 mois, pas plus de 5 plans par an.
5°)Evaluation des résultats observables par rapport aux buts à atteindre |
Les financements |
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A partir du recueil de données, - établissement d'un score général permettant de situer le niveau de prise en charge professionnelle qui correspond aujourd'hui à un nombre de séances AIS et demain (avec la création des réseaux) à une prise en charge financière forfaitaire - établissement de scores spécifiques induisant une prise en charge strictement infirmière remboursable par l'assurance maladie Cette procédure autorise la fongibilité des enveloppes sanitaires et sociales. |
Différenciation des financements sanitaires et sociaux - le Financement de l'aide d'une tierce-personne incombe au budget privé des ménages, à l'Etat ou au Conseil Général, selon que la personne dépendante est handicapée ou âgée les soins infirmiers relèvent d'une prise en charge financière de l'assurance maladie dans les conditions habituelles |
Les aides non-infirmières |
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Les interventions partenariales : -interventions ne relevant pas d'une infirmière, dans le contexte situationnel de la personne, et pouvant être attribuées à d'autres professionnels en fonction de leurs compétences respectives -seront programmées et coordonnées par l'infirmière mais ne pourront être confiées puisqu'il n'existe pas à ce jour de lien de subordination entre l'infirmière libérale et l'auxiliaire de vie -seront évaluées lors des recueils de données réguliers et pourront donc faire l'objet d'un réajustement |
Le plan d'aide : Le plan d'aide fera l'objet d'un enseignement par l'infirmière, à la famille ou à la tierce-personne qui s'y substitue. L'infirmière proposera le recours à un service d'aide extérieure L'infirmière fait le lien avec les services sociaux Le plan d'aide est écrit, négocié avec la personne handicapée et l'aide à domicile, il fait l'objet d'une surveillance infirmière |
Bien que les formulations soient assez différentes, les idées de base de ces deux projets sont quasi identiques.
-Tous veulent différencier des soins infirmiers pris en charge par l'Assurance Maladie les interventions pouvant être accomplies par des tierces personnes (Convergence parle de non-soins, FNI de dépendance stabilisée sans risque objectif de décompensation) et donc non remboursables par l'Assurance Maladie.
-Tous s'accordent pour promouvoir dans l'exercice libéral la démarche de soins[3] et sa formulation au travers du Dossier de Soins Infirmiers.
-Tous veulent promouvoir l'infirmière libérale en tant que coordinatrice des soins à domicile.
B] Le PSI et le patient
Le projet de soins infirmiers a pour objectif de placer le patient au centre du dispositif de soin. Cet outil va permettre de lui assurer des soins adaptés et personnalisés. Il prend en compte tous les paramètres qui constituent l'entité « malade »: données médicales, psychologiques, sociales, économiques et culturelles pour aider à fixer des objectifs de soin réalistes et mesurables. Il va permettre également une évaluation de la qualité des soins et des soignants (auto-évaluation des infirmières, évaluation par le patient, les médecins-conseils des caisses d'assurance maladie.)
1°) Soins Infirmiers et suppléance
L'infirmière qui prend en charge une personne dépendante pour laquelle le médecin a prescrit un plan de soins infirmiers procède à une démarche de soin qui va lui permettre de déterminer des objectifs et de prévoir des actions de soin adaptées à la situation précise de ce malade.
Si les actions à entreprendre auprès de cette personne ont pour objet :
- de protéger, maintenir, restaurer et promouvoir la santé des personnes ou l'autonomie de leurs fonctions vitales physiques et psychiques ;
- de prévenir et évaluer la souffrance et la détresse des personnes et de participer à leur soulagement ;
- de favoriser le maintien, l'insertion ou la réinsertion des personnes dans leur cadre de vie familial et social ;
- d'accompagner les patients en fin de vie et, tant que de besoin, leur entourage ;
elles font partie intégrante des soins infirmiers tels que les définit l'article 1er du décret de compétence n°93-345 du 15 mars 1993[4] et donnent lieu à une prescription par l'infirmière de séances de soins infirmiers.
