Régulièrement, l’actualité nous fait rappeler à quel point nos personnes âgées sont fragiles. Fragilité qui ne se limite pas à la notion de santé mais fragilité à l’égard d’autrui. Pourtant, le rôle de notre société n’est-il pas de prendre soin des personnes âgées que nous sommes amenées à être ?
Les autorités publiques ont lancé une grande campagne d’information destinées aux professionnels de santé et aux établissements accueillant des personnes âgées sur la thématique : maltraitance - bientraitance. Savoir mieux la détecter et la prévenir.
« […] Une société se juge à la façon dont elle traite ses personnes âgées. Une société qui les délaisse, les sous estime, les dévalorise n’a pas de sens […] » R.SAINSAULIEU ; Données sociales hospitalières, synthèse 2002 ; « hôpital local, lieu de travail ».
1. Définition de la maltraitance des personnes âgées
1.1. La prise en compte de la maltraitance de la personne âgée : une préoccupation récente
La notion de maltraitance est apparue dans les années 80 dans les pays Anglo-Saxons. En 1987, l’intervention de Madame Ida HYLE, au Conseil de l’Europe, révèle ce type de violence.
En 1990, Sous l’impulsion de l’intervention du Professeur HUGONNOT à l’Académie de médecine, il sera créé, quelques années, plus tard, l’association d’ALMA France (1995) http://www.alma-france.org/ . Cette association de lutte contre la maltraitance des personnes âgées est surtout connue par son slogan « Allo, maltraitance des personnes âgées ».
Les premiers rapports rendus sur la maltraitance des personnes âgées ne datent que des années 2000 : reconnaissance de l’existence du phénomène, analyse des lieux de commissions d’actes de violence, identification des victimes, des auteurs.
Le 22 janvier 2002, M. DEBOUT, membre du conseil économique et social, a remis au secrétaire d’état aux personnes âgées, un rapport intitulé « Prévenir les maltraitances aux personnes âgées ». Ce rapport sera suivi d’une circulaire, en date du 3 mai 2002 relative à la prévention et, à la lutte contre la maltraitance envers les adultes vulnérables et notamment les personnes âgées.
La Loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico sociale Section 2, des droits des usagers du secteur social et médico social, précise : Art. L.311.3. L’exercice des droits et libertés individuels est garanti à toute personne prise en charge par des établissements et services sociaux et médico sociaux. Dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, lui sont assurés : Le respect de sa dignité, de son intégrité, de sa vie privée, de son intimité et de sa sécurité.
La politique de lutte contre la maltraitance institutionnel, familiale des personnes âgées a fait l’objet récemment d’un guide de gestion des risques des maltraitances en établissement élaboré par le comité national de vigilance de la maltraitance des personnes âgées. Le but recherché est de mieux cerner la maltraitance, savoir la détecter et surtout savoir la prévenir.
En juin 2006 était lancé la première journée mondiale de lutte contre ce fléau « la maltraitance des seniors »
Le 22 mars 2007, le ministre de la santé Monsieur Philippe BAS a rédigé une instruction ministérielle relative au développement de la bientraitance et au renforcement de la politique de lutte contre la maltraitance : Un plan en dix mesures pour agir contre la maltraitance des personnes âgées.
Madame Valérie Létard a présenté le 3977, un numéro national contre la maltraitance des personnes âgées qui concernera également les personnes handicapées. Ce numéro s’insère dans une politique globale en faveur de la bientraitance des personnes âgées. Madame Valérie Létard a également annoncé d’autres mesures phares pour renforcer la lutte contre la maltraitance : le lancement d’une étude pour mieux cerner la maltraitance à domicile ; la création d’un correspondant maltraitance dans chaque DDASS et le doublement des inspections dans les établissements.
Si le sujet reste encore malheureusement tabou. Les pouvoirs publics aidés des associations développent des campagnes d’informations destinées au public et forment les personnes intervenant auprès des personnes âgées à détecter le plus précocement tous signes de maltraitance.
Il est dès lors important de définir cette notion de « maltraitance des personnes âgées », de déterminer les auteurs et d’identifier juridiquement les situations. Afin de prévenir, de limiter la maltraitance, il semble opportun de faire le point sur les personnes susceptibles de dénoncer les violences et la compatibilité avec le secret professionnel astreint au monde médical qui est pourtant le plus souvent le plus proche et le principal interlocuteur avec la personne âgée.
