La pose de voie veineuse périphérique est l’un des gestes symboliques de la profession infirmière. Elle fait partie des techniques parfois génératrices d’angoisse chez les soignants et les étudiants qui doivent apprendre à la maîtriser. Comme tous les gestes, elle nécessite des connaissances et une certaine pratique.
Législation
La pose de voie veineuse périphérique (VVP) et son ablation se réalisent sur prescription médicale, même si c’est la surveillance infirmière qui en a posé les indications (signes infectieux, inefficacité, diffusion…). Sa surveillance relève du rôle propre infirmier et repose ainsi sur les seules initiatives du soignant.
« Article R. 4311-5 : dans le cadre de son rôle propre, l'infirmier ou l'infirmière accomplit les actes ou dispense les soins suivants visant à identifier les risques et à assurer le confort et la sécurité de la personne et de son environnement et comprenant son information et celle de son entourage […] 35. Surveillance des cathéters, sondes et drains.»
« Article R. 4311-7 : L'infirmier ou l'infirmière est habilité à pratiquer les actes suivants soit en application d'une prescription médicale qui, sauf urgence, est écrite, qualitative et quantitative, datée et signée, soit en application d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par un médecin : […]3. Mise en place et ablation d'un cathéter court ou d'une aiguille pour perfusion dans une veine superficielle des membres hou dans une veine épicrânienne.»
La pose d’une voie veineuse jugulaire n’est pas autorisée au personnel infirmier, même si ce n’est pas une voie veineuse centrale.
A l’exception du crâne (veine épicrânienne), aucune veine superficielle ne peut être abordée si elle ne se trouve pas sur un membre.
Le texte peut être interprété pour les infirmiers anesthésistes. Si le geste fait partie de la prise en charge anesthésique et qu’un médecin peut intervenir à tout moment, les infirmiers anesthésistes, avec une formation spécifique, peuvent être autorisés à aborder des veines profondes, voir jugulaires. La voie veineuse périphérique peut également être mise en place sous couvert d’un protocole en situation d’urgence ou à l’initiative de l’infirmier dans les mêmes conditions. Le geste fera dans ce cas l’objet d’un compte rendu écrit dès que possible.
Le matériel
La pose d'une VVP nécessite l’utilisation d’un matériel spécifique. Bien que le soin soit très souvent focalisé sur l’aiguille, il faut également connaître les autres éléments qui permettent d’administrer des traitements en toute efficacité.
Le soluté
Le soluté de perfusion peut être de nature variable et son but n’est pas toujours directement thérapeutique. Dans le cas des perfusions de courte durée, le soluté ne permet que d’assurer la perméabilité de la perfusion. Sans un débit minimal, le sang coagule sur l’extrémité et obstrue le cathéter. Pour éviter cela, un débit dit « d’entretien » est souvent prescrit. Si le patient ne doit bénéficier d’un abord veineux que pour réaliser des examens sanguins ou des traitements ponctuels, on peut choisir de mettre en place un obturateur spécifique sur le cathéter. Cette attitude est particulièrement pratique chez les patients en restriction hydrique (insuffisants cardiaques, très jeunes enfants) ou qui souhaitent conserver un maximum de mobilité. Le choix du soluté est dicté par le contexte médical et la situation individuelle du patient. Les solutés de perfusion ont généralement deux buts majeurs :
- Réaliser un apport hydrique quotidien chez les sujets qui ne peuvent plus s’alimenter et/ou s’hydrater,
- Maintenir un équilibre électrolytique et l’homéostasie.
Dans le cadre d’une perfusion simple, nous nous contenterons ici de citer les principaux solutés cristalloïdes utilisés.
Ils sont disponibles en poches semi-rigides, souples, parfois en flacons de verre selon les choix des équipes.
La contenance varie généralement de 50 à 1000 ml.
- Soluté physiologique 0,9%,
- Soluté glucosé 5%,
- Ringer,
- Ringer Lactate.
- Glucidion G5%
Selon les situations, il peut être prescrit l’ajout d’électrolytes. Par exemple, le Glucidion G5 a été proposé en standard, dans la mesure où l’ajout de 4g de chlorure de sodium et de 2g de chlorure de potassium était souvent demandé dans des flacons de soluté glucosé 5%. Le Glucidion G5 n’est rien d’autre qu’un soluté glucosé avec 4g de NaCl et 2g de KCl.
