Dispositif VigilanS, numéro national, formation des professionnels, évolution des modes de gouvernance…, le gouvernement entend renforcer sa politique de prévention du suicide aussi bien au niveau national que régional.
Provoquer une cassure significative de la courbe du taux de suicides en France
d’ici 2027 : c’est l’ambition présentée par le gouvernement dans une instruction diffusée auprès des Agences régionales de santé (ARS) et paru dans le Bulletin officiel Santé, Protection Sociale, Solidarité du 29 juillet. Avec, comme objectif affiché, la réduction d’au moins 10% du nombre d’hospitalisations pour tentative de suicide dans chaque région, pour arriver à un total national de moins de 80 000 hospitalisations
.
Faire évoluer la stratégie nationale
Le document s’inscrit surtout dans un contexte particulier. D’une part, la crise sanitaire s’est révélée un catalyseur
sur les problèmes de santé mentale. Et d’autre part, elle fait suite aux Assises de la psychiatrie
qui se sont déroulées en septembre 2021, et qui ont contribué à dresser un état des lieux de ce domaine du soin. En découle la nécessité de renforcer la stratégie nationale de prévention du suicide (SNPS) et d’accompagner sa mise en œuvre grâce aux acquis
réalisés depuis 2018 et l’inscription de la prévention du suicide dans la feuille de route santé mentale et psychiatrie*.
Le gouvernement entend ainsi mobiliser un certain nombre d’actions, à commencer par préciser les modes de gouvernance de cette stratégie et leurs différents échelons. À la Direction générale de la santé échoit le pilotage au niveau national, tandis que les Agences régionales de santé (ARS) se voient confier celui à l’échelle régionale. À cet égard, précise-t-il, les instances de pilotage doivent s’ouvrir à davantage d’acteurs : représentants de services d’aide à distance en santé spécialisés, référents des centres répondants du 3114, représentants de la direction de la communication des ARS, coordinateurs de projets territoriaux de santé mentale (PTSM) ou de conseils locaux de santé mentale (CLSM), etc
. Le texte insiste par ailleurs sur l’importance de développer une approche multisectorielle de la SNPS en élargissant les partenariats entre les secteurs sanitaire et médico-social, mais aussi éducatif, associatif, judiciaire… Et ce, dans une logique de coopération coordonnée qui suppose une juste répartition et une mise en complémentarité des rôles et des attributions de chaque acteur en fonction de ses compétences et de ses responsabilités
.
Montée en charge des dispositifs d’intervention
Vient ensuite l’appel à renforcer les outils déjà présents sur le territoire, et notamment le dispositif VigilanS
et le numéro national de prévention du suicide, le 3114, entré en fonctionnement le 1er octobre 2021. L’instruction demande ainsi l’extension de VigilanS à l’ensemble du territoire, afin d’augmenter le nombre de personnes prises en charge après une tentative de suicide
, et l’inclusion au sein du dispositif des patients par l’ensemble des services d’urgences. En avril 2022, celui-ci était déployé dans 17 régions (dont 4 d’Outre-Mer) et 78 départements. Les nouvelles équipes devront se composer d’un psychiatre et de deux répondants, ceux-ci pouvant être au choix des infirmiers ou des psychologues. Pour les autres, il s’agit de les renforcer avec l’adjonction d’un cadre de santé, qui permet de fluidifier l’organisation du travail et contribue à la bonne intégration de VigilanS au sein d’un établissement de santé
.
Les chiffres en France Si le taux de suicide en France est en baisse constante depuis 2000, • Il demeure à 12,5 pour 100 000 habitants, contre 10,8 pour la moyenne européenne. • Le nombre de tentatives de suicide par an est, lui, d’environ 200 000. • Elles entraînent 100 000 hospitalisations et 200 000 passages aux urgences. • 75% des récidives ont lieu dans les 6 mois suivent une tentative de suicide. |
Le prévention en première ligne
Il est également impératif que ce dispositif s’articule avec le 3114, dont les enjeux sont différents. Si VigilanS intervient en effet auprès des personnes ayant fait une tentative de suicide, le rôle du 3114 est bien préventif, avec notamment l’évaluation du risque suicidaire et la désescalade de la crise suicidaire. Une fusion ou une substitution des dispositifs ne sont pas possibles
», note l'instruction, mais des mutualisations d’équipes peuvent être mises en place pour gagner en efficience et en attractivité grâce à une variété des missions
. Une articulation qui pourrait également passer par la mise en place d’instances de suivi partagées. Il est enfin précisé que le 3114 a aussi pour vocation d’intervenir en postvention
, soit après un suicide, en soutien aux proches endeuillés, famille et amis pouvant être exposés à des risques suicidaires accrus.
13 centres régionaux répondants existent actuellement, et de nouvelles structures sont appelées à voir le jour entre 2022 et 2023 pour parvenir, à terme, à 17 centres opérationnels. Outre leurs missions d’accueil, d’évaluation du risque et d’intervention, les équipes de répondants, composées d’infirmiers ou de psychologues placés sous la supervision d’un psychiatre, sont chargées d’orienter les usagers vers les services d’aide ou de soins adaptés mais aussi d’intervenir auprès des professionnels de santé confrontés à des problématiques liées au suicide ou à sa prévention. En février 2022, 4 mois après sa mise en place, le 3114 recensait 34 000 appels .
Quid de la formation des soignants ?
La montée en charge de ces dispositifs est étroitement conditionnée par le renforcement de la formation des soignants qui sont amenés à y participer, insiste de plus l’instruction. Dans le cas de la prévention du suicide, il s’agit de structurer le repérage des personnes à risque pour leur proposer le plus précocement possible des solutions adaptées et, si nécessaire, un accompagnement vers le soin
. 31 formateurs nationaux ont pour mission de former des formateurs régionaux, présents dans les ARS, qui interviennent à leur tour auprès des professionnels de santé. Sera également mise en place une formation spécifique au dispositif sentinelle, qui consiste en l’identification, la formation, l’accompagnement et la mise en réseau d’un ensemble de sentinelles au service du repérage des individus susceptibles de présenter un risque suicidaire et de leur orientation vers un dispositif d’évaluation et/ou de soins
. Le document met également l’accent sur l’intérêt de promouvoir la formation de secourisme en santé mentale, perçue comme un outil de sensibilisation globale, toujours en articulation avec les autres modules de formation en prévention du suicide.
L’ensemble des dispositifs et des actions mis en place feront enfin l’objet d’évaluations, grâce à un certain nombre d’indicateurs définis : nombre de personnes incluses par an et par région ou part des services d’urgences réalisant des inclusions au sein de VigilanS, nombre de plans de postvention lancés par les régions dans la prévention de la contagion suicidaire, ou encore nombre de centres régionaux répondants opérationnels à temps complet pour le 3114.
*Consulter la feuille de route sur le site du ministère de la Santé
Audrey ParvaisJournaliste audrey.parvais@gpsante.fr
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