Si elles n'ont pas d'autre but que de compenser un déficit, si elles consistent à assister la personne, la suppléer, du fait de son incapacité sans sous-tendre ces objectifs de soin, elles pourront être effectuées par la famille, une tierce-personne qualifiée, une aide à domicile, une aide-soignante, une auxiliaire de vie. Dans ce cas de figure, l'infirmier procède à l'élaboration d'un plan d'aide et assure sa mise en place.
Globalement, on aboutit à la détermination de deux sous-populations :
- les personnes dont la dépendance est évolutive (régressive ou progressive) ou dont la dépendance est stabilisée mais à risque de décompensation, qui vont pouvoir bénéficier de soins infirmiers.
- les personnes dont la dépendance est stabilisée sans risque objectif de décompensation dont la suppléance du handicap résiduel relève de l'aide d'une tierce-personne (= non-soins).
2°) Différenciation des financements
Les soins infirmiers relèvent d'une prise en charge de l'assurance maladie dans les conditions que l'on connaît actuellement. Tous les assurés, de façon égalitaire, peuvent bénéficier de soins infirmiers sans avoir à faire d'autres démarches que de contacter l'infirmière de leur choix qui effectue demande d'entente préalable et procédure de tiers-payant.
La part des soins qui relèvent de l'aide d'une tierce-personne va être financé, selon les cas
- par les différentes allocations et prestations (Prestation Spécifique Dépendance[5], Allocation d'Education Spécialisée[6], Allocation Compensatrice pour Tierce-Personne[7].) dont on connaît les limites : délais d'obtention, faiblesse des montants par rapport aux dépenses de maintien à domicile, seuils minimes des revenus.Les personnes concernées vont, par ailleurs, devoir accomplir un certain nombre de démarches qui, on le sait ne leur sont pas toujours aisées.
- mais surtout par le budget privé des ménages qui va s'en trouver lourdement grevé
3°) Multiplication des intervenants à domicile
La personne dépendante dans le cadre d'un maintien à domicile va voir se multiplier les intervenants.
Aux médecin, infirmière, aide-ménagère, kiné, voire orthophoniste déjà présents dans le système actuel, on va ajouter des aides extérieures ( tierce-personne qualifiée, aide à domicile, aide-soignantes, auxiliaires de vie.) Chacun assurant à son niveau une fonction et des tâches plus ou moins définies et plus ou moins coordonnées.
C]L'outil PSI
Le projet de soins infirmiers est directement issu de la démarche de soin telle que la décrit l'article 2 du décret de compétence : « il (l'infirmier) identifie les besoins du patient, pose un diagnostic infirmier, formule des objectifs de soins, met en ouvre les actions appropriées et les évalue »
Cette démarche enseignée depuis plusieurs années dans les Instituts de Formation en Soins Infirmiers est en constante évolution comme l'est, elle-même la science infirmière. Cette évolution est le fruit d'une recherche en soins infirmiers et de la volonté d'une profession d'améliorer ses pratiques par l'utilisation de références communes et d'outils de travail permettant d'élever une profession historiquement basée sur des qualités de dévouement et d'abnégation au grade de science proprement dite. Ceci dans le souci de garantir une qualité de soins toujours croissante.
Le dossier de soins, support indispensable à la délivrance de soins de qualité, adaptés, personnalisés et coordonnés est, pour l'infirmière, l'outil de la pratique quotidienne dont le but est de faciliter la prise en charge du patient. Il est utilisé de façon systématique en milieu hospitalier et rend compte des différentes étapes de la démarche de soins.
En France, jusqu'à présent, la tenue du dossier de soins infirmiers pour les malades à domicile n'était pas obligatoire. La mise en ouvre du PSI rend son utilisation obligatoire pour les infirmières libérales.
D]La lettre-clef flottante
La mise en application du PSI s'accompagne de la création d'une lettre-clef flottante[8].