Le liquide se trouvant dans la poche de perfusion coule par gravité. Par conséquent il faut toujours que cette poche se trouve au-dessus du niveau du point de ponction. Plus cette différence est élevée, plus le débit sera efficace. Lorsque le liquide s’écoule il va créer un vide qui doit être comblé. Il faut donc soit permettre à de l’air d’entrer (pour combler ce vide), soit disposer d’un contenant déformable qui va se rétracter au fur et à mesure de la vidange.
Les poches souples n’ont besoin d’aucune prise d’air pour que le liquide puisse s’écouler. Les fabricants ne recommandent pas non plus de prise d’air sur les poches semi-rigides. Toutefois, afin d’obtenir un débit linéaire dans le temps, on constate qu’il est souhaitable d’utiliser une prise d’air filtrée ou d’ouvrir celle qui se trouve sur la tubulure de perfusion (voir chapitre suivant) lors de l’utilisation de ce type de perfusion. Les flacons rigides en verre doivent absolument être équipés d’une prise d’air (on les appelle aussi "casse vide") ou d’une tubulure équipée d’un tel dispositif. Ces prises d’air sont pourvues d’un filtre hydrophobe antibactérien (finesse 1,2µ), afin d’éviter toute contamination aérienne du soluté.
La tubulure
Entre le flacon de soluté et le cathéter se trouve une tubulure de perfusion aux propriétés variables. Elle se compose de plusieurs éléments. A la partie la plus proximale du soluté, se trouve une chambre compte-goutte qui comporte un filtre. Elle est utile pour vérifier visuellement le nombre de gouttes qui tombent par minute et ainsi évaluer le débit d’administration. Le filtre assure l’administration d’un liquide vierge de tout dépôt ou agréation (par exemple un morceau de plastique qui aurait été poussé par l’utilisation d’un trocart en percutant la perfusion). Selon la nature de la substance perfusée, il sera de taille différente. Pour des solutés standards il sera de 15µm. En revanche s’il s’agit de transfuser du sang, il faudra utiliser une tubulure spécifique avec un filtre à 200µm. Utiliser un filtre classique rendrait en effet toute transfusion sanguine inefficace en retenant les hématies dans la chambre. En amont de cette chambre se trouve parfois une prise d’air dont la fonction est identique à celle décrite quelques lignes plus haut. Elle est également munie d’un filtre hydrophobe et antibactérien. Le soignant a le choix de la laisser ouverte ou non à l’aide d’un clapet.
En aval de la chambre, se trouve un système permettant d’écraser la tubulure à l’aide d’une molette se déplaçant sur un rail. En fonction de sa position, cette molette va plus ou moins écraser la tubulure souple et donc réguler le débit. Une tubulure est généralement munie d’un robinet à trois voies qui permet de brancher soit un autre flacon (branchement dit en « Y »), soit d’administrer des traitements en injection intra-veineuse directe à l’aide d’une seringue. Sa longueur est variable en fonction des modèles et des fabricants. Selon la situation, elle peut être équipée de raccords, de valves unidirectionnelles ou encore de rampes de robinets. Les raccords sont conçus selon un principe mâle/femelle « luer lock ». Ainsi le sens d’écoulement des liquides s’effectue toujours depuis la perfusion vers le patient dans le sens mâle/femelle pour tous les raccords qui se joignent avec une rotation d'un quart de tour.
La majeure partie des perfusions sont conçues pour fonctionner par gravité. Il existe cependant des modèles destinés à être placés sur des systèmes de pompes volumétriques. Chaque pompe possède ses spécificités et doit être équipée du matériel compatible. Des systèmes simples de régulation de débit sont plus couramment utilisés dans les services conventionnels. Gradués, ils proposent de régler un débit en mL/H. Il faut toutefois rester très méfiant vis-à-vis de ces systèmes. S’ils évitent que la perfusion coule de façon intempestive vers le patient, leur précision est toute relative. Ils sont conçus pour des perfusions qui doivent se trouver à 1m au-dessus de la ligne axillaire du patient (ce qui est rarement le cas en pratique) et ne dispensent pas de vérifier les débits au compte-goutte de façon régulière. Enfin, ils sont conçus pour des liquides dont la viscosité est proche de l’eau distillée. Ils sont donc à proscrire pour toute utilisation avec des solutions d’alimentation parentérale ou des transfusions sanguines.