La personne âgée ne bénéficie pas d’un statut particulier, sa vulnérabilité, en revanche, exige que l’on prête attention à tout signe de maltraitance qui ne se limite pas à la sphère physique, corporelle de la personne.
1.2 Perceptions de la maltraitance
Le conseil de l’Europe amené à se prononcer sur la violence de la personne âgée la définit ainsi : Elle se caractérise par tout acte ou omission commis par une personne s’il porte atteinte à la vie, l’intégrité corporelle ou psychique ou la liberté d’une autre personne ou compromet gravement le développement de sa personnalité et / ou nuit à sa sécurité financière
(comme le fait d’ignorer les appels de la personne, ne pas respecter son intimité).
L'INPEA (International Network for the Prevention of Elder Abuse) la définit comme Toute souffrance exercée sur un adulte âgé, mettant en danger le bien-être physique, émotionnel, spirituel ou social d'une personne. Les formes de maltraitance peuvent inclure, mais ne pas se limiter à des maltraitances physiques, sexuelles et émotionnelles, des abus financiers, la négligence, de l'intimidation, la domination, la discrimination, et l'auto - négligence.
.../...
Dans le même sens, l’association des petits frères des pauvres précise combien il est difficile de lutter contre ce fléau du fait que ces malveillances sont souvent des actes anodins, discrets et invisibles dont le préjudice est généralement ignoré des victimes âgées parce que ces malhonnêtetés répétées restent le plus souvent à la limite de la légalité
.
L’ensemble de ces définitions nous renvoie aux gestes, attitudes qui peuvent être qualifiées de maltraitance. Trop souvent, le grand public et parfois les professionnels par manque de formation associent la notion de maltraitance au seul critère de la violence physique.
2. Les formes de maltraitance
Il est parfois difficile d’apprécier la réalité de la situation, maltraitance réelle, divagation de la personne âgée, crainte d’informer les autorités compétentes sur une simple impression. A ces difficultés s’ajoute le silence de la personne par sentiment de représailles, de culpabilité et/ou de honte.
La maltraitance peut prendre diverses formes, physiques, psychologiques.
2.1 La maltraitance psychologique
Elle se caractérise par une privation, un déni de la personne comme une privation de visite, chantage, des propos humiliants, la placer à un niveau d’infériorité de soumission, absence de considération, non respect de l’intimité. Le fait de parler à une personne comme s’il s’agissait d’un enfant, d’avoir une attitude infantilisante à son égard est de la maltraitance psychologique. Les injures ne constituent pas à elles seules la maltraitance psychologique.
2.2 La maltraitance physique
Il peut s’agir de coups, de brutalité, de provocation à la chute, de situation d’enfermement permettant à l’auteur des maltraitances d’avoir une totale emprise sur la personne. A ce sombre tableau, il convient d’ajouter des violences propres au sujet âgé : malnutrition, refus d’aide pour les repas ou les soins d’hygiène, de mauvais soins comme laisser des escarres sans soin, excès de médicaments (neuroleptiques entre autre) ou le refus de prescrire ou donner des médicaments pour soulager les douleurs. Les défauts de soins ne sont pas propres aux soignants, la famille, les proches peuvent être les auteurs de ces actes.
La mise en place de contention peut être qualifiée comme de la maltraitance. En effet, la pose de contention répond à des conditions strictes : évaluation de l’état d’agitation du résident, évaluation des besoins et des risques, traçabilité du suivi et de l’évolution du patient. La pose de contention doit rester exceptionnel et répondre à un besoin précis. La prévention de chute, de fugue ne justifie pas la mise sous contention d’une personne. Tant le rapport de l’ANAES de 2000 Evaluation des pratiques professionnelles dans les établissements de santé ; limiter les risques de la contention physique de la personne
et la conférence de consensus sur Liberté d'aller et venir dans les établissements sanitaires et médico-sociaux
de 2004 ont précisé que le placement sous contention abusif peut être qualifié de maltraitance. La contention n’est légitime qu’à partir du moment où elle est prescrite dans l’intérêt du résident. Attacher un sujet âgé ne doit pas être un “procédé expéditif” pour prévenir les chutes, les blessures ou les troubles du comportement. En effet, il n'a jamais été fait la preuve de son efficacité dans ces indications. L'immobilisation prolongée imposée par une contention conduit les patients attachés à un déconditionnement physique et psychologique qui augmente au contraire la probabilité de chutes et de blessures.