L'AIS[9], cotation de la séance de soins infirmiers verra sa valeur évoluer de façon inversement proportionnelle au nombre d'AIS pratiqués globalement par les infirmières françaises.
Plus les infirmières accompliront des soins relevant de leur rôle propre, plus cet acte de soin perdra de sa valeur financière.
L'avenant à la convention instaure donc :
- d'une part, ce que l'on peut qualifier de maîtrise médicalisée des dépenses de santé : le projet de soins infirmiers qui à travers la démarche de soins permet de différencier soins infirmiers et suppléance.
- d'autre part, une maîtrise purement comptable et technocratique des dépenses de santé avec l'instauration de sanctions collectives.
II Les Séances de Soins Infirmiers
Un des objectifs du PSI[10] est de réguler le nombre d'AIS effectués par les infirmières. Mais qu'est-ce que l'AIS ?
Les infirmières françaises effectuent en moyenne 70 % d'AIS. L'AIS, cotation fourre-tout qu'il convient d'éclaircir.
1°) L'AIS = Séance de soins infirmiers incluant Hygiène, Surveillance, Observation, Prévention.
Les actes effectués lors de ces séances varient d'un patient à un autre, d'une séance à une autre. Ils sont déterminés par l'état physique, psychologique de la personne soignée ainsi que par le contexte familial, social dans lequel il évolue. Sont inclus dans ces séances de soins, à des degrés divers, les soins suivants :
HYGIENE :
Toilette au lit complète ou partielle
Toilette au lavabo complète ou partielle
Douche
Pédiluve (lavage des pieds)
Capiluve (lavage de tête)
Rasage
Habillage - Déshabillage total ou partiel
Entretien des prothèses dentaires
Soins de bouche
Soins des yeux
Soins des oreilles
Manucure
Pédicure
Lever
Coucher
Manipulation avec lève-malade
Mise sur WC - Mise sur fauteuil garde-robe - Mise sur bassin
Change complet avec toilette du siège
Pose d'un étui pénien
SURVEILLANCE, OBSERVATION ET SOINS
Etat cutané : points d'appui, grains de beauté, mycose
Alimentation : tenue fiche de surveillance, surveillance du poids, stimulation
Hydratation : fiche de surveillance
Elimination urinaire : diurèse, sonde urinaire (surveillance, soins, changements de poche, changement de sonde), cathétérisme urétral, rééducation, stimulation
Elimination fécale : surveillance, lavement évacuateur, extraction de fécalome ou extraction manuelle de selles, rééducation, stimulation
Respiration : oxygénothérapie, aspiration trachéale, installation
Traitement : * préparation, administration, vérification des prises, contrôle des effets secondaires, gestion du stock de médicaments
injections sur prescription médicale, contrôle glycémique, prélèvement sanguin, application de pommades, collyre, petit pansement,
Constantes : tension artérielle, pulsations, température.
Comportement et évolution de l'état mental
Etat circulatoire : pose et retrait de bandes ou bas de contention
Mobilité : stimulation, rééducation
Douleur : évaluation et fiche
PREVENTION :
Orientation vers praticien spécialisé (podologue, dentiste)
Education : apprentissage des gestes de la vie quotidienne pour le patient, pour la famille,
Education : risques de non-observance du régime, du traitement prescrit.
Prévention d'escarre : massage, installation, mobilisation
Prévention déshydratation : éducation, stimulation
SUIVI :
relation d'aide avec le patient, la famille
transmissions au médecin orales, écrites
transmissions aux collègues orales, écrites
transmissions à la famille, l'entourage
tenue du dossier de soins infirmiers
entretien avec le patient, la famille, le médecin, les collègues, les autres intervenants paramédicaux
La liste n'est pas exhaustive.
