A l’heure où le Gouvernement planche sur un congé maternité censé être équitable pour toutes les femmes quel que soit leur statut, la patience s'émousse et la colère gronde du côté des paramédicales exerçant en libéral. Via une pétition, elles mettent la pression sur le Gouvernement et réclament l’égalité pour toutes les professions de santé libérales
. Deux poids deux mesures n'est en effet pas acceptable !
La teneur du communiqué de la Fédération nationale des Infirmiers, syndicat d'infirmiers libéraux, en date du 19 février, pose la question qui continue à fâcher l'ensemble des professions paramédicales exerçant en secteur libéral : pourquoi un tel manque d'équité à l'heure où l'on ne cesse de discourir sur les droits de chacun, hommes ou femmes, et leur respect ? La FNI le rappelle, le 8 février dernier, les Syndicats Médicaux et l’Assurance Maladie ont signé un avenant conventionnel instaurant un dispositif d’aide financière complémentaire pour les médecins interrompant leur activité pour cause de maternité, de paternité ou d'adoption, afin de les aider, pendant ce congé, à faire face aux charges inhérentes à la gestion du cabinet médical. Personne n’a compris depuis pourquoi les professions paramédicales ne mériteraient pas les mêmes égards que les médecins face à la maternité ou la paternité.
L'engagement du quinquenat Macron
Marisol Touraine l'avait préconisé en son temps, en 2016, alors ministre de la Santé, dans le cadre de la Grande conférence de santé : un congé maternité, rémunéré, pour les femmes médecins libérales signataires du CAS (Contrat d'Accès aux Soins)
. Les réactions n'avaient pas tardé, plusieurs organisations de professionnels de santé libéraux
l'interpellaient alors pour que la mise en place d'un congé maternité rémunéré pour les femmes médecins libérales s'applique à l'ensemble des professionnelles de santé exerçant en libéral
. Quoi de plus normal en effet ! L'idée avait donc fait son chemin...
Je veux un congé maternité garanti pour toutes les femmes, quel que soit leur statut
, avait déclaré Emmanuel Macron, alors candidat à l'élection présidentielle en 2017. Marlène Schiappa, secrétaire d'État à l'Égalité femmes-hommes, avait de son côté confirmé l'été dernier
que le droit au congé maternité serait étendu pour les non-salariées, métier par métier tout au long du quinquennat
. Pour avancer sur ce dossier, Edouard Philippe, le Premier ministre, a confié à la députée Marie-Pierre Rixain, Présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes de l’Assemblée Nationale, une mission afin de formuler des propositions pour permettre aux femmes, quel que soit leur statut ou leur activité professionnelle, de bénéficier d’un "système lisible, équitable et favorisant le libre choix dans la prise de congés
.
Nous revendiquons le droit à ce que chacune puisse vivre une grossesse sereine et épanouie sans avoir à appeler chaque jour son banquier pour demander une autorisation de découvert, ou la CPAM qui a parfois du retard pour payer les maigres indemnités journalières qui nous sont autorisées !
Pourtant, la FNI le rappelle, depuis la création du dispositif conventionnel "avantage maternité" dédié aux seuls médecins, nous n'avons eu de cesse de dénoncer cette injustice délibérée commise envers les autres professions de santé et qui plus est des professions très féminisées comme le sont les infirmières libérales, lesquelles de surcroît s’installent en libéral plus tôt que les médecins
. Aujourd'hui, les paramédicaux le déplorent : le statu quo n'est plus possible et la pression est forte pour aller vite. Une pétition à l'initiative de paramédicales exerçant en libéral - infirmières, sages-femmes, kinésithérapeutes, orthophonistes, dentistes, pédicures... -, adressée notamment à la ministre de la Santé, Agnès Buzin, et la secrétaire d'Etat à l'égalité femmes-hommes, Marlène Schiappa, a recueilli à l'heure d'aujourd'hui plus de 67 000 signatures. L'étonnement et la colère dominent : c'est avec une grande consternation que nous, femmes kinés et autres professions paramédicales, avons été informées que la mesure ne concerne QUE les femmes médecins libérales et que toutes les femmes représentant le milieu libéral paramédical (en) ont été exclues
, expliquent les signataires dans leur pétition, réclamant l'égalité de l'aide financière pour toutes les femmes libérales en congé maternité
. Et d'expliquer qu'en tant que kiné, nous recevons pendant notre congé maternité une indemnité journalière d'environ 50 euros par jour ainsi qu'une allocation forfaitaire de repos maternelle d'environ 3.200 euros
en tout, des aides qui ne comblent malheureusement pas nos charges mensuelles de cabinet, l'impôt sur le revenu, les cotisations mensuelles à l'URSSAF, la CARPIMKO (caisse de retraite des professions libérales médicales, NDLR), ainsi que nos frais personnels
, expliquent les auteurs de la pétition. Une pétition largement soutenue et qui ne cesse de grossir en matière de signatures.
