Quels sont les dispositifs médicaux qui entrainent des événements indésirables graves associés aux soins (EIGS) et dans quels contextes ? Et comment y remédier ? Ce sont à ces questions que le dernier rapport d’analyse de la Haute autorité de santé (HAS) apporte réponses et préconisations. Réalisé à partir de 1 008 EIGS en lien avec les dispositifs médicaux déclarés entre le 1er mars 2017 et le 31 décembre 2023, il commence par rappeler que « le secteur des dispositifs médicaux (DM) est qualifié de vaste, diversifié, hétérogène : il comporte plus de 20 000 types de produits, allant des consommables à usage unique ou réutilisables (pansements, compresses, etc.), aux implants (prothèses mammaires, stimulateurs cardiaques, etc.) en passant par les équipements (lits médicaux…) ».
Parmi les 1 008 EIGS, 503 concernaient des femmes et 485 des hommes, et concernaient pour 813 d’entre eux des adultes de plus de 40 ans – dont 50% ayant entre 60 et 80 ans ; 6% des EIGS concernaient des enfants de la naissance à 5 ans. La plupart se produisent dans les établissements de santé (878 EIGS), « préférentiellement en chirurgie/plateau technique (379/878) ou en service de médecine (267/878) », précise la HAS.
3 types de causes identifiés
« Les raisons pour lesquelles un EIGS survient sont multifactorielles », continue-t-elle, ciblant des « causes immédiates », « des causes profondes » et « des barrières ayant fonctionné ou pas ». Pour les premières, c’est une utilisation inadaptée du dispositif médical qui apparaît comme principale explication (341 EIGS), suivie d’un geste « traumatique » lors de la pause (193, lors d’endoscopies digestives et hystéroscopies par exemple). Sont également avancées défaillances du dispositif médical, non-respect des consignes du suivi ou encore retard de prise en charge, notamment dans le cas de pause de prothèses orthopédiques, de matériel d’oxygénothérapie ou de défibrillateur cardiaque implantable.
Parmi les causes profondes, les facteurs liés aux patients, en particulier l’état de santé et les antécédents, arrivent en tête, avec 723 EIGS déclarés, soit 72%. « Ces 2 facteurs sont en lien avec l’âge des patients qui, pour 51 %, ont plus de 60 ans (372/723) », note la HAS. Viennent ensuite les facteurs liés aux tâches à accomplir (absence de mise à jour des protocoles ou des procédures, non-respect des recommandations de bonne pratique lors de la pause), puis ceux liés à l’environnement de travail (53%, fournitures et charge de travail en tête). Inexpérience et manque de formation sont particulièrement pointés du doigt dans ce panel de causes. « L’association de ces deux facteurs, inexpérience et méconnaissance, est source de stress, d’autant plus si le professionnel est nouvellement diplômé », souligne-t-elle.
Enfin, « dans 555 déclarations d’EIGS sur 1 008 (55 %), une mesure barrière ayant fonctionné a été identifiée », essentiellement des mesures barrières humaines liées à l’expérience (encadrement par un professionnel de santé sénior), à des effectifs suffisamment nombreux ou encore à des protocoles mis à disposition des soignants. L’absence de double vérification ou d’écoute du patient constitue, elle, des mesures barrières qui n’ont au contraire pas fonctionné.
Comment mieux lutter contre la survenue de ces EIGS ?
Afin de réduire le nombre d’EIGS liés à l’utilisation de dispositifs médicaux, la HAS liste 10 préconisations, la première reposant sur « l’appropriation de la culture positive de l’erreur », via la participation des utilisateurs des dispositifs médicaux à la mise en œuvre de la démarche de certification et grâce à l’analyse des EIGS afin de mettre en place des plans d’action. Elle appelle aussi à sensibiliser au respect des bonnes pratiques, en favorisant la formation (en particulier sur la désinfection, stérilisation et circuits des dispositifs réutilisables, la pose de cathéters veineux, l’utilisation des perfusions…). Côté établissements de santé, la HAS les encourage à mettre en œuvre des politiques de formation à l’usage des dispositifs, à associer la gouvernance, les professionnels de santé et les fabricants à la politique d’achat, mais aussi « mieux prévenir les tentatives de suicides et suicides » utilisant un dispositif médical en organisant un repérage systématique des idées suicidaires à l’arrivée des patients.
« Les conséquences pour le patient d’un EIGS ne peuvent être que « graves », à savoir le décès, la mise en jeu du pronostic vital ou la survenue probable d’un déficit fonctionnel permanent », martèle la HAS, pour mieux insister sur la nécessité de prévenir leur survenue. « L’analyse a montré que les conséquences principales des EIGS ont été la mise en jeu du pronostic vital dans 40 % des déclarations (407/1 008), le décès dans 34 % des déclarations (340/1 008) et un probable déficit fonctionnel permanent dans 26 % des déclarations (261/1 008). »
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