Gants ou SHA, pourquoi choisir ? C’est visiblement la question que se pose certains soignants. Sur notre forum, plusieurs professionnels ont remarqué des usages qu’ils jugent inappropriés des gants et aussi des solutions hydroalcooliques. Pour ou contre le port systématique des gants ? Pour ou contre le fait de mettre du SHA sur des gants pour les économiser ? Une chose est sûre, pour beaucoup de soignants expérimentés, les formations sur l’hygiène mériteraient d’être renouvelées régulièrement.
Il est toujours intéressant de se questionner sur ses pratiques notamment sur l’hygiène dont les avis divergent parfois et les recommandations évoluent. Cependant, il arrive que des actes, voire des "habitudes" adoptés par les collègues, étonnent
! Solange, infirmière en EHPAD, raconte sur notre forum comment les agissements d’une aide-soignante l’ont fait halluciner
. C'était le soir, lors des couchers, je sors d'une chambre après avoir posé une perfusion. Je vois une aide-soignante mettre de la solution hydroalcoolique sur les gants qu'elle porte, puis rentrer dans une nouvelle chambre (pour faire un nouveau coucher). Je rentre à mon tour pour lui demander pourquoi elle n'a pas changé de gants... Elle me répond : tout le monde fait cela ici, nous n’avons pas assez de gants parce qu'il faut faire des économies !
Solange reste abasourdie par ces explications et juge bon de rappeler à la professionnelle que le SHA rend les gants poreux
, et que ses mains sont sales
. Or, les règles d’hygiène sont strictes. Ainsi, l’infirmière ne s’étonne plus que trois résidentes voisines aient contracté la même infection urinaire
.
La plupart de ses pairs sont du même avis et lui apportent leur soutien, notamment Bipaul air, également aide-soignant, qui s’agace du panurgisme de ce type de comportement : Tout le monde le fait donc ce n’est pas grave
. Je me permets de laisser mon impression quant à cette dérive qui semble être une grosse faute d'hygiène ! En effet, il faudrait renvoyer les personnels, non pas des EPHAD, mais à leurs cours, ou en stage, ou même leur demander de réfléchir simplement à la logique des gestes qu’ils accomplissent en service et leur incidence
.
Histoiredevivre estime aussi qu’il s’agit d’une faute mais conseille de toujours partir du principe que le ou la collègue peut être de bonne foi. Si cette collègue a raison, et que c'est la direction qui limite les stocks de gants, la cadre est sans doute déjà au courant de la situation et n'a peut-être rien fait pour corriger le problème. Dans ces circonstances, je ne connais pas quelles sont les autorités compétentes à avertir. Tu peux revenir sur cette question et en discuter avec cette personne. S'il y a des protocoles d'hygiène à disposition, tu pourrais les lui mettre sous le nez, et lui expliquer que tu refuses de prendre la responsabilité d'éventuelles infections associées aux soins dues au non-respect des règles d'hygiène. Si elle reste sur sa position, à ta place, je signalerai un événement indésirable pour te couvrir
.
Une collègue AS m'a raconté que, dans la clinique où elle exerçait, une IDE lui demandait de lui mettre du stérilium sur ses gants entre deux chambres…
Protocoliser et écrire les procédures
Il est vrai que, comme les actes des aides-soignants sont sous la responsabilité des infirmiers, Solange peut avoir, en théorie, plus facilement gain de cause. Mais il se trouve que ce genre de manquement aux règles d’hygiène demeure, apparemment, moins rare qu’on pourrait le croire. Personnellement j'ai vu des médecins accomplir les mêmes actes que l 'aide-soignante en question
, se rappelle Bipaul air. Orror a également été témoin du mauvais usage des gants alors qu’elle était en stage avec une infirmière diplômée : elle avait mis des gants, retiré le pansement souillé, mis un petit coup de SHA dessus et c’était reparti pour continuer le pansement !
