L’écoute du psychothérapeute… quelle image vous vient à l’esprit en entendant ces deux mots ? L’archétype du psy écoutant : une personne silencieuse, au regard pénétrant derrière de petites lunettes rondes ponctuant la conversation de temps à autre par "vous en pensez quoi" ? Ou bien une vision plus contemporaine du thérapeute au doux sourire, la tête légèrement penchée sur la gauche dont l’attitude de bienveillance accueillante vous invite à parler… sans même qu’il soit besoin de dire : "je vous écoute…" ou bien encore celle du professionnel vers lequel on se tourne en quête de solutions ou de conseils. Roland Narfin, psychologue clinicien, nous livre sa réflexion sur l’art de l’écoute. Merci à lui pour ce partage.
La capacité d’écoute est sans doute l’une des plus évidentes et fondamentales qualités nécessaires à l’exercice de la psychothérapie. Le b.a.ba du métier. Mais l’écoute du psy, de quoi parle-t-on au juste ? Est-ce savoir se taire et regarder quelqu’un avec un air de profonde et bienveillante attention pendant qu’il parle ?
L'écoute de l’autre passe par une écoute respectueuse, non directive, attentive, dont le propos essentiel est de permettre à la personne de s'exprimer aussi librement qu'elle le veut, sans qu'elle se sente jugée, ni dirigée, ni censurée ou analysée, sans qu'elle soit obligée d'entendre des commentaires, des avis, des conseils, ni des expériences personnelles.
Si entendre est une faculté, l’écoute, outil indispensable du thérapeute, est un art.
Cette rencontre d’écoute, entre le patient et le professionnel, source d’être et non pas d’avoir, s’inscrit dans l’ici et maintenant - hic et nunc
- dans la relation pour laisser le patient dérouler son histoire afin qu’il trouve ses propres solutions. Ce courant s’ancre dans la psychothérapie humaniste non directive et fait appel à l’écoute active.
Centré sur l’autre, l’écoutant
n’a pas pour objet de fournir une solution, mais plutôt d’essayer de permettre à l’écouté
de réfléchir afin qu’il trouve par lui-même la solution dont il a besoin. En d’autres termes, l’écoutant
doit écouter avec empathie, questionner pour clarifier les propos, reformuler, c’est-à-dire redire avec ses propres mots ce que l’écouté
lui confie. Il ne s’agit pas de répéter la conversation de manière mécanique. L’écoutant
essaie de comprendre, cherche le ressenti derrière le vécu pour permettre à l’écouté
d’avoir un autre prisme de sa problématique, de mettre des mots sur cette émotion et éventuellement d’orienter vers des relais de spécialistes en cas de nécessité. Ce d’autant que la plupart des personnes écoutées sont à la fois avides et inquiètes de ce que produira cette rencontre avec le professionnel. Elles sont prises dans un double mouvement : d’un côté la nécessité de dire ce qui permettra au thérapeute de comprendre leur situation et de l’autre, la peur de se mettre à nu, de se dévoiler dans sa vulnérabilité, de montrer ses faiblesses à un inconnu.
Parallèlement, il est important pour l’écouté
de se sentir au cœur de l’interaction. Il doit éprouver l’attention que lui porte l’écoutant
au même titre que son ouverture. Il n’y a pas d’écoute sans l’écouté
. Ce dernier attend de l’écoutant
son entière attention. Le moindre message contradictoire inconscient de sa part, par des gestes (visuel, regard…), marque les prémices d’une inattention et de la rupture de lien, synonyme pour l’écouté
de fermeture, de non reconnaissance de son mal être et d’agacement…
De son côté, l’écoutant
doit rester vigilant. Il doit pouvoir établir une communication sans être happé par l’univers imaginaire (ludique, fantasmagorique) de l’écouté
. Cette nécessaire opération passe par une alchimie complexe de décodage, de repérage de la demande et d’instauration d’un lien écoutant
/ écouté
. Cela crée des conditions de grande vigilance et de grande réceptivité à tous les échanges car l’écouté
parle avec de multiples langages, qui passent par chacune des parties de son corps, sans pour autant prononcer des mots.
Si entendre est une faculté, l’écoute, outil indispensable du thérapeute, est un art. Elle est loin d’être une action passive de récolte d’informations. Elle demande de prendre en compte tout un ensemble : la réalité de l’autre au moment où il lui parle par ses mots, son ton, ses attitudes, mais aussi la connexion à soi-même, pour éviter de se laisser emporter par les résonnances que peut susciter l’entretien. Plutôt que se focaliser, se contenter du problème présenté, il est important pour l’écoutant
de chercher à savoir comment l’écouté
vit, traverse cette épreuve qui l’amène vers le thérapeute.
Il s’agit donc avant tout d’être présent à l’autre, tel qu’il se définit lui-même, en lui donnant de son propre temps. En accueillant avec respect sa parole, l’écoutant
témoigne à l’écouté
de façon claire qu’il le reconnait, l’entend, tout en l’amenant à faire émerger SES propres solutions face à la situation qui lui pose problème.
Roland Narfin, psychologue clinicien et ancien assistant social à l'AP-HP.
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