Les tubulures de perfusion peuvent également être équipées de valves anti reflux. Ces dernières sont indispensables lors de l’utilisation de systèmes de pousse seringue électrique par exemple afin d’éviter un reflux des médicaments vers le flacon de perfusion.
D’une manière générale, il faut privilégier les systèmes les plus simples possibles et s’adapter en fonction du but de la perfusion. Le patient devra-t-il bénéficier d’un grand nombre de thérapeutiques ? Dans ce cas prévoir une tubulure munie de nombreux robinets et de taille suffisante. La perfusion sera-t-elle de courte durée ? Un système simple avec un seul robinet peut suffire.
Le cathéter
Si la prescription de perfusion est médicale, le choix du cathéter et du site d’implantation est laissé à la discrétion de l’infirmier. Ce choix n’est pas le fruit du hasard, il se fera en toute connaissance de cause et en fonction du contexte.
L’ensemble de perfusion est composé d’un trocart qui se trouve au centre d’un cathéter. C’est cette partie souple qui, après ponction de la veine restera en place dans le vaisseau. A l’arrière de cet ensemble se trouve une chambre transparente, témoin d’un reflux sanguin attestant de la position intraveineuse de l’extrémité du trocart. Cette chambre est parfois munie d’un bouchon qu’il est facile de retirer pour réaliser une injection ou un prélèvement direct.
Entre ces ceux parties se trouvent généralement des ailettes, supports de fixation pour pansements transparents ou encore pouvant être fixés à la peau à l’aide de fils de suture. Cette dernière option est très rarement utilisée par le personnel infirmier, même si certaines fixations mériteraient parfois d’être sécurisées de cette manière. Un certain nombre de trocarts n’ont pas d’ailettes et ils sont parfois équipés de sites d’injection. Les cathéters veineux périphériques possèdent deux caractéristiques principales. Leur calibre et leur longueur. Pour des raisons historiques, le calibre s’exprime en Gauge (GA). Plus la Gauge est élevée, plus le calibre du cathéter sera faible. Par exemple un calibre de 14GA sera plus gros qu’un calibre de 24GA. L’autre paramètre important est la longueur du cathéter. Normalement, plus ce cathéter sera long, moins le débit sera élevé (loi de Poiseuille). Cependant, choisir un cathéter long permet de limiter le risque infectieux en augmentant le trajet sous cutané avant d’atteindre la veine visée.
Voici quelques exemples de cathéters courts. Les couleurs sont normalisées. Ainsi un cathéter de couleur verte sera toujours de calibre 18GA. En revanche cela ne concerne pas les longueurs des cathéters.
Couleur | Calibre GA et mm | Débit ml/min |
---|---|---|
24GA 0,7mm | 24 | |
22GA 0,9mm | 36 | |
20GA 1,1mm | 62 | |
18GA 1,3mm | 105 | |
16GA 1,7mm | 215 | |
14GA 2,1mm | 330 | |
12GA 2,8mm | 449 |
Les débits maximums théoriques des cathéters ne prouvent pas seulement que la taille augmente les possibilités de remplissage. Il s’agit également d’une indication importante lorsque des dispositifs spécifiques sont utilisés. Dans certaines situations d’urgence, des systèmes de transfusion rapide sont mis en œuvre. Connaître ces débits (ils sont indiqués sur les emballages) permet d’éviter de dépasser leurs limites physiques et ainsi d’éviter de provoquer le détachement du cathéter et sa migration dans le système veineux du patient, ce qui pourrait avoir des conséquences désastreuses sur ses chances de survie.
Le choix de la taille et de la longueur du cathéter dépend des paramètres suivants que le soignant aura pris soin de considérer.
- Le débit souhaité. Si la taille standard admise est généralement de 18G, le choix s’effectue principalement en fonction des débits souhaités pour les thérapeutiques et du but de la mise en place d’une voie d’administration parentérale. Il est, par exemple, parfaitement inutile de tenter de poser une G12 chez un patient dont le risque hémorragique est faible pour une intervention de courte durée (ambulatoire par exemple). Au contraire, lorsque les risques hémorragiques sont importants ou que l’état du patient est instable, il est préférable de tenter de poser le plus gros calibre possible.