On entend, depuis quelques temps, parler de soins de nursing accomplis par les infirmières de façon péjorative. Considérer que cet acte n'est qu'un « lavage », c'est reléguer les infirmières au rang de technicien de surface. Il convient donc de rappeler quelques objectifs que doit tenter d'atteindre toute toilette digne de ce nom :
- rééduquer la verticalisation, quand c'est possible, par le choix d'une toilette debout
- apporter un confort et une hygiène conforme aux désirs du patient en regard des impératifs du soins infirmiers
- réhabiliter le schéma corporel
- assurer la communication verbale nécessaire (actuellement, moins de 2 minutes par 24 heures en long séjour pour les grabataires)
- assurer la qualité des communications non verbales (toucher entre autres)
- réhabiliter les savoir-faire et travailler la mémoire procédurale
- assurer les préventions des dégradations corporelles : attitudes de rétraction articulaire,
- escarres, constipation, syndrome d'immobilisme, prévention de l'incontinence.
- travail sur l'image de soi et le narcissisme, beauté, habillage.
- prévenir les comportements agressifs
- resocialiser
Tous ces objectifs relèvent d'apprentissage de techniques particulières[11], et donc d'un très grand professionnalisme[12].
2°) L'AIS = Séance de soins infirmiers absents de la nomenclature.
Par exemple, l'éducation d'un diabétique auquel on apprend à être autonom
- en lui apprenant à réaliser lui-même ses contrôles de glycémie capillaire, ses injections en suivant le protocole établi par le médecin,
- en l'éduquant par rapport à l'observance de son régime et au dépistage des complications
3°) L'AIS = Série d'actes médico-infirmiers dans la même séance
qui, s'ils étaient comptabilisés selon les règles du cumul ( entier pour le premier, réduit de moitié pour le second, gratuit pour les suivants) aboutiraient à une rétribution dérisoire en regard du temps passé auprès du patient pour accomplir ces soins.
III Le PSI : problèmes d'application pratique
La démarche de soin permet d'adapter une réponse en soin spécifique aux situations auxquelles elle s'applique. Son application aux soins infirmiers libéraux à domicile à travers le PSI est limitée par divers obstacles.
A] Concernant les prises en charge de la dépendance
La durée de vie s'allongeant, les personnes dépendantes sont de plus en plus nombreuses. Chaque situation individuelle est la résultante de facteurs bio-psycho-sociaux. On ne peut standardiser les réponses aux problèmes de dépendance.
Cependant, nous craignons que les Références Médicales Opposables en matières de soins infirmiers ne fasse l'objet d'une systématisation administrative qui nierait complètement la démarche de soins infirmiers, seule garante d'une prise en charge de qualité car adaptée et personnalisée. Chaque cas doit être analysé en tenant compte de tous les paramètres.
L'infirmière, présente sur le terrain et seule habilitée de par sa formation, va procéder au recueil et à l'analyse des données du problème.
Et nous voudrions avoir l'assurance qu'elle conserve la maîtrise de cette démarche qui va lui permettre de distinguer :
- les soins qui relèvent de sa compétence car faisant appel aux dimensions curatives, préventives, d'adaptation, de réadaptation et de surveillance de sa fonction ;
- des aides n'ayant pour autre but que de suppléer un déficit et qu'elle pourra confier à une tierce-personne dans la mesure où elle juge celle-ci compétente pour les actions qu'elle va lui demander d'accomplir.
Cette façon de fonctionner, tout à fait courante en structure de soins où les rôles respectifs de chacun sont bien définis, pose un certain nombre de problèmes dans son adaptation à la ville.
1°) Bas niveau de compétence des intervenants à domicile
Les travailleurs sociaux participant actuellement au maintien à domicile des personnes dépendantes ont des compétences et des formations de base très disparates. Qu'elles aient pour appellation tierce-personne, auxiliaire de vie, aide ou garde à domicile, emplois familiaux., ces personnes sont dans la plupart des cas peu qualifiées[13] : très exceptionnellement elles possèdent le Certificat d'Aptitude aux Fonctions d'Aide-Soignante, rares sont celles qui ont le Certificat d'Aptitude aux Fonctions d'Aide à Domicile, parfois un BEP sanitaire et social.
