Pour Gilles Bontemps, directeur associé de l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (Anap), le développement de la chirurgie ambulatoire à 80% des actes chirurgicaux et 90% des patients impliquera la reconversion de plus de 48.000 lits de chirurgie.
Il est intervenu lors d'un colloque organisé à Paris sur le thème "Quel projet pour la chirurgie ambulatoire en France?" par l'Anap, en partenariat avec la Haute autorité de santé (HAS) et l'Association française de chirurgie ambulatoire (Afca).
Son estimation de 48.000 lits à reconvertir est fondée sur deux hypothèses.
Tout d'abord, 90% des patients seraient éligibles à la chirurgie ambulatoire quels que soient les actes. Ce taux a été calculé à partir des résultats d'une enquête de l'assurance maladie sur 34.000 patients sur la période 2000-04, en tenant compte de leur condition sociale et de leurs comorbidités, et à partir des recommandations de la Société française d'anesthésie et de réanimation (Sfar) de 1990.
Ces recommandations ont été plutôt "précautionneuses" et les nouvelles recommandations de la Sfar de 2009 conduiront probablement à un élargissement de l'éligibilité, a observé Gilles Bontemps. Selon la seconde hypothèse, 80% des 5,3 millions d'interventions chirurgicales seraient potentiellement réalisables en chirurgie ambulatoire.
Ces deux hypothèses conduisent à estimer le potentiel de substitution à près de 2 millions d'interventions : 502.837 dans les CH, 430.623 dans les CHR, 26.663 dans les centres de lutte contre le cancer (CLCC), 865.464 dans les cliniques et 107.835 dans les établissements de santé privés d'intérêt collectif (Espic), à parts de marché constantes.
En se projetant dans 10 ans et en tenant compte de la durée moyenne de séjour et des taux d'occupation constatés en 2009, seulement 34.805 des 82.854 lits de chirurgie actuels seraient "potentiellement utiles" pour prendre en charge les patients. Les 48.049 lits excédentaires se répartissent en 26.401 lits dans les établissements publics et les Espic (61% d'excédent) et 21.648 dans le privé (55% d'excédent).
La même projection au niveau des 12.455 places actuelles de chirurgie ambulatoire (8.622 dans le secteur privé et 3.833 dans le secteur public) montre que ce nombre devrait être augmenté à 17.398 si on estime nécessaire de réserver une place par patient par jour mais serait réduit à 8.699 en adoptant l'hypothèse de deux patients par jour et par place et à 6.959 pour 2,5 patients par jour et par place.
On aura très probablement aux alentours de 9.000 places de chirurgie ambulatoire utiles, a indiqué Gilles Bontemps, en observant que pour la chirurgie de la cataracte, les établissements ayant l'organisation la plus optimale prennent en charge cinq ou six patients par jour et par place. Actuellement, en termes de capacité de places, "on est proche" de la projection du nombre de places utiles mais "à terme, ces places de chirurgie ambulatoire seront probablement en excédent", a-t-il ajouté.
Coût annuel : de 4,37 à 5,33 millions d'euros supplémentaires
En tenant compte du coût annuel de fonctionnement du mètre carré (m2) et de la correspondance entre lits de chirurgie et m2 dans le public et dans le privé, les 48.000 lits de chirurgie en excédent constituent un coût supplémentaire évalué entre 4,37 milliards et 5,33 milliards d'euros.
Ce coût serait de 2,64 milliards à 3,16 milliards d'euros dans les établissements publics et Espic et de 1,73 milliard à 2,16 milliards dans le privé. Ainsi, la reconversion de ces lits générerait à terme des marges de manoeuvre considérables, soulignent dans un communiqué commun la HAS, l'Anap et l'Afca.
"Ces marges financières pourraient contribuer à l'efficience du système et par conséquent à la réduction de ses déficits" et "elles pourraient être redéployées pour mieux prendre en charge le développement des pathologies chroniques liées au vieillissement, comme le diabète, les cancers, les maladies cardiovasculaires ou psychiatriques ou financer le progrès lié aux nouvelles technologies ou aux nouveaux médicaments", suggèrent-ils.
Pour Gilles Bontemps, "l'évolution inéluctable des pratiques professionnelles nécessitera de s'interroger sur le dimensionnement hospitalier optimal et sur son impact financier". Le développement de la chirurgie ambulatoire pose la question de la conception de l'"hôpital de demain".
"Il ne devrait plus être pensé d'abord comme un lieu d'hébergement, mais serait fondé sur une double exigence: optimiser les flux autour de trois pôles (un plateau technique interventionnel, un plateau de consultations et un plateau d'urgences) (...) et optimiser un niveau d'environnement minimal permettant d'assurer la maîtrise du bénéfice/risque", a-t-il conclu.
Face à cette situation, il s'est interrogé sur le plan d'accompagnement à mettre en place pour réduire les "surcapacités historiques". La directrice générale de l'organisation des soins (DGOS), Annie Podeur, a également estimé mardi qu'il fallait repenser l'hôpital à 10 ans. "Le virage de l'ambulatoire projette une autre définition du mode d'organisation et de l'hôpital qui devient avant tout un plateau technique", a-t-elle souligné.
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