- Le capital veineux du patient. Même s’il est préférable d’utiliser un calibre conséquent, il vaut mieux poser une taille plus faible en augmentant les chances de succès que risquer un échec si le patient ne dispose d’aucune autre voie d’administration. Les patients âgés ou bénéficiaires de traitements spécifiques (chimiothérapies) ont parfois des veines plus fragiles de d’autres. Il convient de rester modeste, même si leur dilatation peut parfois faire penser que la pose de gros calibres est possible.
- La localisation des zones de ponction. En fonction des situations et du capital veineux, il n’est pas toujours possible de ponctionner des vaisseaux en position idéale. Parfois, il faut piquer à distance de la veine visée afin de ne pas avoir à cathétériser le vaisseau sur une trop longue distance. Il risquerait alors de buter sur une bifurcation ou d’être plié en fonction de la position du membre. Idéalement, il faut choisir une veine rectiligne qui ne se trouve pas au niveau d’une articulation. Il faut donc choisir la longueur du cathéter en fonction de ces contraintes.
La durée de conservation de la VVP. Une VVP engendre des risques infectieux. Il faut donc la conserver le moins longtemps possible et en proposer l’ablation dès qu’elle n’est plus nécessaire. Il est conseillé de piquer à distance du vaisseau concerné. La partie sous cutanée parcourue bénéficie ainsi d’un effet de tunélisation qui réduit l’incidence des infections sur cathéters. Ceci n’est possible qu’avec des cathéters de 45mm au moins.
- L’âge du patient. Il est évident qu’il sera impossible de poser des cathéters de grande taille chez de jeunes enfants ou des nouveaux nés.
Rappels anatomiques
On se contente généralement de choisir une veine sur un bras et de préciser la zone de ponction (main, avant-bras, bras...). Malgré tout, il peut être utile de rappeler ce qu'est une veine et de savoir où chercher les vaisseaux qui sont généralement de diamètre suffisant pour réaliser une ponction.
Anatomie d'une veine
La paroi d'une veine est constituée de trois tuniques qui entourent l'espace central contenant le sang. Cet espace central est appelé lumière de la veine. La tunique interne est formée d'endothélium. Les cellules de l'endothélium s'imbriquent de manière à offrir le moins de résistance possible au passage du sang. La tunique moyenne comprend des cellules musculaires lisses qui vont permettre de provoquer une vasoconstriction ou une vasodilatation du vaisseau. Cette couche possède donc un rôle essentiel dans la régulation de la circulation sanguine. Le caractère musculeux de ces cellules explique que les veines soient de taille plus importante sur le bras dominant. Ce bras est plus sollicité, ses muscles (striés) sont plus développés et en conséquence, son réseau veineux nécessite une meilleure adaptabilité. La tunique moyenne, avec ses cellules musculaires lisses y pourvoie. La tunique externe quant à elle, est principalement constituée de cellules collagènes qui protègent les vaisseaux et les ancrent aux tissus environnants. Ces trois tuniques également appelées intima, média et externa expliquent en partie pourquoi il arrive parfois qu'il soit difficile de « monter » un cathéter alors que la ponction présentait un reflux positif. Lorsque l'extrémité du trocart se trouve en légère malposition, il est possible que la tentative de cathétérisation provoque une dissection du vaisseau. En langage courant, on dit alors que la « veine claque ». Ce phénomène est plus fréquent avec l'augmentation de l'âge du sujet dont les vaisseaux perdent en élasticité.
Dans les membres, les veines contiennent des valvules qui empêchent le retour du sang en raison de la gravité. Elles fonctionnent un peu comme des écluses unidirectionnelles qui vont faciliter le retour sanguin vers le cœur, en limitant la stagnation dans les extrémités des membres.
La tête
Si l'infirmier ne peut poser de perfusion ailleurs que sur un membre et sur une veine superficielle, la tête fait exception grâce aux veines épicrâniennes. Ces dernières sont cependant utilisées presque exclusivement en pédiatrie bien qu'en pratique rien n'empêche de les aborder chez l'adulte. Elles nécessitent un rasage préalable systématique et ont la particularité d'accueillir des aiguilles épicrâniennes non pourvues de cathéters. Ces dernières sont maintenues en place par un système d'ailettes. Elles sont généralement facilement repérables à vue. Une palpation préalable permet de s'assurer qu'on ne ponctionne pas une artériole.