Le PSI prévoit donc de confier des personnes bénéficiant actuellement de soins effectués par des infirmières (3 ans d'études après le Bac pour un diplôme professionnel + 3 ans d'expérience en structure de soins) à des intervenants qui la plupart du temps n'auront ni formation qualifiante, ni expérience professionnelle14. Connaissant les problèmes de chômage rencontrés par les demandeurs d'emploi non qualifiés, on peut également s'interroger sur les motivations de certaines d'entre-elles.
D'autant plus que certains organismes mandataires peu scrupuleux, pour faire face à des besoins en tierce personne qui s'accroissent sans cesse, n'hésitent pas à recruter des auxiliaires de vie sans qu'aucune sélection ne soit faite (on a vu une auxiliaire de vie recrutée sur un simple entretien téléphonique, à 800 km de distance)
Comment éviter que des patients ainsi démédicalisés ne fassent les frais d'une gestion comptable de la dépendance ? Comment leur garantir une qualité de soins au moins égale à celle dont ils bénéficient dans le système actuel ?
2°) Manque de coordination des interventions de maintien à domicile
La mise en route d'un plan d'aide dans le cadre du Projet de Soins Infirmiers induit une multiplication des intervenants afin de rendre possible le maintien à domicile des personnes dépendantes. Ces différentes aides émanent de structures différentes, avec des statuts divers ( associations à but non lucratif, CCAS, emplois familiaux.)
L'élaboration d'un plan d'aide par l'infirmière libérale inclut la formation et l'éducation de l'entourage et des tierces-personnes ainsi qu'une surveillance périodique. En l'état actuel, la législation régissant la profession d'infirmière libérale ne permet pas de confier des soins, interdit d'employer comme salarié un collaborateur (infirmier, aide-soignant ou autre). Aucun texte ne codifie les rapports des infirmières libérales avec d'autres professionnels de l'aide à domicile.
Comment pourra-t-on organiser une coordination efficace des soins, si le rôle des infirmières se limite à donner des conseils sans qu'elles aient les outils nécessaires pour asseoir leur fonction de coordination ?
3°) Prises en charge financières insuffisantes
Les aides assurées actuellement par les infirmières et donc prises en charge par les caisses d'assurance maladie vont faire l'objet d'un transfert sur d'autres budgets.
Que ce soit la PSD dont on envisage actuellement une réforme ou d'autres prestations ou allocations, la complexité des démarches, les délais d'obtention, les critères d'attribution, les montants parfois dérisoires par rapport aux frais engagés laissent à penser que bon nombre de personnes dépendantes risquent de se retrouver dans des situations de précarité sociale et médicale si la mise en application du Projet de Soins Infirmiers n'est pas précédée d'une révision des aides sociales permettant le maintien à domicile des personnes aux revenus insuffisants.
Par ailleurs, le PSI oppose financement de l'aide et financement des séances de soins infirmiers alors que, dans la plupart des cas, la démarche de soin conduit à préconiser d'associer chez un même patient interventions infirmières et interventions des tierces personnes. Ces deux prestations sont complémentaires et non pas antagonistes comme on semble vouloir nous le faire croire.
B] L'outil-PSI
L'objectif étant la qualité des soins, les outils mis à la disposition des infirmières ne pourront être utilisés de façon optimum par celles-ci que dans la mesure où elles savent les maîtriser. Hors, bon nombre d'entre elles travaillant depuis plusieurs années en secteur libéral ont perdu, si elles l'avaient, l'habitude d'effectuer la mise en forme écrite de la démarche de soin
La maîtrise de la démarche de soin et de l'utilisation du dossier de soins demande une formation de base solide et une longue pratique.
