L'Assemblée nationale a voté, dans la nuit de jeudi au vendredi 10 avril 2015, la suppression de l'ordre national des infirmiers dans le cadre du projet de loi de santé. Cependant, le processus législatif suit son cours. L'amendement doit encore être adopté par le Sénat pour que l'Ordre soit effectivement supprimé...
Un amendement adopté par 19 voix contre 10 par les députés dans la nuit de jeudi au vendredi 10 avril 2015 supprime l'Ordre des infirmiers. L'amendement sur cette suppression était porté par la députée apparentée socialiste Annie Le Houerou (Côtes d'Armor), qui souligne la mauvaise gestion de l'ordre
, son défaut de représentativité
et le fait qu'il créérait des tensions dans la profession
. Dans l'exposé des motifs, Annie Le Houérou explique que l'amendement "supprime l'ordre infirmier et corrélativement supprime l'inscription automatique des infirmiers au tableau de l'ordre. Seule l'obligation d'enregistrement auprès de l'autorité compétente est maintenue pour tous
. Et d'ajouter que certaines des missions dévolues à l'ordre n'apparaissent pas opportunes. Tel est le cas, à l'occasion de l'inscription au tableau, de la vérification par l'ordre des garanties 'de compétence, de moralité et d'indépendance' requises pour l'exercice de la profession après que les contrôles d'identité et de casiers judiciaires aient été effectués à l'inscription à la formation
. En l'absence de l'ordre, les infirmiers doivent être contraints de s'inscrire sur le fichier Adeli. Il incombera ensuite aux Agences Régionales de Santé (ARS) de poursuivre leur travail annuel de recensement des professions de santé.
De son côté, la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, Marisol Touraine, a indiqué que le sujet était ancien
et que la contestation de l'ordre venait presque exclusivement des infirmières salariées
. Elle avoue que l'ordre a connu des débuts difficiles
mais qu'une nouvelle équipe a réalisé un travail d'apaisement
. La ministre a également souligné que nous avons besoin de structures qui permettent de réguler, d'accompagner la profession
, particulièrement au moment où "nous mettons en place le virage ambulatoire". Bien qu'en mai 2014, la ministre avait estimé que l'avenir de l'ordre était "clairement menacé"
, elle ne souhaite pas sa suppression. Ce vote paraît en effet paradoxal alors que le Conseil d'Etat a récemment enjoint le Gouvernement de publier le décret édictant le code de déontologie des infirmiers
d'ici au 31 décembre 2015.
Dans un communiqué de presse, Didier Borniche, président de l'Ordre national des infirmiers, explique que si quelques députés ont manifesté leur incompréhension du rôle et des missions de l'Ordre, cela ne remet en question ni la place de l'Ordre dans la profession, ni notre fonctionnement quotidien. Le projet de loi de santé et l'ensemble des amendements qui ont été apportés seront discutés au Sénat et, si nécessaire, en Commission mixte paritaire d'ici la fin de l'année. Nous savons pouvoir compter sur le bon sens de nombreux parlementaires y siégeant, qui nous ont déjà témoigné leur soutien
.
Non, l'Assemblée nationale n'a pas supprimé l'Ordre infirmier
Des réactions mitigées
A l'annonce de la suppression de l'Ordre des infirmiers, les réactions ne se sont pas faites attendre sur les réseaux sociaux. Ainsi, Maeva estime que cela permettra, comme l'a dit une personne, de detruire la profession petit-à-petit...
Pour emi, il aurait été plus intelligent de chercher à l'améliorer et à informer les ide de son utilité
. De son côté, Joelle avoue : Je ne comprends pas pourquoi certains IDE sont contents???? L'ordre créait une union entre les infirmiers... Une fois encore, diviser pour mieux régner et surtout une décision prise en pleine nuit évidemment...
. Frédéric estime lui que notre profession restera donc une profession mineure asservie aux médecins, incapable de se défendre parmi les professions de la santé, inapte à être pleinement actrice de son avenir... Merci messieurs dames, les députés... Les infirmiers et infirmières vous remercient
. D'autres encore pointent du doigt le fait que seuls 29 députés aient voté cette suppression.
Plusieurs infirmiers ont également applaudi cette nouvelle. Seb indique c'est cool des bonnes nouvelles de si bon matin ! Mais ça va faire un bon bordel! Bonne journée les IDE!
Depuis sa création, je n'ai vu aucun changement dans l'amélioration de nos conditions de travail. A moins que cet ordre ait été mis en place pour nous faire travailler avec de moins en moins de moyens??
, souligne Carole. Quant à Emmanuelle, elle indique 13 années que j'ai mon DE, jamais cotisé à cet ordre... Et surtout jamais vu la différence, entre avant son existence et après sa création!! Au contraire ma profession se porte toujours un peu plus mal!
. D'autres encore déplorent le fait d'avoir cotisé et souhaitent donc être remboursés...
Les syndicats infirmiers eux aussi n'ont pas manqué de réagir. Ainsi, la Fédération Nationale des Infirmiers (FNI), dans un communiqué de presse, se félicite de ce vote qu’elle considère comme une victoire pour la démocratie
. De son côté, le Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil) s'insurge contre cette mesure qui fait revenir la profession infirmière dix ans en arrière
.
Bref, l'avenir de l'Ordre n'est pas encore totalement scellé. Karim Mameri, secrétaire général de l'Ordre National des Infirmiers, indique que l'amendement ne veut pas dire que la loi sera promulguée ainsi
. En effet, le projet de loi de santé et l'ensemble des amendements feront l'objet d'un vote solennel, le mardi 14 avril 2015, puis devront être adoptés par le Sénat. En cas de désaccord, le Gouvernement peut convoquer une commission mixte paritaire composée de sept députés et sept sénateurs qui doivent proposer un texte commun voté ensuite par l'Assemblée nationale et le Sénat. Cependant, en cas d'échec, une nouvelle lecture du texte a lieu au sein des deux assemblées (Sénat et Assemblée nationale) et le Gouvernement peut donner le dernier mot à l'Assemblée nationale. Karim Mameri souligne également que l'Ordre a su démontrer son utilité, notamment par la suppression de l'article 30bis
cette nuit, qui avait été demandée par l'Ordre des infirmiers.
Aurélie TRENTESSE Journaliste aurelie.trentesse@infirmiers.com @ATrentesse
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