L'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris a inauguré mercredi à l'Institut de cardiologie de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris sa première salle hybride qui réunit en un seul site un bloc opératoire de chirurgie cardiaque et une salle de cardiologie interventionnelle.
La première salle hybride de France a été ouverte à l'Institut Jacques Cartier (groupe Générale de santé) à Massy (Essonne) en 2008, rappelle-t-on.
Le concept de cette salle est de "réunir en un même lieu les exigences d'efficience et de sécurité d'un bloc opératoire (asepsie, matériel, table, personnel) et celles d'une salle d'imagerie interventionnelle (qualité des images, réduction de doses, ergonomie, salle de vision et de contrôle)", a expliqué le Pr Alain Pavie, chef du service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire, lors de l'inauguration.
Elle permettra d'assurer le maximum de sécurité au malade, avec notamment la présence permanente des anesthésistes et celle d'un perfusionniste en "stand-by" et d'une pompe de circulation extra-corporelle prête en cas de nécessité.
La nécessité d'une salle hybride est née de l'apparition de nouvelles techniques de cardiologie interventionnelle peu invasives nécessitant une collaboration entre cardiologues interventionnels et chirurgiens, et elle permet d'éviter des transferts de patients d'une salle à l'autre.
Les principales interventions auxquelles la salle hybride s'adresse sont la pose de valves aortiques percutanées et d'endoprothèses aortiques ou l'ablation de sondes de pacemakers, en cas de sonde infectée ou plus rarement cassée.
Le Pr Pavie pense réaliser en salle hybride environ 100 à 150 poses de valve percutanée par an, une cinquantaine de poses d'endoprothèses aortiques et une centaine d'ablations de sonde, a-t-il précisé à l'APM. "L'ablation de sonde est une spécialité du pôle, ce qui explique que nous en ayons une concentration importante".
Cette salle se prête aussi à d'autres interventions, comme l'ablation des troubles du rythme cardiaque et le traitement de la fibrillation atriale par de petites voies d'accès, a-t-il précisé.
"Nous sommes dans la période de montée en charge, je pense que l'on peut très bien réaliser trois interventions par jour en salle hybride".
Salle hybride, équipe hybride
La salle a été inaugurée à distance, pour des raisons d'asepsie; elle a été présentée en vidéo et avec des photographies projetées dans l'amphithéâtre Adicare de l'Institut de cardiologie.
Le Pr Iradj Gandjbakhch, ancien chef du service de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire du groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, en a fait une description enthousiaste. "La salle est belle. Et on ne peut travailler que dans la beauté. Elle est ergonomique. Elle permet d'abattre les cloisons entre les différentes disciplines. Les radiologues, cardiologues interventionnels, chirurgiens, anesthésistes, panseuses : tout le monde est heureux. Elle est faite pour effectuer les gestes nécessaires aux patients".
"Dans le pôle Coeur, la salle hybride est vraiment l'exemple de la collaboration entre différentes catégories de personnels pour rendre service à nos patients", a renchéri le Pr Michel Komajda, responsable médical du pôle Coeur de la Pitié-Salpêtrière
"Une salle hybride, ce n'est pas suffisant, il faut des équipes hybrides, ou plutôt multidisciplinaires", a précisé le Pr Pavie, en présentant les cinq acteurs de la salle parisienne, le Dr Philippe Cluzel, radiologue interventionnel, les Dr Farzin Beygui et Jean-Philippe Collet, cardiologues interventionnels, le Pr Pascal Leprince, chirurgien cardiovasculaire, et le Dr Françoise Hidden-Lucet, rythmologue.
"Ils tournent sur les postes et en cas de problème, chacun reprend sa place", a-t-il expliqué, fier de présenter une équipe "vraiment multidisciplinaire".
La salle a été réalisée avec Philips, "parce que Philips était moins cher que Siemens et parce que c'était le seul à proposer un arceau [de radiologie] fixé au plafond", a justifié le Pr Pavie. Une fixation au plafond permet de dégager le matériel plus facilement du champ opératoire.
Elle est dotée d'écrans multiples, permettant à tous les intervenants de visualiser l'intervention sur écran, d'une table de bloc Maquet dotée d'un plateau carbone radio transparent, d'une salle de contrôle et de visualisation, d'une console de contrôle, de trois scialytiques mobiles, d'un bras anesthésiant, d'un appareil de circulation extra-corporelle (CEC).
Une caméra est également reliée à l'auditorium Adicare, permettant la vidéotransmission pour l'enseignement. "La notion d'enseignement par survision [vue d'en haut à travers une vitre] est également conservée", a précisé le Pr Pavie.
Un succès politique
Salle Hybride - © charrial/ap-hp
Cette salle hybride fait partie des premières de France. Outre celle de l'Institut Jacques Cartier à Massy, une autre a été ouverte à l'ôpital de La Timone à Marseille (AP-HM), a indiqué le Pr Pavie dans un entretien à l'APM.
Le CHU de Rennes a lancé un appel d'offres le 9 mars 2010, qui s'achèvera le 26 avril. Une salle hybride est également prévue au CHU de Nancy. Enfin, parmi les projets qu'il connaît, le chirurgien a ajouté qu'"un projet de salle hybride a été accepté à l'hôpital Bichat [AP-HP, Paris] et une autre ouvrira probablement aussi à Nantes".
Pour la salle de l'Institut de cardiologie, "l'appel d'offres a eu lieu fin août, les travaux ont démarré en septembre. Le planning a été remarquablement suivi", s'est félicité le Pr Pavie au cours de l'inauguration. "La première procédure en salle hybride a eu lieu en janvier et l'activité a réellement démarré en février", a-t-il précisé.
"Nous avons parlé pour la première fois d'ouvrir une salle hybride il y a 18 mois et elle est déjà opérationnelle. Ceci est la preuve que, lorsqu'il y a la volonté politique, on est tout à fait capables, au même titre que des institutions privées, de mettre en place rapidement un projet", s'est félicité Jacques Léglise, directeur du groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière.
"Pour un président de CME [commission médicale d'établissement], c'est l'exemple d'une politique portée par une restructuration médicalement pertinente à laquelle adhère l'ensemble de la communauté médicale", a estimé le Pr Pierre Coriat, président de la CME de l'AP-HP, soulignant que ce projet n'avait pu voir le jour que grâce à "l'harmonie des équipes réunies et soudées autour d'un même projet".
"Je vais essayer de porter cet exemple dans le plan AP-HP 2010-2014 pour que d'autres exemples soient la fierté de l'institution", a-t-il annoncé.
Dominique Giorgi, secrétaire général à la Direction générale de l'AP-HP, a quant à lui déclaré qu'il "comptait sur [l'équipe de la salle hybride] pour reprendre la patientèle au privé", soulignant encore une fois qu'il s'agissait d'une "opération exemplaire car elle montre comment la collaboration doit s'instaurer entre différentes spécialités au bénéfice du patient" et qu'elle prouve que "l'AP est à la pointe de la technique".
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