Heidi est infirmière depuis près de 20 ans en Suisse Romande. Sur son blog, elle raconte son expérience au fil des jours. Aujourd'hui, elle nous parle du syndrome des cœurs brisés au travers d'un cas qu'elle a rencontré...
Peut-on mourir d'amour ? Pour moi, c'était possible, mais dû à une grosse dépression à la suite de la disparition (volontaire ou non) de l'être aimé. Mais ça c'était avant... Avant d'avoir dans mon service, une patiente, 80 ans, douleurs thoraciques typiques faisant penser à un infarctus (aussi appelé "crise cardiaque"). Ok, on la traite avec les moyens habituels : aspirine, dérivés nitrés pour faire diminuer la douleur et descendre la tension artérielle un peu trop haute, de l'oxygène. L'ECG montre un segment ST surélevé, typique de l'infarctus, là aussi.
Du coup, Madame Violette est acheminée au CHU où les spécialistes lui font une coronarographie. Cet examen consiste à aller voir l'intérieur des artères coronaires, celles qui irriguent le cœur et qui permettent à ce muscle bien-aimé de remplir ses fonctions. Si une ou plusieurs de ces artères coronaires se bouchent, il se produit une souffrance, puis une nécrose (donc la mort tissulaire) de ce muscle. C'est donc un infarctus (que les cardiologues me pardonnent si je simplifie un peu trop!)
Donc, Madame Violette est partie au CHU, toute tremblante...
- Vous savez madame, ça fait à peine un mois que j'ai enterré mon mari, je me remets à peine et voilà que je dois aller faire cet examen qui me fait très peur. Mes enfants sont loin, ils ont aussi leurs soucis...
Mes collègues ambulanciers et moi essayons de rassurer Madame Violette, qui part les larmes aux yeux.
Le lendemain, je retrouve Madame Violette dans mon service.
- Déjà de retour
- Oui, la coro était blanche, alors ils nous l'ont renvoyée.
(-> traduction: la coronarographie n'a rien montré, les coronaires sont propres, ce qui fait que le CHU, continuellement sur-occupé, nous a renvoyé la patiente dans les plus brefs délais.
Bien... Je retrouve une Madame Violette soulagée, mais intriguée...
- Ils n'ont rien trouvé, mais je vous assure, j'ai eu mal !
- Oui, je vous crois. Du reste, votre tracé électrique était assez clair... On verra tout à l'heure avec le cardiologue qui viendra faire la visite !
Le cardiologue arrive, regarde les ECG de Madame Violette, celui du jour et ceux qui ont précédé. Il se gratte le menton et murmure ces mots : "tako-Ttsubo".
- Gné? Pardon ? Que dites-vous ?
(là, je me demande si la venue dans notre petite ville d'un restaurant japonais n'a pas altéré les sens de notre brave médecin... )
- Ceci est un syndrome de tako-tsubo, on voit à l’échocardiographie une contraction ventriculaire gauche qui ressemble au tako-tsubo, mot japonais désignant les pièges à goulot étroit servant à capturer les pieuvres. Ce syndrome arrive principalement aux femmes âgées de 58 à 75 ans, ménopausées et exposées à un stress émotionnel ou physique intense. Les raisons qui expliquent leur prédisposition restent inexpliquées. L’un des principaux postulats avance cependant que la perte de protection œstrogénique suivant la ménopause pourrait avoir une répercussion sur la microcirculation et jouer un rôle significatif dans le phénomène de dilatation du ventricule gauche.
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Madame Violette est encore restée une journée en observation chez nous, a reçu un traitement adapté, comme après un infarctus et a pu rentrer chez elle.
Note
- Ce que j'ai mis dans la bouche de notre cardiologue vient d'ici : la cardiomyopathie de tako-tsubo (fiche explicative à l'usage d'infirmières canadiennes)
Heidi Infirmière http://www.nurseheidi.com/
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