[…] des actions de formation et d'information auprès des équipes susceptibles de prendre en charge des personnes âgées ainsi que des programmes de réduction de la contention doivent être déployés pour permettre une amélioration continue des pratiques professionnelles tout en respectant un des droits fondamentaux de la personne, la liberté d'aller et venir.
Recommandations de l’ANAES 2000.
Comme tout processus de soins à risque, il est impératif, pour en limiter les dangers et les conséquences, d’avoir recours à la pose de contention en vue d’immobiliser la personne, le moins souvent possible, le mieux possible et le moins longtemps possible. Une prescription médicale est obligatoire pour toute contention (barrière de lit également).
2.3 La maltraitance financière
C’est la forme la plus difficile à diagnostiquer du fait des divers stratagèmes mis en place par l’auteur. Très souvent, la personne va progressivement créer une situation de dépendance avec la personne âgée pour que celle-ci devienne « indispensable ». Progressivement, elle va faire croire à la personne âgée qu’elle ne pourra plus venir en raison des frais de transports, de la durée des trajets etc. Elle va alors recevoir de la part de la personne âgée une somme d’argent qui est donnée en contrepartie du service rendu
. Progressivement, les détournements de fonds seront de plus en plus importants. Il arrive, alors, que la personne âgée ait complètement conscience de la situation mais elle n’ose rien dire par crainte de se retrouver seule. La manipulation a parfaitement fonctionnée. Ces escroqueries ne sont malheureusement pas rares et la solitude des personnes âgées les rendent encore plus vulnérable à cette manipulation.
Les vols, détournements, extorsions, escroqueries, abus de confiance, chantage et autres hypothèses sont autant de maltraitances.
3. Les auteurs de la maltraitance
Selon les données d'Alma, si la majorité des maltraitances avaient lieu en institution en 2003, ce n'était plus le cas en 2004 où elles se produisaient en majorité à domicile. Les dénonciations continuent d'émaner principalement de la famille et des professionnels.
Les auteurs de la maltraitance, sont surtout, les « aidant ». Les personnes sont généralement en contacts depuis longtemps avec la personne âgée.
Il a été constaté que les auteurs de la maltraitance sont parfois en situation de grande détresse eux-mêmes. Ils sont dans un état d’épuisement trouvant parfois peu ou prou de structures d’accueil pouvant prendre la relève quelques semaines.
De plus en plus, une réflexion est menée sur la prévention de la maltraitance en cherchant, entre autre, à venir en aide aux aidants, aux familles qui sont souvent en situation de détresse, d’épuisement. La lutte contre la maltraitance ne se limite pas à un arsenal juridique de répression. C’est aussi savoir venir en aide aux personnes qui ont en charge des personnes âgées, c’est savoir s’interroger sur les facteurs de risques de maltraitance. C’est toute la réflexion menée ces dernières années : savoir la prévenir pour mieux la traiter.
Réagir rapidement et efficacement, c’est rendre à la personne une image de dignité, et respectueuse. C’est assurer sa sécurité physique, psychologique et patrimoniale.
4. Combattre la maltraitance
Lors de la journée mondiale de la personne âgée, il a été porté une attention toute particulière à la prévention et à la lutte contre toutes formes de maltraitance sur la personne âgée.
4.1 La prévention de la maltraitance
- En France, en application d’une circulaire du 3 mai 2002 relative à la prévention et à la lutte contre la maltraitance envers les personnes vulnérables, et notamment les personnes âgées, il devait être mis en place le « comité de vigilance contre la maltraitance des personnes âgées » à l’échelle départementale. Sa mission était : évaluer la maltraitance chez la personne âgée, élaborer un programme de sensibilisation et prévenir la maltraitance.
