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Réforme du système de santé : la "prescription" du gouvernement

Publié le 13/02/2018

C'est depuis l'hôpital Simone Veil d'Eaubonne, dans le Val d'Oise, que la ministre de la Santé Agnès Buzyn et le Premier ministre Edouard Philippe ont présenté, mardi 13 février, leur stratégie de transformation du système de santé.  Au programme, cinq grands chantiers : qualité et pertinence des soins, modes de financements, développement du numérique, formation des professionnels de santé, gestion des ressources humaines à l’hôpital et organisation territoriale des hôpitaux, pour un objectif affiché : mieux dépenser. Les Français ont conscience que le temps des rafistolages est révolu. Ils attendent des réformes d’ensemble, a déclaré le Premier ministre lors de son allocution. Et il y a urgence selon le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger qui parle de burn out de l’hôpital.

@EPhilippePM -Certaines orientations ont été confirmées : regroupements d'hôpitaux (qui seront approfondis), virage ambulatoire, modification de la T2A ou encore instauration d’un service sanitaire pour les étudiants en santé pour cette année.

L'hôpital, on le sait, souffre. Personnels épuisés, conditions de travail très difficiles, manque de moyens... depuis des mois, les soignants dressent un état des lieux alarmant. Cette situation, de plus en plus critique (les hôpitaux publics ont connu un déficit historique entre 1,2 et 1,5 milliard d'euros en 2017) a donné lieu à plusieurs manifestations d’exaspération de la part des personnels hospitaliers ces derniers mois (grèves, lettres ouvertes, pétitions...) et à l'apparition du hashtag # BalanceTonHosto. C’est dans ce contexte tendu que la ministre de la Santé Agnès Buzyn et le Premier ministre Edouard Philippe ont présenté mardi 13 février leurs priorités pour transformer le système de santé.

Certaines orientations ont notamment été confirmées : regroupements d'hôpitaux (qui seront approfondis), virage ambulatoire, modification de la T2A ou encore instauration d’un service sanitaire pour les étudiants en santé pour cette année.

Financement : le gouvernement veut sortir du tout T2A

Au premier rang des préoccupations : la question du financement. Aujourd’hui, les hôpitaux et cliniques sont rémunérés par l’assurance maladie « à l’acte », ce qui incite les établissements à orienter leur activité vers les actes les plus rémunérateurs. L’objectif de la réforme est ainsi de plafonner à 50% la tarification de l’activité (T2A) des hôpitaux. Ce dossier sensible sera confié à une équipe d’experts chargés d’étudier plusieurs modèles de financement nouveaux d’ici la fin de l’année 2019. Le Premier ministre a également dévoilé que 100 millions d'euros seront alloués au ministère d’Agnès Buzyn pour mener à bien cette refonte qui se veut ambitieuse.

Le temps des rafistolages est révolu. Nous allons transformer notre système de santé, en mettant le patient au centre et en construisant sur l’essentiel : ceux qui, chaque jour, soignent nos concitoyens. Edouard Philippe

Qualité et pertinence des soins : des propositions attendues pour l’été

Autre gros chantier : la qualité et la pertinence des soins. En octobre 2017 sur LCI, Agnès Buzyn estimait qu’un acte sur trois à l’hôpital s’avérait non pertinent,puisque ceux-ci représentent un surcoût pour l’Assurance Maladie. Afin de réduire les inconvénients et les risques pour les patients, tout en répondant aux enjeux d’une gestion économe de la santé, le gouvernement entend faire en sorte que puissent être proposés la bonne intervention (le bon acte), au bon endroit, au bon moment et par le bon praticien. Dans ce domaine pourtant, rien de véritablement concret pour l’heure : La ministre saisira, en coordination avec la Haute autorité de santé et l’assurance maladie, les conseils nationaux professionnels des différentes spécialités et le collège de médecine générale pour qu’ils proposent des actions afin d’améliorer, dans les pratiques, la pertinence des soins. Ils feront parvenir leurs propositions d’ici l’été 2018, précise le communiqué du ministère.

En outre, la satisfaction des patients devra elle-aussi être systématiquement mesurée, et tous les établissements mèneront régulièrement des enquêtes auprès des personnels sur leur perception du service rendu aux patients.

En tant que professionnelle de santé, j’ai connu les difficultés d’un système essoufflé. En tant que ministre, j’entends vos souffrances. Par notre travail, nous lançons une transformation qui affectera tous les acteurs de l’offre de soins. #MieuxSoigner - Agnès Buzyn

Repenser l’organisation territoriale des soins : le défi

C’est l’un des défis que s’est fixé le gouvernement : repenser l’organisation territoriale des soins. Le développement du numérique, de la télémédecine, la diversification des modes d’exercice sont de premières réponses, précise le gouvernement, qui veut aller plus loin, déclinant plusieurs pistes d’actions, plus ou moins concrètes :

  • Continuer à structurer les soins de ville : Les professionnels de chaque territoire doivent mettre en œuvre ces objectifs, notamment à travers la mise en œuvre des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). À terme, l’objectif est que l’exercice isolé devienne l’exception.
  • Continuer à tisser des liens entre les soins de ville et l’hôpital.  
  • Lancer des expérimentations territoriales avec d’ici la fin de l’année 2018, un appel à projets visant à identifier 3 à 5 territoires qui pourront proposer des modèles d’organisation totalement nouveaux, L’objectif ? Transcender les clivages actuels ville/hôpital.
  • Continuer à travailler sur la gradation des soins avec des travaux conduits par les Agences Régionales de santé chargées de repenser l’organisation géographique des soins de proximités et des soins de recours.
  • Dès cette année les tarifs hospitaliers intégreront une forte incitation à la médecine ambulatoire, fait encore savoir le gouvernement, avec la volonté d’étendre le virage ambulatoire, au-delà de la chirurgie, à la médecine.

