On les appelle masques "barrières", masques "grand public" ou encore masques en tissu. Ils sont désormais entrés dans notre quotidien puisque depuis le 11 mai dernier, début du déconfinement progressif, ils sont devenus obligatoires dans les transports en commun, au travail (lorsque des mesures de distanciation sociales ne peuvent être maintenues) et fortement recommandés dans de nombreux lieux publics. Pour adopter les bons gestes, Pierre Parneix, Médecin de Santé Publique et d'Hygiène Hospitalière au centre hospitalier universitaire de Bordeaux (CHU), a répondu à nos questions.
Masque chirurgical ou masque en tissu : lequel de ces deux masques doit-être privilégié par le grand public ?
"Le masque en tissu me semble plus adapté pour le grand public. Son coût de revient est moindre et il n’en reste pas moins performant. Il est aussi plus sympa (on en trouve avec des couleurs, des motifs…) et plus écologique (comme on peut le réutiliser, on a moins la tentation de le jeter par terre…) mais force est de constater que le masque chirurgical prédomine actuellement".
"Le masque chirurgical permet de filtrer à la fois l’air inhalé et l’air expiré". Est-ce à dire qu’il vaut tout de même mieux le privilégier ?
"Disons que cela dépend de la qualité du masque en tissu : en effet, les masques barrières sont certifiés par la direction générale des entreprises qui mentionne tous les résultats des tests effectués sur ces masques et leurs performances. Dans le cas des masques en tissu faits maison, mieux vaut privilégier deux couches extérieures en coton et une couche intermédiaire de polypropylène, à l’image des masques chirurgicaux qui comprennent 3 couches. Une couche étanche est nécessaire".
Comment le mettre et comment l’enlever ?
"L’important est d’abord de se laver, ou désinfecter, soigneusement les mains avant et après la mise en place du masque sur le visage. Quel que soit le type de masque utilisé, on s’assure du sens de son masque. (Pour le masque à pli, il faut le déplier et placer la face bombée à l’extérieur afin qu’elle épouse la forme du visage. Le masque chirurgical doit, lui, être placé la face colorée vers l’extérieur.
En général, on vient positionner son masque sur le nez (au niveau de la barrette nasale), et on le manipule plutôt par ses attaches. Les attaches auriculaires sont les plus aisées à mettre. Sinon on noue une première lanière (celle du haut) puis on déplie le masque sous le menton de façon à couvrir l’ensemble du bas du visage. Le nez (soit la partie la plus à risque avec la muqueuse olfactive), la bouche, et le menton doivent être pris à l’intérieur du masque".
Quels sont les gestes à ne pas faire ?
"Ce qui n’est pas bien : c’est de mettre son masque autour de son cou lorsqu’il ne sert plus. Lorsqu’on le remet, on le prend à pleines mains, il y a donc un risque de s’auto-contaminer. Mieux vaut donc l’enlever et le placer par exemple dans un sac-congélation quand on n’en a plus besoin. L’idée est quand même de le manipuler le moins possible car l’extérieur du masque peut être contaminé".
Quelle est la durée de vie d’un masque ? chirurgical ? En tissu ?
"La durée de vie des masques chirurgicaux et des masques en tissu est d’approximativement 4 heures. Il s’agit toutefois d’une moyenne. Si on trouve son masque trop humide, il faut le changer. L’idéal est donc d’avoir plusieurs masques sur soi".
Quand est-il nécessaire d’en porter un ?
"Chaque fois que l’on se rend dans un lieu public fermé, il vaut mieux en porter un. Dans les transports également évidemment (c’est d’ailleurs devenu obligatoire). Il est aussi fortement recommandé d’en porter un lorsqu’on rend visite à une personne fragile.
Quand on déambule dans la rue : soit on est dans une circulation peu encombrée, qui nous permet d’éviter les gens et alors on peut ne pas porter de masque. Si l’on s’aperçoit en revanche que ce n’est plus gérable, et qu’on est amené à croiser trop de gens, alors il faut mettre son masque. D’où l’intérêt d’en garder toujours un sur soi".
Comment bien utiliser son masque ? La réponse, en vidéo.
