Le syndrome de la fatigue chronique reste une pathologie encore méconnue autant par le grand public que par la communauté scientifique. Cependant, cette maladie, décrite pour la première dans les années 1980, a bel et bien été reconnue par la classification internationale et par l’Assurance maladie en France. Malgré cela, elle demeure difficile à diagnostiquer sur le terrain. Une conférence tenue en avril dernier a permis de faire le point sur les dernières avancées de la recherche sur ce syndrome et sur ses causes potentielles.
Une fatigue permanente depuis plus de 6 mois, un sommeil non réparateur, des malaises suite à un effort, le syndrome de fatigue chronique également nommé encéphalomyélite myalgique reste une pathologie bien mystérieuse. Difficile à diagnostiquer, aucun marqueur biologique n’a pour l’instant été déterminé, ainsi seul un ensemble de symptômes permet de l’identifier. Néanmoins ces 35 dernières années, de nombreuses recherches ont été menées afin de caractériser des anormalités typiques de cette maladie, et il s’avère que celle-ci touche le système nerveux mais pas seulement.
Une souffrance mal définie devient une véritable maladie quand les anomalies sous-jacentes responsables des symptômes sont clairement identifiées
Une inflammation chronique au niveau neuronal
L’Institut National de Santé (NIH) américaine a tenu une conférence assez récemment sur les progrès effectués dans la compréhension de cette maladie qu’elle décrit comme sérieuse, chronique, et perturbant gravement la vie des patient
. Un compte rendu a été publié dans le JAMA sur le sujet.
Au niveau du système nerveux, on remarque dans certains cas, des troubles cognitifs associés comme des troubles de la mémoire ou de l’attention. Ainsi, des travaux ont suivi cette voie et les scientifiques ont observé une hypo-régulation de l’axe hypothalamo-hypophysaire chez des patients (axe responsable de la sécrétion de cortisol et de l’hormone de croissance notamment). Or, fait marquant : ce même axe est, au contraire, excessivement sollicité chez les personnes souffrant d’une dépression majeure.
En outre, des IRM de patients ont montré des réponses auditives et visuelles anormales, des anomalies de la mémoire de travail et même une connectivité altérée entre plusieurs régions différentes du cerveau. En réalité, les spécialistes ont noté un état constant d’inflammation neuronale. Le liquide céphalo-rachidien présente des taux élevés de certaines protéines impliquées dans la dégradation et la réparation tissulaire.
Les chercheurs observent une baisse du métabolisme comme lors de l’hibernation chez certains animaux
Un métabolisme au ralentit
Phénomène étrange, chez les sujets atteints, le métabolisme ralentit comme en cas d’hibernation chez d’autres espèces animales. Les scientifiques ont, par ailleurs, constaté des changements comportementaux comme une réduction notable de l’activité, de l’appétit et une hausse du temps de sommeil. Ceci laisse supposer que le but de l’organisme est de préserver l’énergie disponible pour les fonctions vitales.
En parallèle, après un effort, les personnes touchées ont des symptômes multiples dans les 12 à 48 heures qui suivent, ce que l’on nomme les malaises post-efforts. Il a été démontré par plusieurs travaux que cela serait dû au fait que, durant l’exercice, les patients ont du mal à extraire l’oxygène.
De plus, le système immunitaire n’est malheureusement pas épargné non plus. En effet, le nombre de certains lymphocytes augmente étrangement. Les taux de cytokines dans le sang comme dans le liquide céphalo-rachidien s’élèvent également notamment au début de la maladie.
Quelques pistes mais encore beaucoup d’incertitudes
Les comportements stéréotypés des patients pourraient avoir pour origine cet état inflammatoire chronique au niveau neuronal. Cela pourrait être dû à une infection (par exemple par l’herpès virus) ou à une maladie auto-immune où des anticorps attaqueraient les neurones. Mais l’inflammation pourrait aussi être située en dehors du système nerveux central et avoir des conséquences sur le cerveau via des signaux hormonaux. Le tube digestif notamment serait un site privilégié de l’inflammation car le microbiote des individus atteints contient souvent un grand nombre d’espèces propices à cet état inflammatoire.
Cependant, cette hypothèse neuro-inflammatoire n’est pas la seule envisagée. Le ralentissement métabolique, semblable au phénomène d’hibernation, pourrait aussi être la cause de l’ensemble des symptômes.
Ainsi, même si les recherches progressent au point que l’on est capable aujourd’hui de discerner les sujets souffrant de cette pathologie des personnes en bonne santé, il reste encore beaucoup à élucider. Aucun test diagnostic n’a le niveau de spécificité requis pour être employé de façon courante. Aucun traitement n’est approuvé à ce jour non plus. Mais les travaux se poursuivant, on peut espérer bientôt une meilleure compréhension du développement de ce syndrome et avec cela des pistes thérapeutiques.
Roxane Curtet Journaliste infirmiers.com roxane.curtet@infirmiers.com @roxane0706
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