Le Comité National de Vigilance contre la Maltraitance des personnes âgées a mis en place une politique de lutte contre la maltraitance (décret 12 mars 2007 portant création du comité national de la vigilance) :
- La prévention consiste à informer le public de la maltraitance des personnes âgées, d’expliquer de définir la maltraitance des personnes âgées. De cette façon, les maltraités pourront prendre conscience qu’ils ne sont pas seuls et qu’une aide est possible.
- La prévention, c’est aussi aider les maltraitants en leur proposant des soutiens lorsqu’ils sont épuisés physiquement et psychiquement de prendre en charge au quotidien une personne âgée dépendante qui demande beaucoup d’attention et de travail. La prévention permet à toute personne de déceler la maltraitance d’une personne et de lui donner ainsi l’information des démarches à suivre pour venir en aide à la personne âgée. La prévention passe par l’information pour mieux identifier les personnes maltraitées, les maltraitants et définir les démarches à suivre pour qu’une telle situation cesse.
La maltraitance exige un véritable travail en amont pour l’éviter, la prévenir. Il n’en demeure pas moins que lorsque la maltraitance est identifiée des sanctions doivent être prises en application des dispositions juridiques pas toujours spécifiques à la personne âgée mais qui répriment toute atteinte à l’être humain dans sa chaire ou son esprit.
4.2 La dénonciation de la maltraitance
Porter à la connaissance des services compétents les faits de maltraitance pose la question du dilemme pour le corps médical : conciliation de l’obligation de se taire en application du secret médical et se taire c’est laissé en danger une personne.
L’article 226-14 du code pénal précise que le secret professionnel peut être écarté dans les cas où la loi en dispose autrement. Les dérogations au principe du secret sont limitativement prévues par la loi. La révélation de l’information l’emporte alors sur la confidentialité, la protection de la personne étant prioritaire.
Article 226-14 (Loi nº 2007-297 du 5 mars 2007 art. 34 I Journal Officiel du 7 mars 2007)
L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable :
1º A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;
2º Au médecin qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République les sévices ou privations qu'il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises. Lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son accord n'est pas nécessaire ;
[…]
Le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut faire l'objet d'aucune sanction disciplinaire.
Ainsi, les personnes ont l’obligation de lever le secret dans les cas suivants :
- Information des autorités judiciaires, médicales ou administratives de privation ou de sévices, toutes formes de maltraitance, dont ils ont eu connaissance et qui ont été infligés à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique de dépendance ;
- Lorsque la victime des maltraitances est mineure.
Dans les autres cas de maltraitance, le législateur laisse au praticien la liberté de révéler ou non une information de nature secrète :
- Au médecin qui, avec l’accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République les sévices qu’il a constatés dans l’exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences sexuelles de toute nature ont été commises.
Il convient de noter que le corps médical (soignant et aide-soignant) a l’obligation de porter à la connaissance des autorités compétentes les agressions, les mauvais traitements sur une personne qui n’est pas en mesure de se protéger. La personne âgée dépendante ou qui n’a plus toutes ses facultés mentales bénéficie de cette protection et le corps médical doit informer les autorités compétentes. Le cas échéant, il commet un délit en taisant de tels faits. En revanche, des adultes qui ne présentent pas une vulnérabilité particulière, l’infirmier en informe le médecin qui peut porter les faits à la connaissance des autorités qu’après avoir obtenu l’accord de la victime.
Afin de favoriser la levée du secret sans crainte de sanctions disciplinaire, la loi du 17 janvier 2002 a ajouté un troisième alinéa précisant qu’aucune sanction disciplinaire ne peut être prononcée du fait du signalement de sévices par le médecin aux autorités compétentes et dans les conditions prévues par le présent article.
L’article 44 du code de déontologie médical prévoit l’obligation de mettre tout en œuvre les moyens les plus adéquats pour la protéger en faisant preuve de prudence et de circonspection.
Dans un cas flagrant de maltraitance, le médecin ne doit pas hésiter à informer les autorités compétentes.
En revanche, lorsqu’il existe un doute, les dispositions du code de déontologie précisent bien qu’il doit agir avec tact et circonspection. En effet, un signalement sur de simples présomptions peut déstabiliser une famille. Mais, laisser une personne âgée se faire violenter peut être qualifié de non assistance à personne en danger. Il est certain que la tâche n’est pas aisée, d’autant plus, que la victime reconnaît très rarement les faits et préfère les nier par crainte de représailles, par honte.