Les membres supérieurs
Les veines des membres supérieurs sont les plus utilisées. Faciles d'accès, elles sont également rectilignes sur certaines portions, ce qui assure une bonne perméabilité et une bonne efficacité du débit réglé. Il est en effet possible d'avoir une voie veineuse dite « positionnelle » lorsque le débit est diminué, voir totalement interrompu lorsque l'extrémité du cathéter se retrouve coudée ou coincée sur un carrefour veineux. La recherche du site de pose s'effectue toujours de la partie la plus distale du membre, vers sa racine. Ainsi, en cas d'échec il est toujours possible de tenter une ponction en aval du lit vasculaire (en remontant le bras). Tenter une ponction en amont d'un précédent essai expose à un risque d'extravasation et d’œdème sur la zone du précédent essai. La main dispose d'un réseau veineux superficiel assez facilement identifiable. Le réseau veineux superficiel prend ses principales racines au niveau des espaces inter digitaux. On distingue ainsi facilement deux trajets principaux qui prennent naissance respectivement entre le majeur et l'index et entre l'index et l'annulaire. Ces veines ont l'avantage d'être très superficielles. Cependant, en fonction de la longueur du matériel, l'extrémité du cathéter peut émerger au niveau du poignet. La perfusion peut ainsi rapidement devenir positionnelle si l'articulation est mobilisée.
Si le réseau veineux est superficiel, le réseau nerveux l'est tout autant. Il faut donc être attentif aux éventuelles plaintes du patient à ce sujet. Une douleur neurogène typique est fulgurante et irradiante. Elle est souvent décrite comme une décharge électrique. Son apparition impose l'arrêt immédiat du geste ainsi que le retrait du trocart. A partir du poignet, on retrouve une des veines les plus connues du réseau du membre supérieur : la veine céphalique est très facilement repérable et très souvent palpée dans l'axe du pouce et le prolongement du radius. C'est la fameuse veine de l'anesthésiste. Sa rectitude et le débit conséquent qu'elle offre sont en effet des avantages non négligeables dans la prise en charge anesthésique du patient. De plus, elle est généralement bien tolérée et ne limite pas la mobilité du bras. En revanche, de rares cas de lésions nerveuses ont été rapportés par la littérature. Les branches superficielles du nerf radial croisent son trajet en plusieurs endroits. Une douleur neurogène impose donc également l'arrêt immédiat du geste. Pour éviter cet écueil il est proposé de choisir un point de ponction à au moins 12 centimètres du poignet (le styloïde du radius) sur le trajet de la veine radiale.
La veine céphalique est retrouvée en face postérieure jusqu'à la moitié de l'avant-bras. Elle passe ensuite sur la face antérieure externe pour rejoindre son rameau externe au niveau du pli du coude. En quasi miroir par rapport à la veine céphalique se trouve la veine basilique. Moins facile à repérer que son homologue, elle prolonge son trajet le long de l'ulna (cubitus) également jusqu'à la moitié de l'avant-bras. Elle va rejoindre le « V » du pli du coude sur la face interne de la partie antérieure du bras. Plus centrées et ne changeant pas de face, on trouve les veines médianes antérieures et postérieures. La plus évidente se trouve sur la face antérieure. Elle est généralement saillante au niveau du poignet. Le trajet des veines médianes est variable d'un individu à l'autre, ce qui rend le repérage plus complexe. Elles sont néanmoins très pratiques puisque généralement rectilignes et sans gêne articulatoire.
Au niveau du pli du coude (face antérieure) se trouve un « V » vasculaire formé par la veine médiane qui se divise en deux pour former la pointe du « V ». Sur chaque rameau viendront se greffer les veines céphaliques et basiliques qui prolongeront leur trajet de part et d'autre du biceps. La taille des accès veineux sur le « V » vasculaire permet un accès rapide et facile au système vasculaire. C'est généralement le site de choix lorsqu'une perfusion doit être mise en place en urgence (pour un arrêt cardiaque par exemple). Il ne faut pas négliger d'examiner les veines céphaliques et basiliques du bras, car elles permettent d'atteindre des débits importants. Elles sont cependant à utiliser en dernier recours dans la mesure où elles sont les plus proches de la racine du membre.