Pour Bipaul air la meilleure solution est, dans ces cas-là, d’en référer à l’infirmier hygiéniste
qui sera la personne la plus compétente pour expliquer à ces professionnels les conséquences de leurs agissements. Quant à Solange, elle a pris la décision d’écrire un protocole sur le bon usage des gants en EHPAD qu’elle a ensuite fait valider par la cadre, une fois celle-ci tenue au courant de la situation. Elle en a parlé lors des transmissions et a distribué le document à chacune des personnes présentes. Je suis quand même soulagée que les bonnes pratiques soient maintenant rédigées et signées
.
En 7 ans de réanimation et 10 ans de préhospitalier, je reste convaincu de l'absolu manque d'humanité d'un contact en latex systématique
Prendre des gants avec les patients… jusqu’où ?
Le débat a changé de niveau suite à cette phrase de Solange : En plus, elle utilise des gants pour "déshabiller la personne" !
en parlant de la soignante en question. Sur ce point, les opinions étaient particulièrement divisées, certains estimant que le port systématique de gants est préférable pour protéger les autres et soi-même. C’était notamment le cas d’Elhombredelamanche : Personnellement, comme je travaille aux urgences, je porte des gants lors des déshabillages de patients. On ne sait jamais dans quoi on va mettre les mains
. Une opinion en partie partagée par Pilou-pilou, même si, selon lui, tout dépend du service où le soignant travaille. Je ne mettais pas de gants systématiquement, mais suite à différentes "surprises", maintenant je le fais. Cependant, cela dépend du domaine où l’on exerce. En EHPAD, effectivement, si tu déshabilles le résident pour, par exemple, l'aider à mettre son pyjama, c'est dommage, à mon sens, de recourir à des gants, sauf si le résident s'oublie parfois...
.
Certains professionnels ont tout de même rappelé que, les gants, comme le reste du matériel, représentaient un coût pour l’établissement et qu’il fallait les utiliser judicieusement. Un point de vue qui a particulièrement agacé Elhombredelamancha. Pour lui, compter les gants c’est gratter sur un budget qui n’a clairement pas à être rogné, au prix du gant et au vu du service rendu. C’est une honte de mégotter là-dessus Si vous voulez faire des économies, ne le faites pas en bradant la protection d’autrui. Chez moi les principes de précaution et de préservation (de soi comme des autres) prévalent
, s’exclame-t-il.
Face à cela, certains, dont Jo_Bis, argumentent que le port des gants ne suffit pas à respecter les normes d’hygiène. Ce n'est pas en les portant en permanence que les pratiques s'amélioreront, ce sont deux choses bien différentes. Il y a des soignants qui ne se lavent jamais les mains, c’est du déjà vu. Pour se donner "bonne conscience" on porte des gants n'importe quand sans être plus propre pour autant ? Personne n'a dit qu'il ne fallait jamais recourir à des gants, mais les utiliser dans les règles de l'art..., ce n’est pas la même chose ! Si un patient est atteint de gastroentérite, de peste bubonique, de choléra, ou de grippe..., bien sûr qu'il faudra mettre des gants. Toutefois, pour un vieil homme qui est simplement en pyjama et qui attend sa toilette, je ne vois pas l’intérêt
. Pour Haegen, cela peut être interprété comme un manque de respect vis-à-vis de la personne qui est, par défaut, considérée comme quelqu’un dont il faut se prémunir . Je suis aussi contre le port systématique des gants. Non pas pour des raisons économiques, cela ne m'avait jamais effleuré l'esprit, mais parce que je trouve cela dégradant pour la personne soignée, cela veut dire que tout patient est potentiellement sale !
, s’énerve-t-il en argumentant que pour lui un professionnel de santé doit être capable de toucher un corps malade avec un minimum d’humanité
.
Alors prendre des gants avec les patients, cela signifie parfois ne pas en mettre ? Vaste débat dont il est bon de discourir sans que cela devienne la guerre de gangs. N’hésitez pas à réagir à cet article sur le forum ou nos réseaux sociaux.
Roxane Curtet Journaliste infirmiers.com roxane.curtet@infirmiers.com @roxane0706
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