Les professionnels qui ont en charge des personnes âgées sont des témoins sollicités par l’administration judiciaire à apporter leur témoignage. Il s’agit tant du personnel de santé (médecin, infirmier, aide-soignant etc.) ; les intervenants du domaine social (assistance sociale, membres d’association) ou le personnel des établissements hébergeant des personnes âgées. En contact permanent avec les personnes âgées, ils ont un rôle important tant pour la déceler et la dénoncer.
Que faire face à une suspicion de maltraitance ?
Il convient de différencier plusieurs hypothèses :
âºLa « victime » en parle directement à un As, IDE ou toute autre personne du service
- L’écouter pour recueillir toutes les informations nécessaires (auteur de l’acte, périodicité, description des agissements etc. pour un éventuel dépôt plainte)
- Transmettre les informations au cadre de santé qui en informera le médecin, assistance sociale pour déterminer la conduite à tenir
- Ne jamais faire seul un dépôt de plainte sans discussion au préalable en équipe.
⺠Crainte qu’une personne âgée est maltraitée
- En discuter en équipe et en informer le cadre de santé
- Mentionner dans le dossier de la personne les observations constatées et compte rendu de la réunion avec mention de la décision prise (Les observations constatées doivent être rédigées par la personne qui a vu les faits laissant penser qu’il y a maltraitance)
- Le cadre de santé avec le médecin, assistance sociale et la direction valident le dépôt de plainte si le faits sont avérés.
⺠Maltraitance avérée
- Informer le cadre
- Etablir un certificat médical
- Saisine des autorités judiciaires.
5. La maltraitance des personnes âgées et poursuites pénales
Les atteintes à l’intégrité physiques de la personne âgées relèvent des infractions de droit commun. En effet, la qualification juridique des faits ne tient pas compte de l’âge, de la vulnérabilité de la victime. En revanche, ces critères auront toute leur importance dans le prononcé de la peine.
5.1. Les atteintes à l’intégrité physique de la personne âgée
Les atteintes volontaires à la vie et à l’intégrité de la personne sont définies comme des crimes, délits ou contraventions qui, sous la forme de violences commises de manière consciente, lèsent la personne humaine, en entraînant des blessures ou le décès. Dictionnaire du vocabulaire juridique, Paris, Litec, 2002.
Le fait de donner volontairement la mort à autrui constitue un meurtre. Il est puni de trente ans de réclusion criminelle
article 221-1 du code pénal.
La qualification de meurtre est retenue dès lors que deux éléments sont réunis. D’une part, l’élément matériel à savoir le fait de tuer une personne et d’autre part l’élément intentionnel c'est-à-dire la volonté délibérée de donner la mort
Les violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner sont punies de quinze ans de réclusion criminelles
article 222-7 du code pénal.
Le crime de coups mortels implique que la mort de la victime ait nécessairement procédé des violences volontairement commises à son encontre. En l’espèce, le caractère intentionnel de l’infraction ne porte pas sur la volonté de provoquer la mort de la victime mais sur l’intention des violences infligées. En revanche, le décès de la personne n’était pas recherché, il est la conséquence directe des violences.Les violences ayant entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de huit jours sont punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
Article 222-11 du code pénal.
Dans ces divers exemples, il est sanctionné l’atteinte à l’intégrité corporelle de la personne âgée. Abuser de la vulnérabilité psychique de la personne âgée est également répréhensible.
5.2. L’abus de faiblesse
L’abus de faiblesse est traité dans le cadre de la législation du droit de la consommation. Il se définit comme le fait d’exploiter l’état d’ignorance ou de défaillance physique ou psychologique d’une personne, avec ou sans contrainte, aux fins de lui faire souscrire un engagement contractuel dont elle ne mesure pas la portée
Dictionnaire du vocabulaire juridique.
Il est à noter qu’un arrêt, rare en la matière, a refusé de retenir la qualification d’abus de faiblesse, même pour une personne très âgée, quand les qualités intellectuelles ne révèlent pas un état de vulnérabilité (Aix en Provence, 18 janvier 2000).