D'une façon générale, les veines sont plus facilement repérées sur la face antérieure de l'avant-bras. L'anatomie du réseau veineux superficiel n'est pas figée et les variations entre les manuels et la réalité sont nombreuses. Les principaux trajets sont cependant toujours localisés de la même façon et une pratique régulière permet d'affiner les capacités à choisir le bon site d'insertion.
Les membres inférieurs
Bien qu'il soit plus rare de perfuser les membres inférieurs, leur réseau veineux superficiel peut également être choisir par l'infirmier. Le bénéfice d'un accès vasculaire doit être mis en balance avec le risque thrombo embolique généré par la présence de matériel dans ce réseau. En conséquence, son utilisation est généralement réduite au maximum et la perfusion sera retirée au plus tôt. Chez l'enfant cependant, les veines du pied sont assez largement utilisées. En particulier la saphène interne. Cette dernière passe en avant de la malléole interne. Son repérage est aisé et son calibre permet l’insertion de cathéters de bonne taille. On retrouve également une branche externe qui elle, chemine en arrière de la malléole externe. Chez l'adulte, le réseau veineux de l'arcade veineuse dorsale est souvent assez facilement repérable. La soumission du sang à la gravité facilite sa stagnation les extrémités. Il peut parfois être tentant d'aborder certains vaisseaux saillants au niveau des mollets. Mais attention à tenir compte des pathologies veineuses valvulaires (varices), propices à générer des thromboses et des hématomes.
La technique de pose
Pour une description chronologique et une proposition d’organisation matérielle, se référer à la fiche technique « Pose de voie veineuse périphérique ».
Se présenter, expliquer le soin et son intérêt dans une ambiance détendue permet de placer le patient en bonne condition. Un patient stressé est un patient qui libère des substances vasoconstrictives, ce qui va compliquer le repérage et la ponction veineuse. Un patient détendu participe à la réussite du geste. Les mots agressifs sont généralement évités. Par exemple annoncer "je pique" place le patient sur la défensive vis-à-vis d’une attaque (l’effraction cutanée au sens littéral). On préfère généralement "on y va", qui implique le patient dans le geste ou "cela va pincer" qui annonce un désagrément passager. S’installer (ne pas hésiter à s'asseoir et monter le lit à la bonne hauteur) et installer le patient confortablement dans une position favorable augmente grandement les chances de succès. Ce faisant, vérifier l’identité du patient, ses antécédents son traitement (penser au risque accru d’hématome s’il est placé sons anticoagulant par exemple) et la cohérence de la prescription (soluté salé chez un patient insuffisant cardiaque ?). Au besoin demander des précisions au moindre doute. La recherche de la veine à ponctionner se fera en prenant le temps d'examiner l'ensemble du membre concerné et de son capital veineux. Il est strictement contre indiqué de poser une VVP sur un bras porteur d'une fistule artério veineuse, d'une lésion infectée ou aux abords d'une plaie. Il est fortement déconseillé de poser une VVP sur un bras hémiplégique, du côté opéré à l'occasion d'un curage axillaire (chirurgie mammaire), ou porteur d'un œdème conséquent. La préparation cutanée est classique et en fonction des protocoles locaux. Certains utilisent des produits à base de Chlorhexidine, d’autres des dérivés iodés. Quoi qu’il en soit la préparation s’effectue toujours en quatre temps (lavage avec un savon, rinçage, séchage et application d’antiseptique en respectant le temps de pose). La peau doit être exempte de toute pilosité, un rasage à l’aide d’une tondeuse électrique peut être nécessaire. Il ne faut pas utiliser de rasoir mécanique susceptible de provoquer des lésions et irritations cutanées.
Un garrot est mis en place en amont du point de ponction afin de provoquer une séquestration sanguine et une dilatation des veines du membre concerné. Il s’agit d’un garrot veineux qui ne doit pas avoir d’incidence sur la perfusion artérielle du membre. Après avoir mis le garrot en place, on vérifie la présence du pouls radial. S’il est absent, replacer le garrot en diminuant la pression. Selon les protocoles locaux, on préconise le port de gants stériles ou simples. Dans ce dernier cas, aucun contact avec la zone de ponction ne doit avoir lieu une fois l’antisepsie effectuée. Le port de gants stériles peut également se justifier dans des contextes particuliers. Si la perfusion doit être conservée le plus longtemps possible ou si le patient est immunodéprimé par exemple.