Tant qu'elles n'auront pas pu maîtriser et s'approprier l'outil-PSI, les infirmières libérales vont passer plusieurs heures (environ 4 heures par plan de soins) à établir leur plan de soins infirmiers pour une rétribution cotée AIS 3,5 soit 51,80 F et au maximum 61,25 F si l'AIS arrive au niveau de l'AMI.
C] La lettre-clef flottante
Assortir le PSI de la création d'une lettre-clef flottante, c'est le rendre inacceptable pour les infirmières.
C'est d'ailleurs ce qui a motivé les manifestations et grèves depuis juin 2000.
Comme on a pu le constater au chapitre I A, le principe du projet de soins infirmiers comme mise en application de la démarche de soins est accepté par tous.
Mais le mécanisme d'ajustement des dépenses proposé dans l'avenant verrouille complètement ce projet qui avec quelques aménagements préalables et indispensables aurait pu être accepté par les professionnelles responsables que nous sommes.
IV Nos propositions
A] Prise en charge de la dépendance
Le PSI, s'il se veut un outil de progrès permettant une meilleure prise en charge de la dépendance à domicile, doit se concevoir dans une démarche de qualité plus large que celle qui est envisagée actuellement.
Si l'on veut que l'objectif d'améliorer la qualité des soins soit atteint. Que le PSI soit bien plus qu'une demande d'entente préalable mais l'outil qui va permettre de tendre vers cette qualité avec une réelle efficacité.
Il faut qu'une réflexion globale et profonde soit impulsée afin de lever tous les obstacles à la mise en place de ce projet.
1°)Clarifier les compétences des intervenants à domicile
Il convient que le maintien à domicile des personnes âgées et /ou dépendantes qui bénéficient actuellement de soins infirmiers soit assuré par des aides compétentes.
D'où la nécessité
- d'améliorer les formations de base des aides à domicile( notamment en matière d'hygiène, de relation, de responsabilité.),
- de veiller à ce qu'elles bénéficient d'une formation continue, d'un encadrement et d'un soutien efficace.
Il paraît indispensable d'harmoniser les différentes formations et de doter ces tierces-personnes d'un statut, d'un champ de compétence et de règles professionnelles bien définis.
2°)Coordonner l'action des différents acteurs du maintien à domicile
Les textes législatifs régissant la profession d'infirmière libérale ne lui permettent pas de confier des soins. Aucun texte ne codifie les rapports des infirmières libérales avec d'autres professionnels de l'aide à domicile.
Nous proposons donc de doter l'infirmière d'un pouvoir de prescription en rapport avec son rôle propre.
Cette prescription infirmière (par définition, ordre expressément formulé avec toutes les précisions utiles) devra être écrite lisiblement, datée et signée, elle comportera l'identité de la personne soignée, les données quantitatives et qualitatives précisant les tâches qui sont confiées aux aides à domicile,
- dans la limite, d'une part, de la compétence reconnue à celles-ci du fait de leur formation,
- d'autre part, dans les limites fixées par l'infirmière en fonction de la situation précise dont elle a une connaissance précise du fait de la démarche de soins qu'elle a pu accomplir.
Elle permettra d'officialiser le rôle de référent de l'infirmière par rapport aux différents travailleurs sociaux dont les actes seront soumis à cette prescription. L'infirmière au cours de sa surveillance périodique s'assurera de l'application et du respect de cette prescription.
Ceci dans le but d'obtenir une synergie d'actions autour de la personne dépendante tendant à le maintenir dans son milieu dans des conditions optimales.
Il convient également d'encourager des conventionnements entre structures employant des aides à domicile et les infirmières libérales afin qu'ils servent de base à leurs relations.
PACA Infirmiers Libéraux, consciente depuis plusieurs années que la qualité des soins à domicile passe par une meilleure coordination élabore actuellement un dossier en vue d'obtenir du Fond d'Aide à la Qualité des Soins de Ville des financements qui lui permettront de mettre sur pieds une coordination des soins à domicile pour personnes dépendantes. Elle envisage une prise en charge globale des soins sans restriction de pathologie, par des professionnels libéraux dans un cadre géographique défini. Cette coordination pourra établir des conventions avec des réseaux existants ou à créer. Dans un deuxième temps, l'association demandera son agrément en tant que réseau de soin.