Cet arrêt rare recentre le débat sur l’état de vulnérabilité de la victime qui demande alors une attention, une protection plus importante et adaptée et par voie de conséquence une sanction plus importante du fait d’avoir profité de l’état de faiblesse de la personne.
Article 223-15-2 code pénal :
« Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 375000 euros d'amende l'abus frauduleux de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse soit d'un mineur, soit d'une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente et connue de son auteur, soit d'une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l'exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables.
Lorsque l'infraction est commise par le dirigeant de fait ou de droit d'un groupement qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d'exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activités, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende. »
5.3. L’abus de confiance
L’abus de confiance se définit comme le délit consistant dans le fait pour une personne détenant à titre précaire des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, de les détourner au préjudice d’autrui.
Dictionnaire juridique.
En l’espèce, il s’agit de l’individu qui profite de la confiance que lui prête « aveuglement » une personne âgée pour lui remettre des fonds, des biens de valeurs et que cet individu se les approprie au détriment de la personne âgée.
L’ensemble de ces infractions est loin d’être une énumération exhaustive des infractions pénales dont peut être victime la personne âgée. Il ne s’agit nullement d’infractions propres aux personnes âgées. Ce sont des qualifications qui peuvent être retenues pour toutes victimes de ces agissements. Mais, il est vrai statistiquement, elles représentent les infractions les plus couramment pratiquées sur la personne âgée.
En revanche, dans certaines hypothèses le code pénal tient compte de l’état de vulnérabilité de la personne qui constitue alors une circonstance aggravante à l’infraction et par conséquent une sanction plus sévère.
6. La vulnérabilité de la personne critère spécifique de la protection pénale
La vulnérabilité de la personne âgée peut être un élément constitutif de l’infraction. L’état vulnérable ou non de la personne s’apprécie au cas par cas. Ce n’est pas tant l’âge qui prime, c’est la fragilité psychologique, physique de la personne. Avait-elle conscience de la situation ou a-t-on profité de son état de dépendance, de vulnérabilité pour abuser de la personne âgée ?
L’article 223-3 du code pénal sanctionne à ce titre le délaissement : Le délaissement en, un lieu quelconque, d’une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychique est puni de cinq ans de prison et de 75 000 euros d’amende
.
Le délit de délaissement suppose un acte positif, exprimant de la part de son auteur la volonté d’abandonner définitivement la victime. La qualification de cette infraction tient compte tant de l’âge que des capacités physiques et psychologiques de la personne. Elle peut s’appliquer aux personnes âgées mais pas uniquement.
7. La vulnérabilité de la personne comme circonstance aggravante
La vulnérabilité de la personne âgée constitue une circonstance aggravante pour les atteintes à l’intégrité corporelle : meurtre (article 221-4 du code pénal), tortures et actes de barbarie (articles 222-3 et 222-4 du code pénal), violences (article 222-8 et suivants du code pénal), administrations de substances nuisibles (article 222-15 du code pénal), viol et agression sexuelles (articles 222-24 et 222-29 du code pénal).
Il en est de même lors des atteintes au patrimoine de la personne en cas de vol (article 311-4 du code pénal), escroquerie (article 313-2,4° du code pénal) et extorsion (article 312-2,2° du code pénal).
En conclusion l’arsenal juridique est suffisant pour réprimer les atteintes portées à la personne âgée. La priorité n’est pas tant la sanction mais la prévention. A cette fin, des formations sont organisées pour apprendre aux personnels travaillant avec des personnes âgées à domicile ou en établissement à détecter les gestes pouvant être qualifiés de maltraitance. Ces formations ne doivent pas les faire culpabiliser sur leurs pratiques mais leur faire prendre conscience que la répétition d’actes, de comportement peuvent parfois conduire à des situations à risque (comme l’absence d’évaluation des traitements, des paroles, des gestes, des contentions renouvelées sans évaluation, etc.
