Les pouvoirs publics ont voté de nombreux textes fixant la prise en charge de la douleur comme une priorité nationale, une obligation juridique pour les établissements hospitaliers et les soignants.
1. Bref rappel des dispositions juridiques relatives à la prise en charge de la douleur
- La loi du 4 février 1995 introduit pour les établissements de santé la notion d'obligation vis à vis de la prise en charge de la douleur : article L 710-3-1 du code de santé publique
- Divers textes, recommandations rappellent que la prise en charge de la douleur ne peut être efficace que par une prise en charge pluridisciplinaire. Médecins et infirmiers sont tenus par leurs règles professionnelles de prendre en considération la douleur du patient.
=> Le nouveau code déontologie médicale du 6 septembre 1995 s'est mis en adéquation avec cette nouvelle obligation de lutte contre la douleur puisque désormais deux articles le visent directement (articles 37 et 38).
=> La prise en charge de la douleur est désormais intégrée dans le décret relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'infirmiers (décret du 11 février 2002).
- La charte du patient hospitalisé prévoit également en son article 2 "Au cours des traitements et des soins, la prise en compte de la dimension douloureuse, physique et psychologique des patients et le soulagement de la souffrance doivent être une préoccupation constante de tous les intervenants."
- Outre tous ces textes, il ne faut pas oublier les engagements pris dans les deux plans de lutte contre la douleur de Monsieur KOUCHNER
- La philosophie du premier plan de lutte contre la douleur (circulaire du 24 septembre 1998 relative à la mise en ouvre du plan d'action triennal contre la douleur dans les établissements de santé publics et privés) était la douleur n'est pas une fatalité, elle doit être au centre des préoccupations de tout professionnel de santé.
- Le nouveau programme poursuit les objectifs du premier plan mais vise plus particulièrement les douleurs chroniques, souffrance en fin de vie. Il est en autre ciblé sur la douleur provoquée par les soins et la chirurgie, la douleur de l'enfant et la prise en charge de la migraine.
Avec le deuxième plan, on est passé du stade de mission au stade d'engagement. En effet, le second plan (2002- 2005) remplace le carnet douleur par le contrat d'engagement douleur.
En plus de son rôle d'information, il devient un acte d'engagement pour les établissements hospitaliers. En autre, le quatrième point de ce nouveau plan vise à "amener les établissements de santé à s'engager dans un programme de prise en charge de la douleur".
La prise en charge de la douleur ne peut être efficace à partir du moment où cette prise en charge est pluridisciplinaire. Chaque intervenant dans les soins a un rôle important à jouer et autre les infirmiers.
2. Soins infirmiers et prise en charge de la douleur
Le second plan de lutte contre la douleur prévoit parmi les priorités nationales pour 2000-2005 de "renforcer le rôle de l'infirmier notamment dans la douleur provoquée"(paragraphe 5 du plan). De plus, la prise en charge de la douleur est intégrée dans le décret relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession d'infirmier (décret du 11 février 2002).
- Le décret précise que tout infirmier (hospitalier et libéral) :
- évalue la douleur dans le cadre de son rôle propre (article 2, 5°),
- est habilitée à entreprendre et à adapter les traitements antalgiques selon des protocoles préétablis, écrits, datés et signés par un médecin (article 7),
- peut sur prescription médicale, injecter des médicaments à des fins analgésiques dans des cathéters périduraux et intra-thécaux ou placés à proximité d'un tronc ou plexus nerveux (article 8).
Pour une prise en charge de la douleur efficace et de qualité, le travail d'équipe est recommandé notamment par la rédaction de protocoles.
La circulaire N°98/94 du 11février 1999 relative à la mise en place de protocoles de prise en charge de la douleur aiguë par les équipes pluridisciplinaires médicales et soignantes dans les établissements de santé et institutions médico-sociales répondait à cette attente.
Le décret intègre les dispositions prévues par cette circulaire. Cette codification apporte une réponse aux difficultés présentées dans le bilan du premier plan de lutte. En effet, il a été constaté que les protocoles qui doivent permettre à l'infirmier de mettre en ouvre un traitement antalgique étaient rarement appliqués. Ces protocoles soulevaient la question de la responsabilité respective de l'infirmier et du médecin. Désormais, le décret fixe les règles et prévoit la possibilité pour l'infirmier d'administrer un traitement antalgique selon les dispositions prévues par le protocole.
Il n'en demeure pas moins que l'infirmier doit d'une part mentionné dans le dossier de soins le traitement administré au patient et d'autre part en informé le médecin. L'application des protocoles permet à l'infirmier d'intervenir dans des délais plus brefs pour soulager le patient mais il doit respecter les dispositions du protocole. L'exécution de soins en dehors des cas, des dispositions du protocole revient à donner des soins sans prescription médicale ce qui constitue une faute professionnelle.
- Le second plan de lutte prévoit également la création de 125 postes d'infirmiers référents douleur dont leur mission est :
- de dispenser et retransmettre son savoir
- faire par une action transversale au niveau de la structure de soins,
- d'aider à la mise en place du programme de lutte contre la douleur de l'établissement. Il participe à l'évaluation (audit de pratique, enquête), la mise en ouvre de protocoles (élaboration, mise en place, suivi), l'information, formation et le conseil aux professionnels de l'établissement,
- d'assurer la coordination et la cohérence des actions engagées avec celles mises en place dans le cadre de la politique de soins palliatifs de l'établissement,
- de participer à l'évolution des connaissances par des actions de recherche.
Le deuxième plan poursuit les objectifs du premier plan avec notamment cette volonté d'une prise en charge globale du patient et surtout un travail de groupe des divers intervenants. La pluridisciplinarité des équipes de prise en charge de la douleur reste le mot d'ordre.
Le plan de lutte contre la douleur précise cependant que ces postes infirmiers ne seront attribués qu'aux établissements de santé engagés dans une démarche d'amélioration de la qualité de la prise en charge.
Nathalie Lelievre -Juriste spécialisée en droit de la santé Comité Rédaction Infirmiers.com nathalie.lelievre@infirmiers.com
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