3°)Les financements
Il est indispensable de faciliter les démarches des personnes, par définition, à mobilité réduite, de raccourcir les délais d'obtention, de revoir les seuils de revenu, les critères d'obtention et d'adapter leur montant aux aides nécessaires.
Nous proposons :
- d'améliorer le fonctionnement actuel des CCAS et des services sociaux, de les doter de moyens financiers et humains afin d'en faire des structures permettant aux personnes dépendantes d'accomplir depuis leur domicile les démarches visant à obtenir dans les délais les plus brefs les diverses allocations ou prestations auxquelles ils peuvent prétendre quel que soit l'organisme qui les attribue.
- de mieux adapter les montants des prestations aux frais engagés dans la prise en charge de la dépendance tout en tenant compte des revenus,
par exemple :
Ø Revoir les conditions d'obtention de la PSD : rapport montant/niveau de dépendance, plafond de ressources, montant de l'actif successoral à ne pas dépasser pour la récupération de cette aide sociale.
Ø Revoir le problème de la non-attribution de l'allocation compensatrice pour tierce-personne pour les enfants handicapés scolarisés dans des établissements spécialisés.
Ø etc..
B] De la bonne utilisation de l'outil psi
1°)Organisation de formations
Avant toute mise en application du PSI, il est absolument nécessaire que des formations massives à la démarche de soins, au projet de soins infirmiers, au dossier de soins soient organisées pour toutes les infirmières afin qu'elles puissent s'approprier ces outils de façon performante et que le malade puisse au bout du compte en tirer le meilleur bénéfice.
Le FIF-PL fond de formation continue auquel cotisent toutes les infirmières libérales pourra-t-il en assurer le financement ?
2°)Elaboration d'un dossier de soins
Notre association travaille dors et déjà à l'élaboration d'un dossier de soins infirmiers à domicile conformément au recommandation de l'ANAES[14].
Dossier de soins que nous diffuserons auprès de nos adhérentes.
3°)Evaluation et contrôle
Les séances de soins infirmiers, prescrites suite à l'établissement d'un Projet de Soins Infirmiers, relèvent du rôle propre de l'infirmier. L'infirmière seule, de par sa compétence conformément aux dispositions de l'article 3 du Décret n° 93-345 du 15 mars1993, peut en prendre l'initiative et accomplir les actes correspondants.
Il nous apparaît logique que l'évaluation de la cohérence de ces prescriptions avec le projet de soins infirmiers soit faite par des infirmières qui soient intégrées aux Conseils Médicaux des Caisses d'Assurance Maladie comme le propose le rapport Brocas[15]. Ces infirmières devront avoir une parfaite maîtrise de la démarche de soin et une bonne connaissance des soins à domicile
4°)Revoir la nomenclature
Afin qu'elles représentent une juste rétribution du travail fourni, les propositions de cotations devront être revues à la hausse : soit AIS 6 au minimum pour l'élaboration du plan de soin.
Il faudra inscrire à la nomenclature les actes qui n'y figurent pas, notamment en matière d'éducation, de surveillance. Les retours à domicile après hospitalisation étant de plus en plus précoces, les infirmières sont de plus en plus sollicitées pour ce type d'actes.
C] Retrait de la lettre-clef flottante
L'instauration d'une lettre-clef flottante n'est que le point de départ d'un cercle vicieux : moins les actes seront cotés, plus les infirmières seront obligées d'en effectuer pour conserver leur niveau de revenus.
La demande en soins augmentant, on ne voit pas très bien comment on pourra s'en sortir.
Il est donc indispensable de ne pas mettre le pied dans cet engrenage, c'est pourquoi nous proposons de modifier l'article 4-2 de l'avenant afin de n'en conserver que la partie prévoyant la revalorisation de l'AIS en cas d'économies réalisées et de maintenir une valeur plancher à 14,80F.