On peut se demander si remettre aux établissements accueillant des personnes âgées un kit clé en main sur les bonnes pratiques de prise en charge répond réellement aux attentes des professionnels ? Dans le même sens on peut s’interroger de l’intérêt de présenter via un DVD des scènes de la vie quotidienne d’un établissement et ensuite mentionner que ces gestes sont de la maltraitance ? Qui n’a pas un jour aidé à faire manger un résident tout en pensant à ce qui lui restait à faire ? Est-ce pour autant de la maltraitance ? Non, la personne est tout simplement soucieuse car elle se demande comment elle va arriver à faire tout ce qui lui incombe et qu’elle sait qu’elle n’aura pas le temps de discuter quelques instants avec les résidents.
Si l’on veut lutter efficacement contre la maltraitance, une réflexion doit être menée sur la maltraitance institutionnelle (carence des aides de l’Etat). En effet, les établissements sont très souvent confrontés à des problèmes de temps et de personnel (insuffisance d’infirmier, d’aide soignant) les empêchant de prendre en charge décemment une personne âgée.
Une réflexion globale doit être menée dans les établissements en coopération avec les pouvoirs publics pour rechercher des solutions adaptées aux circonstances.
Le respect de la dignité, de la personne est une obligation légale, éthique que lui doit la société en général.
Annexe : Fiche type d’un signalement
Fiche-type d'un signalement
Origine du signalement
- Données relatives au rédacteur et au destinataire du signalement
- nom, qualité, adresse
NB : afin de lever toute ambiguïté pour le destinataire, la source de toutes les informations suivantes doit être précisée.
- nom, qualité, adresse
- Données relatives à ou aux enfants(s) concerné(s)
- identité, âge, adresse, situation familiale, lieu d’accueil ou de scolarité, titulaire de l’autorité parentale ;
- éléments justifiant le signalement : faits observés ou rapportés, attitude de la famille, constatations médicales (tous ces aspects doivent être dans la mesure du possible décrits précisément, concrètement et chronologiquement référencés).
- Données relatives à la famille
- état-civil : noms, adresse(s), statut matrimonial, filiation des enfants ;
- renseignements administratifs : immatriculation CPAM, CAF... ;
- situation financière : revenus, prestations familiales, endettement, crédit... ;
- conditions de logement.
- Actions déjà menées évaluation de la situation
- suggestions sur les interventions souhaitées : degré d’urgence et modalité du suivi à préciser
- demande d’information sur les suites données par le destinataire du signalement
Ce document, dont un double doit toujours être conservé, doit être daté, signé, et adressé par lettre recommandée avec accusé de réception.
Bibliographie
- Assous, J., Polastron, L., Vaissière-Bonnet, M-G., « Les personnes âgées et nous : quel rôle dans la vie sociale ? », Gestions hospitalières, n°424, mars 2003
- Baumann, F., « Maltraitance à personne âgée : quand la déclaration est ambiguë », Responsabilités n°10, juin 2003 ;
- Duclos, R., « réflexion sur la charte des droits et libertés de la personne âgée dépendante », revue hospitalière, n°492, mi-juin 2003 ;
- François-Wachter, D., « Dignité et droits de la personne dépendante », Gérontologie n°128, 2003 ;
- Terrasson de Fougères, A., « La maltraitance des personnes âgées », revue de droit sanitaire et sociale, 2002 ;
- G., Brami ; Le projet institutionnel des établissements d’hébergement pour personnes âgées, Paris, Berger-Levrault, « Repère âge », 2000 ;
- N. Lelièvre, statut juridique de la personne âgée en établissement de soins et maison de retraite, coll. La pratique juridique droit sanitaire et social, Paris, Heure de France, 2004
- Comité national de vigilance contre la maltraitance des personnes âgées et adultes handicapés : Guide "Gestion des risques de maltraitance en établissement"(Mise à jour en juin 2008)
- BAS Philippe, ministère délégué aux personnes âgées, Plan de développement de la bientraitance et de renforcement de la lutte contre la maltraitance ; 14 janvier 2007 ;
- Fédération hospitalière de France, Guide pratique : « Bientraitance/ Maltraitance à usage des établissements et institutions, Que faire face à la révélation d’une situation de maltraitance », 2008
NathalieLELIEVRE Juriste Droit de la SAnté Chargée de conférence Membre de la commission éthique et douleur Comité de rédaction infirmiers.com nathalie.lelievre@infirmiers.com
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