Plus que jamais, la FNI est déterminée à obtenir l’égalité pour toutes les professions de santé libérales en matière de congé maternité, parce que c’est légitime et dans l’ordre naturel de l’évolution de notre société.
Actuellement quelles indemnités pour une infirmière libérale ?
- des indemnités journalières forfaitaires, versées par la CPAM, pour un total de 54,43€/jour au 1er janvier 2018 ;
- une allocation forfaitaire de repos maternel à hauteur de 3 311€ au 1er janvier 2018. La première partie est versée à la fin du 7eme mois de grossesse, et la deuxième après la naissance ;
- une indemnité en cas de grossesse à risque et pathologique, si vous vous arrêtez avant votre congé légal de maternité, qui s’élève à 44,34€/jour au 1er janvier 2018.
Source - Congé maternité : vos indemnités journalières Ameli.fr
La FNI rappelle dans son communiqué qu'elle soutient cette action et la relaye afin de lui donner encore plus d’ampleur
. Elle fait également savoir qu'elle a initié plusieurs initiatives concrètes sur ce dossier afin de faire bouger les lignes et d’imposer définitivement la reconnaissance des infirmières et au-delà de toutes les paramédicales dans la prise en charge de leurs congés maternité
. De fait, elle a saisi le Directeur Général de l’UNCAM et la Ministre des Solidarités et de la Santé afin que l’avantage maternité soit inscrit à l’ordre du jour des négociations en cours de l’accord cadre interprofessionnel (ACIP)
. Cette initiative, sur le modèle de ce qui a été mis en oeuvre pour les médecins libéraux, viserait à sécuriser la prise en charge du congé maternité à travers un cadre conventionnel lisible et pérenne
. Quand aux appuis de Marie-Pierre Rixain et Marlène Schiappa, ils sont bien évidemment attendus, ce qui pourrait faciliter l'avancée du dossier.
Même colère du côté du syndicat d'infirmiers libéraux Convergence Infirmière, on tombe des nues… Comment peut-on supporter pareilles injustices ? Comment, même, simplement imaginer que nos ″têtes pensantes″ aient pu pondre une réglementation aussi avantageuse pour certains… et inexistante pour d’autres ? Cela va à l’encontre de tous les principes républicains et démocratiques auxquels nous sommes attachés
. De son côté, la Sénatrice Fabienne Keller a pris parti pour un congé maternité équitable pour toutes les professionnelles de santé libérales
en adressant un courrier à Agnès Buzyn.
L'ONSIIL, autre syndicat d'IDEL, s'est exprimé à son tour le 9 mars 2018 en adressant un courrier à Agnès Buzyn lui demandant de faire cesser cette situation qui ne devrait même pas exister dans le pays des droits de l'homme. Nous comptons sur vous pour que disparaissent les inégalités et cela sans qu'il y ait de contrepartie conventionnelle bien sûr, ce sujet étant à traiter en dehors de toutes contraintes financières ou autres
.
"Pour nous libérales, cette douce période n'est souvent qu'angoisse et tracas..."
J'attends mon troisième enfant. Je suis à six mois de grossesse. Cela commence à être compliqué de travailler. Je me tortille comme un ver de terre dans ma voiture, mon ventre me gêne. La fatigue commence à se faire sentir. J'ai des douleurs aux plis de l'aine. Verdict : hernie inguinale due principalement au fait de monter et descendre de voiture. À cela, on ajoute les 250 kilomètres parcourus par jour. Je suis donc contrainte de m'arrêter ce qui est loin d'être facile. En gros, je vais me retrouver pendant 4 mois avec des rentrées d'argent inférieures à mes sorties (sorties signifient ici charges habituelles à payer Urssaf, Carpimko...). Tout cela bien sûr, sans compter le coût de la vie. Heureusement j'ai pu mettre un peu de côté, un petit bas de laine quoi ! Mais comment font celles qui sont arrêtées au début de leur grossesse ? Comment font celles qui ne peuvent avoir un petit pécule sous le coude ? Il faut également trouver une remplaçante qui accepte de faire 4 mois à temps plein dans le même cabinet. Et là, c'est un parcours également semé d'embûches. Lorsque l'on est salarié, on ne soucie pas de tout cela. On s'arrête lorsque le moment est venu. On rentre dans le congé maternité comme dans un lit douillet, mais nous les libérales cette douce période n'est souvent qu'angoisse et tracas. Pourquoi le fait d'être libérale et notamment infirmière (une majorité de femmes vous en conviendrez) serait-il un frein à la maternité ? Ne peut-on pas faire les deux ? Exercer son métier et pouvoir devenir mère lorsqu'on le souhaite
.
Lire l'intégralité du billet "Flash back : le congé maternité" by la petite infirmière
Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern
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