D] Les perspectives
Le travail en réseaux va permettre à long terme de régler les problèmes de financement, de coordination, de formation. Mais le PSI est annoncé pour les semaines à venir et les réseaux, lourdes machines administratives seront longs à se mettre en place.
Pour quelle solution vont opter les personnes qui ne relèveront plus de soins infirmiers :
- selon leurs moyens financiers (pour ceux qui en ont ou qui bénéficient de prises en charges sociales suffisantes) les aides seront accomplies par des auxiliaires de vie, des aides soignantes voire même par des infirmières pour ceux qui peuvent se le permettre.
- les autres auront sans doute recours à des Services de Soins Infirmiers à Domicile : les soins y sont effectués par des aides-soignantes plus qualifiées que les aides à domicile, ces soins sont pris en charge par l'Assurance Maladie sur la base d'un prix de journée.
La deuxième possibilité sera sûrement celle que retiendront nos patients d'autant plus que l'annonce faite par le Ministère de l'Emploi et de la Solidarité d'augmenter de façon plus que conséquente le nombre de lit de SSIAD[16] va permettre d'absorber cette clientèle.
V Conclusion
Le PSI en introduisant dans la pratique des infirmières libérales un outil qui va permettre l'évaluation de la qualité des soins effectués se veut un outil de progrès.
La démarche qui consiste pour les infirmières à pouvoir se libérer d'une partie de leurs interventions qui pourront être accomplies par des aides qualifiées va leur permettre de se consacrer à des soins qui réclament davantage de leurs compétences techniques ou relationnelles.
Ces soins, à l'heure actuelle peu valorisés demandent à être, pour certains, mis à la nomenclature.
En ce qui concerne le corollaire de ce PSI qui consiste à différencier les soins relevant de budgets médicaux des aides relevant de budgets sociaux, nous ne sommes pas certaines que globalement, le budget de la nation n'est pas à en souffrir. D'autant plus que le PSI va induire un transfert des soins infirmiers accomplis par les libérales vers les SSIAD. Il y aura bien diminution du nombre d'AIS mais elle sera largement compensée par l'augmentation du nombre de journées payées aux SSIAD.
Mais ce qui rend inacceptable, en l'état, le projet d'avenant signé par les Caisses d'Assurance Maladie et la FNI, c'est cette notion de lettre-clef flottante.
VI Annexes
[1] cf. annexe 1 : Projet d'avenant à la convention nationale
[2] Pour rendre la lecture de ce document plus pratique, nous utiliserons le terme « infirmière » pour qualifier les infirmiers et infirmières libérales.
[3] cf. annexe 2 - la démarche de soin
[4] cf. annexe3 - Décret de compétence
[5] cf. annexe 7 - Prestation Spécifique Dépendance
[6] cf. annexe 8 - Allocation d'Education Spécialisée
[7] cf. annexe 9 - Allocation Compensatrice pour Tierce Personne
[8] cf. annexe 1 - Avenant à la convention
[9] AIS : Acte Infirmier de Soin
[10] cf. annexe 1 - Avenant à la convention
[11] cf. Annexe 5 - Soins et maintien à domicile des personnes dépendantes
[12] d'après l'intervention de Yves Gineste, formateur en soins infirmiers, Le Bost, 87220 Eyjeaux dans un forum internet.
[13] cf. annexe 4 - les aides à domicile
14 cf. annexe 5 - Soins et maintien à domicile des personnes dépendantes
[14] Recommandations pour la tenue du Dossier de Soins Infirmiers à domicile édictées par l'Agence Nationale d'Accréditation et d'Evaluation en Santé en juin 1997
[15] Rapport d'Anne-Marie Brocas sur l'exercice libéral des professions paramédicales (1999)
[16] cf. annexe 6 - lettre de Mme Gillot Secrétaire d'Etat à la Santé et aux Handicapés
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