Concernant le volet numérique, le gouvernement a notamment affiché sa volonté d’accélérer le pas, fixant trois objectifs :l’accessibilité en ligne, pour chaque patient, de l’ensemble de ses données médicales, la dématérialisation de l’intégralité des prescriptions, la simplification du partage de l’information entre professionnels de santé. Une mission E-santé sera notamment créé, annonce encore le communiqué.

Une réflexion sur les conditions de travail sera engagée, avec notamment la mise en place d’un observatoire national de la qualité de vie au travail des professionnels de santé. 

L’universitarisation des professions sanitaires et sociales pour 2018 

Parmi les annonces : s’agissant de la formation des professions paramédicales et des sages-femmes, la mission sur l’universitarisation des professions sanitaires et sociales aboutira cette année , a confirmé le gouvernement. Par ailleurs, un "service sanitaire" obligatoire sera instauré dès la rentrée 2018 , tandis qu’une réforme de la première année d’études en santé et du numerus clausus (quota d’étudiants admis en deuxième année) sont à l’étude et devraient déboucher sur des mesures législatives au début de l’année 2019.

Concernant le volet de la qualité de vie au travail, une réflexion sur les conditions de travail sera engagée, avec notamment la mise en place d’un observatoire national de la qualité de vie au travail des professionnels de santé, qui devra dresser un état des lieux, collecter des données et formuler, avant la fin de l’année, des propositions d’amélioration.

Si cette réforme du système de santé se veut ambitieuse, certains points restent pourtant assez flous (officiellement pour laisser le temps de la réflexion). Une phase de concertation se déroulera de mars à mai 2018 et s’achèvera par la présentation d’une feuille de route détaillée avant l’été, affirme le gouvernement. Sur l’hôpital, nous sommes arrivés au bout d’un système, déclarait  Agnès Buzyn à Libération en décembre 2017.

La refonte du système de santé est lancée, c’est une bonne chose, mais il devient urgent, dans un contexte véritablement explosif, de dépasser à présent rapidement le stade des annonces.

Quelles réactions ? 

La FNI s'inquiète de cette réforme. Plusieurs points de la réforme annoncée inquiètent la FNI qui voit se profiler un mauvais remake des politiques de santé précédentes.
Le syndicat infirmier craint une atteinte à l'exercice libéral. Il s'élève notammment contre la remise en cause du mode de rémunération à l'acte, qui serait plafonné à 50%. En outre, la FNI se dit opposée à l'introduction d'une rémunération à l'épisode de soins dont la gestion serait confiée aux établissements, qui, de surcroît, ouvrirait la porte à une captation d'une partie du marché des soins infirmiers par des prestataires de soins faisant appel à des infirmiers salariés.

Lire le détail des arguments de la FNI sur son site.

La Fédération hospitalière de France, quant à elle, reste vigilante. Si elle partage l’état des lieux sans concession et les chantiers retenus pour la Stratégie de transformation du système de santé présentée par le gouvernement le 13 février 2018, la FHF reste surtout vigilante sur la question de la politique tarifaire, gage d’un bon fonctionnement des établissements au service des patients, et attend des mesures concrètes dans des délais courts, a-t-elle fait savoir par voie de communiqué. A l’issue du discours du premier ministre, la FHF est extrêmement préoccupée par la question de l’évolution des tarifs dans le cadre de la campagne budgétaire 2018, a t-elle déclaré. La FHF n’accepte pas, cette année encore, la double peine infligée en 2017 : tarifs en baisse, et absence de reversement intégral, en fin d’année, des crédits mis en réserve

Qu'en pense la FEHAP ? A l'annonce, d'une baisse des tarifs qui entrera en vigueur à partir du 1er mars 2018, Antoine Perrin, Directeur Général de la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne (FEHAP) prévoit une catastrophe pour les établissements privés non lucratifs : avec tout ce qui nous tombe dessus, 75% des établissements seront dans le rouge cette année, prévient-il, rappelant que si les établissements publics peuvent, in fine, compter sur l’Etat, ce n’est pas le cas pour les établissements privés non lucratifs. Par ailleurs, la FEHAP affirme "souscrire pleinement aux cinq grands chantiers annoncés par le Premier Ministre".

Lire le détail du communiqué sur le site de la Fehap

Susie BOURQUINJournaliste susie.bourquin@infirmiers.com @SusieBourquin


Source : infirmiers.com