Les fugues de patients hospitalisés sous contrainte en psychiatrie sont un phénomène assez fréquent et semblent difficiles à prévenir si la personne est déterminée, ont rapporté à APM Santé des responsables hospitaliers.
Depuis le 19 juillet, la presse s'est fait l'écho de 8 fugues de personnes hospitalisées sous contrainte en psychiatrie et, dans 5 cas, les fugueurs étaient des détenus transférés en hospitalisation d'office (HO) ou des hommes adressés par le système judiciaire.
La dernière fugue, annoncée mercredi, concerne un patient hospitalisé d'office dans un service de psychiatrie du centre hospitalier de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) qui s'est échappé samedi en passant par le vasistas des douches et en glissant le long d'une gouttière sur 2 étages.
Cette accumulation de fugues -le terme est préféré par les responsables de la psychiatrie à celui d'évasion, trop liée au milieu pénitentiaire- de détenus hospitalisés est exceptionnelle, alors que la "sortie sans autorisation" des patients hospitalisés sous contrainte (hospitalisation d'office et hospitalisation à la demande d'un tiers) est un phénomène fréquent.
"A chaque garde que je fais -et j'en fais souvent-, on me signale une fugue. Cela n'a rien d'exceptionnel", témoigne un psychiatre hospitalier parisien.
Les patients en hospitalisation sous contrainte déclarés absents sont en général retrouvés assez rapidement, quand ils ne reviennent pas d'eux-mêmes.
"Depuis mi-juillet, il y a une conjonction d'événements mais les fugues sont un phénomène fréquent et, dans plus de 90% des cas, les patients sont ramenés ou reviennent", témoigne le Dr Bernard Cazenave, président de la commission médicale d'établissement du centre hospitalier Charles Perrens de Bordeaux et secrétaire général de la conférence des présidents de CME de CHS.
"La plupart du temps, les infirmiers de secteur qui connaissent bien l'environnement social et familial des patients les retrouvent à leur domicile ou dans leur famille", ajoute-t-il.
"Quand nous constatons une absence, nous commençons par chercher dans le parc de l'hôpital, qui est très grand, puis un agent va voir à la gare", indique Christian Maillard, directeur adjoint du centre hospitalier interdépartemental de Clermont (Oise). "Puis nous contactons la famille. Dans le cas de sortie d'essai, souvent le patient ne fait que repousser de quelques heures son retour".
"Une personne un peu délirante est assez désorganisée, il n'y a donc pas de stratégie d'évasion et de cavale", souligne Bernard Cazenave. "Dans ces cas-là, la police et la gendarmerie nous laissent faire. En revanche, toute fugue d'un HO considéré comme dangereux, et les D 398 [détenus hospitalisés"> en font partie, est immédiatement signalée à la police et la gendarmerie".
PAS D'AMALGAME ENTRE PRISON ET PSYCHIATRIE
Les directeurs et les psychiatres interrogés par APM Santé font part de leur lassitude face à la médiatisation de ces fugues, en raison de la banalité du phénomène et de l'amalgame fait entre les vocations de la prison et de l'hôpital.
"Ce sont deux milieux fermés mais ils n'ont pas la même vocation. Celle de l'hôpital est de soigner, pas d'enfermer les gens, et face à un patient qui est déterminé à sortir, nous n'avons pas les moyens de résister", estime Bernard Cazenave.
"La semaine dernière, un HO qui n'était pas un détenu a été récupéré par le poste de garde à l'entrée de l'hôpital. A quelques mètres près, nous aurions eu les honneurs de la presse", plaisante le directeur du CH du Vinatier, Dominique Valmary.
Certains pointent aussi les risques d'une "surmédiatisation". "Je serai un détenu, cela me donnerait des idées et je ferai tout pour me faire transférer en psychiatrie", souligne un psychiatre.
Mais les patients risquent aussi de pâtir de cette publicité, regrette David Causse, délégué général adjoint de la Fédération hospitalière de France (FHF). "Les associations d'usagers sont navrés de l'amalgame fait entre les détenus et les patients hospitalisés en psychiatrie. Et il ne faut pas non plus ignorer la force de suggestion de tels événements pour des esprits fragiles ou vulnérables".
Les responsables hospitaliers souhaiteraient donc que la distinction soit bien faite, dans le public, entre les hospitalisés sous contrainte, en HO et HDT et les détenus hospitalisés dans des conditions déterminées par l'article D 398 du code de procédure pénale.
Ils estiment que les fugues de détenus ne pourront être mieux prévenues que lorsque les unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA), prévues dans le Plan de santé mentale pour les détenus, seront en service et soulignent que c'est une question à traiter avec les ministères de l'intérieur et de la justice.
"L'hospitalisation des détenus n'est pas qu'un problème de l'hôpital", relève David Causse. "Il y a eu une réunion des directeurs d'hôpitaux au ministère de la santé mais nous n'avons pas vu de réunion semblable au ministère de la justice ou de l'intérieur"./hm
INTERNATIONAL
Infirmiers, infirmières : appel à candidatures pour les prix "Reconnaissance" 2025 du SIDIIEF
HOSPITALISATION A DOMICILE
Un flash sécurité patient sur les évènements indésirables associés aux soins en HAD
THÉRAPIES COMPLÉMENTAIRES
Hypnose, méditation : la révolution silencieuse
RECRUTEMENT
Pénurie d'infirmiers : où en est-on ?