L'IGAS a mis en ligne le 9 décembre 2010 un rapport sur la HAD. Elle constate son essor, mais aussi ses difficultés de positionnement et les limites des politiques destinées à la soutenir.
Selon l'Igas (Inspection générale des affaires sociales), le nombre d'établissements autorisés en HAD (hospitalisation à domicile), qui dépassait à peine la soixantaine à la fin des années 90, a atteint 298 en 2009. Si tous les départements disposent au moins d'un établissement autorisé, l'Igas constate toutefois que l'offre est "très inégalement répartie", avec de "très grandes disparités entre régions et à l'intérieur de chacune d'elle", les zones rurales accusant un net déficit. En outre, une "bonne part" des HAD autorisées ne fonctionnent toujours pas, notamment parce que certaines ne paraissent pas viables au regard de leur petite taille.
Ainsi, dans le Languedoc-Roussillon, un tiers des HAD n'a toujours pas commencé à fonctionner et au total, trois départements ne disposaient d'aucune HAD en activité en 2009 (Lozère, Haute-Marne et Gers).
Les auteurs du rapport constatent également que le développement de l'HAD est conditionné par les relations étroites entretenues avec les structures d'hospitalisation et en particulier par les relations "personnelles" entretenues entre les médecins et les cadres infirmiers des deux types de structures, d'autant plus que les critères d'admission en HAD sont "vagues et généralement mal connus" : "L'HAD est en effet rarement un enjeu important pour les médecins et les cadres hospitaliers" et plus généralement, il n'y a pas réellement "une anticipation de sortie".
De leur côté, les médecins libéraux sont "plus enclins" à prescrire une HAD que par le passé. Ils la considèrent comme un appui "en termes d'expertise, de permanence et de continuité des soins", notamment en matière de soins palliatifs, même si leur prescription reste "limitée".
Avec les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad), les relais "se révèlent difficiles à mettre en œuvre", "à cause principalement des incohérences du système de tarification", avec "des patients trop lourds pour les Ssiad et trop légers pour les HAD".
Avec les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), les échanges "restent modestes" et les freins sont d'ordre culturel mais aussi liés "à l'insuffisante médicalisation de ces établissements" et leur impossibilité d'assurer leur part dans les soins médicaux et paramédicaux, estime l'Igas.
Périnatalité, pédiatrie, cancérologie, soins palliatifs, soins de suite et de réadaptation
L'HAD intervient dans des domaines variés. La périnatalité correspond à un quart des séjours, "dont une part importante de prises en charge obstétricales qui ne nécessitent pas toujours une HAD", notamment les retours précoces à domicile, estiment les auteurs. À l'occasion de la 14ème journée nationale de l'HAD organisée le 9 décembre (jour de la publication du rapport de l'IGAS) par la Fédération nationale des établissements d'hospitalisation à domicile (Fnehad), la présidente de celle-ci, Elisabeth Hubert, s'est déclarée favorable à ce que l'HAD abandonne le suivi du post partum physiologique, à condition que les moyens soient réaffectés à d'autres activités HAD.
La pédiatrie concerne 10% des séjours et correspond à des prises en charge de pathologies graves et/ou chroniques de l'enfant de plus d'un an. La cancérologie (17,3% des séjours) est principalement constituée de chimiothérapies. Les soins palliatifs (18% des séjours) ont connu "un fort développement" depuis 2005 et concernent principalement les patients atteints d'un cancer. Par ailleurs, 7% des séjours relèvent des soins de suite et de réadaptation (SSR).
Des tarifs déconnectés de la réalité des prises en charge
Les politiques de soutien à l'HAD, mises en oeuvre au début des années 2000, ont été "insuffisamment ciblées" et commencent à faire apparaître "leurs limites", constatent les auteurs du rapport. Le passage à la T2A a permis "un fort développement" de l'HAD et assuré "le bon équilibre économique des structures", malgré "une faible évolution des tarifs depuis cinq ans".
Mais les cinq contrôles réalisés par l'assurance maladie à titre expérimental en 2009 ont fait apparaître "un grand nombre de difficultés": seuls "36% des séjours ne comportaient aucune anomalie", tandis que dans 26% des cas, l'admission en HAD n'était pas justifiée. Ces difficultés traduisent "les ambigüités d'un modèle qui laisse une très grande marge d'interprétation pour la mise en oeuvre de la grille tarifaire", estime l'Igas. Au vu des données qui lui ont été fournies dans le cadre de l'étude nationale des coûts lancée en 2009, l'Igas constate que "les tarifs sont largement déconnectés de la qualité, de la lourdeur et des coûts de prise en charge".
Elizabeth Hubert a dénoncé la façon dont les contrôles sont menés par la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), appelant à plus "d'intelligence" et à l'usage d'une méthodologie qui "permette de porter des appréciations qui ne soient pas contradictoires selon les régions".
Dans son rapport, l'Igas constate également que les schémas régionaux d'organisation sanitaire de troisième génération (Sros 3) ont accordé "une place variable" à l'HAD et sauf exception, "sans réelle évaluation préalable des besoins".
Elle formule 16 recommandations, estimant notamment que l'HAD a un rôle "important" à jouer dans les filières gériatriques, "en apportant à domicile, des méthodes hospitalières adaptées aux cas les plus complexes". Elle préconise également la production de référentiels et de protocoles de soins et appelle à une réforme de la T2A, en adaptant le modèle à chaque type de soins (ponctuels, continus et SSR). S'agissant des soins continus, le développement des soins palliatifs "doit être poursuivi", estime l'Igas, précisant toutefois que l'HAD n'est qu'une "modalité de prise en charge parmi d'autres". Par ailleurs, "l'activité obstétricale doit se limiter à la surveillance de grossesses à risque, la prise en charge de pathologies maternelles et le post partum pathologique".
Rapport sur l'hospitalisation à domicile, Nicolas Durand, Christophe Lannelongue, Patrice Legrand, 268 pages
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