De nombreuses questions se posent sur l'entretien de nos masques barrières. Comment les laver ?
"Nous ne disposons pas d’étude scientifiques sur une durée spécifique de lavage de ces masques, mais il est recommandé d’effectuer un cycle de lavage à 60°C avec un produit classique et sans ajouter de produit désinfectant (qui pourrait s’avérer allergisant et toxique). Lorsque le textile le permet, le repassage des masques en tissu va, en quelques secondes, détruire le virus".
Combien de fois peut-on laver son masque en tissu ?
"Il convient de se référer à l’emballage de ces masques. Certains fabricants préconisent de les laver de 20 à 30 fois maximum, d’autres jusqu’à 50 fois… Il faut surtout vérifier à chaque utilisation que son masque n’est pas altéré. Si l’on sent une perte de performance (par exemple que l’on respire presque normalement), il faut le changer. Les attaches, qui ont tendance à se dégrader en premier, sont un bon marqueur de l’état général du masque".
Le port du masque ne dispense pas de respecter la distanciation physique : pourquoi ?
"Si deux personnes qui sont en contact portent chacune un masque, la transmission du virus est fortement limitée. On estime alors que le niveau de sécurité est acceptable. Néanmoins, le principe de la distanciation doit rester l’habitude".
Soignants : quels conseils pour eux quand ils sont avec leurs proches ?
"Les soignants doivent appliquer les mêmes règles que les autres citoyens, et faire preuve d’une certaine exemplarité. Durant l’épidémie hors contexte de soins, le stress diminuant, on a vu les soignants se relâcher légitimement un peu pendant les pauses à l’hôpital. Il a fallu réorganiser les choses et réinstaurer de la distanciation. Gardons en tête, nous soignants, que même lorsqu’on n’est plus dans le soin, un niveau de vigilance standard doit être maintenu".
Quel bilan feriez-vous aujourd’hui ?
"Globalement les masques sont plutôt correctement portés dans les transports et les supermarchés. Si tout le monde joue le jeu, on diminue tout de même le risque. Ce n’est pas une contrainte énorme et il faut en prendre l’habitude".
Masques chirurgicaux jetés dans la nature : une préoccupation écologique sérieuse…
C’est une nouvelle menace, après la menace… Des masques chirurgicaux usagés jetés par terre au risque de finir dans la nature ou qui s'égarent dans les poubelles destinées au tri sélectif : ces déchets d'un nouveau type, (confectionnés à partir de polypropylène, matière thermoplastique très dense, non biodégradable et non recyclable), potentiellement contaminés, inquiètent les collectivités et soulèvent un épineux défi environnemental. Si les consignes semblent désormais mieux respectées, le déconfinement représente un risque
, souligne ainsi Fabrice Rossignol, président de la Fédération nationale des activités de la dépollution et de l'environnement (FNADE). Notamment au travail, où les salariés jettent quotidiennement un ou deux masques : Il faut qu'il y ait une poubelle ad hoc dans les entreprises
.
La décomposition des masques dans la nature prendrait 400 ans et le spectacle de masques échouant massivement sur des plages hongkongaises avait amené des ONG à sonner l'alarme dès le mois de mars. Dans une lettre adressée à Brune Poirson, secrétaire d'Etat à la Transition écologique, le député LREM Damien Adam appelait début mai à organiser une filière de récupération et de recyclage
pour assurer un réemploi des masques qui permettrait d'éviter un énorme gâchis de matières
.
Une mission difficile, même si le recours aux masques en tissu diminue l'empreinte environnementale, et que des prototypes de masques biodégradables, encore non aboutis, sont en développement. Le dilemme plus général entre impératif sanitaire et souci environnemental perdure : Le recours au jetable, dans l'urgence du début de la crise sanitaire, semble se transformer en une nouvelle normalité, sans que la question des alternatives possibles soit posée
, déplore l'ONG Zero Waste.
Note
Toutes les informations pratiques sur la conception des masques sont disponibles sur le site de l'AFNOR. https://www.afnor.org/
Propos recueillis par Susie BOURQUINJournaliste susie.bourquin@infirmiers.com @SusieBourquin
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