L'Ordre national des infirmiers (ONI) a déposé cinq plaintes, en mars 2011 puis juillet 2012, à l'encontre de 14 aides-soignantes et d'un agent des services hospitaliers (ASH) qu'il accuse d'avoir effectué illégalement des tâches relevant du rôle infirmier au bloc opératoire, a indiqué vendredi l'ONI à l'APM, précisant des informations parues dans le quotidien "Le Parisien".
L'ONI a porté plainte, à chaque fois, pour exercice illégal de la profession d'infirmier et mise en danger d'autrui. Ces actions en justice visent nommément des salariés de trois hôpitaux publics, d'une clinique et d'un pôle public-privé, a expliqué à l'APM le directeur des affaires juridiques de l'ONI, Yann de Kerguenec.
Dans les cinq cas, l'Ordre poursuit également l'établissement et les chirurgiens pour complicité d'exercice illégal et mise en danger d'autrui. A chaque fois, les aides-soignants ou ASH visés se seraient vu confier un rôle d'infirmier circulant. Il s'agit de l'une des trois fonctions de l'infirmier au bloc (avec celles d'instrumentiste et d'aide-opératoire).
L'infirmier circulant anticipe les besoins de l'opéré selon son degré de dépendance, et sert de relais, auprès de l'équipe chirurgicale, entre les zones stériles et non stériles, indique le site de l'Union nationale des associations d'infirmiers de bloc opératoire diplômés d’État (Unaibode). Il prévoit, organise, gère, utilise et contrôle tout le matériel nécessaire à l'intervention. Il assure la communication entre la salle d'intervention et les partenaires extérieurs.
Yann de Kerguenec a rappelé que le rôle d'infirmier circulant ne pouvait être confié qu'à un infirmier diplômé d’État (IDE) ou spécialisé en bloc opératoire (Ibode), et que ce monopole ne souffrait "aucune dérogation".
Trois plaintes déposées par l'Ordre en mars 2011 visent respectivement: une aide-soignante en Ariège, six autres dans le Tarn-et-Garonne, ainsi qu'une aide-soignante et un ASH dans le Haut-Rhin. Deux autres, déposées en juillet 2012, concernent quatre aides-soignantes dans la Meuse, et deux en Seine-Maritime. Dans le Haut-Rhin, une information judiciaire a été ouverte. Le juge d'instruction aurait procédé aux auditions et s'apprêterait à prononcer des mises en examen.
Toujours selon l'ONI, en Ariège, l'enquête a été transmise au parquet de Pau, et continue. Dans le Tarn-et-Garonne, l'enquête préliminaire a été réalisée, et le procureur n'y a pas encore donné suite. En Seine-Maritime, le parquet aurait demandé à l'Agence régionale de santé (ARS) de procéder à une enquête administrative. Dans la Meuse, l'ONI n'a pas encore reçu de nouvelles du ministère public.
Des badges pour vérification ?
Le problème de l'exercice infirmier illégal au bloc n'est "pas nouveau", a commenté le vendredi 26 octobre 2012 Claude Rambaud, présidente de l'association Le Lien, et vice-présidente du Collectif interassociatif sur la santé (Ciss), interrogée par l'APM lors d'une conférence de presse coorganisée par le Ciss. Elle a jugé que l'ONI jouait son rôle en portant plainte, et considéré que cette action témoignait d'un certain "courage".
Elle a regretté qu'il soit "impossible" de vérifier, a posteriori, l'identité et les qualifications des personnes intervenant au bloc. Elle s'est dite favorable à la mise en place, comme aux États-Unis, de systèmes de badges permettant de vérifier qui est entré dans la salle d'opération.
L'Unaibode a récemment appelé le gouvernement à procéder rapidement à des réformes concernant la profession d'Ibode, que l'association réclame depuis "des mois, voire des années". Elle a notamment déploré que "des personnels non qualifiés" soient employés dans les blocs, et a pointé des risques pour la sécurité des soins.
Dans une interview à l'APM, le 16 octobre 2012, l'Ordre infirmier a fait le point sur son activité juridictionnelle. Il a notamment indiqué qu'il se constituait systématiquement partie civile dans les affaires de faux diplômes, d'exercice illégal et de violences à l'encontre des infirmiers.
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