Pour la ponction, l’aiguille est tenue presque parallèlement à la peau, le pouce et le majeur se place de part et d’autre de la jonction entre le trocart et le cathéter. Le biseau de l’aiguille est positionné vers le haut. Le passage cutané doit être franc et ferme sous peine de majorer les douleurs consécutives à la ponction. Pendant le geste, la peau est tendue pour favoriser la bonne pénétration de l’aiguille.
A l’obtention d’un reflux de sang dans la chambre témoin, deux techniques sont proposées :
- soit le cathéter est poussé par l’index placé sur le dessus du dispositif et avance ainsi dans la lumière de la veine ;
- soit le trocart est légèrement retiré pour ensuite faire avancer l’ensemble du système dans la veine. Lorsque le cathéter est avancé jusqu’à sa garde, le trocart est retiré et éliminé dans un contenant adapté. Le garrot est retiré avant ablation du trocart. Au moment de l’ablation du trocart, deux techniques sont également proposées :
- soit le doigt de la main libre est placé en amont de la veine ponctionnée pour obturer le cathéter à son émergence (supposée),
- soit une compresse sera placée au préalable en dessous du cathéter pour absorber le retour sanguin avant raccordement à la perfusion.
Il est temps de raccorder la perfusion qui aura été préparée avant le geste. Généralement il s’agit d’un système « Luer Lock » dont la bonne fixation est confirmée par un cliquetis après un quart de tour dans le sens horaire. En fonction des protocoles locaux, on utilise un système de fixation transparent avec ou sans retour de sécurité de la ligne de perfusion.
La confirmation de la bonne position du cathéter est objectivée par :
- La présence d’un reflux sanguin à la mise en position déclive de la perfusion (amenée sous le niveau de la ligne axillaire, le sang doit refluer dans la tubulure). Cette technique n’est plus recommandée dans certains protocoles, la présence de sang dans la tubulure pouvant favoriser le développement de micro-organismes. De plus l’absence de reflux ne permet pas de conclure que la perfusion est ectopique. La veine peut se collaber sur un vaisseau en dépression et parfaitement laisser passer les fluides si le débit est normal et qu’aucun œdème n’est constaté,
- Un débit important lorsque la perfusion coule sans aucune contrainte (molette « ouverte » en grand),
- L’absence d’œdème,
- L’absence de douleur. En cas de doute, l’injection lente et prudente de 10ml de sérum salé 0,9% permet de vérifier l’absence de douleur et d’œdème. La recherche d’un reflux peut également être effectuée à cette occasion. Cette injection « test » de sérum physiologique doit être réalisée systématiquement en pédiatrie où il est fréquent de ne pas observer de reflux pendant la ponction. Le doute ne doit pas être permis en particulier si des produits toxiques doivent être injectés. Une extravasation (passage extra vasculaire) peut provoquer d’importantes lésions par compressions ou directement par nécrose (toxicité du soluté ou des médications),
- La surveillance infirmière va comprendre des observations locales et générales à la recherche de complications potentielles. Sur le plan local : recherche d’un érythème, d’un œdème… témoin d’une inflammation, d’une infection débutante, d'une intolérance ou d’une extravasation du soluté. Sur le plan général : écoute du patient, information des signes à surveiller pour une participation active de ce dernier à sa surveillance. Surveillance de la température ou à la demande si le patient exprime un malaise à type de frissons / sensations de chaleur.
Les astuces
Il n’est pas toujours facile de réussir la pose d'une VVP. Il est normal de subir des échecs et de devoir demander de l’aide le cas échéant. Comme pour n’importe quelle discipline, le taux de réussite augmente avec l’expérience et l’entraînement. Il existe un certain nombre d’astuces pour faciliter le geste et améliorer les chances de succès :
Le principe du garrot est de provoquer une séquestration veineuse qui va engendrer une dilatation et faciliter le repérage des veines. Afin de favoriser cette dilatation, il faut placer le membre en position déclive. Si aucun prélèvement veineux n’est prévu simultanément à la pose de VVP, le garrot peut être posé immédiatement avant que l’ensemble du matériel ait été rassemblé pour le geste.
Bien tendre la peau entre l’amont et l’aval du point de ponction. Cela facilite le passage cutané du trocart et évite également que le vaisseau « roule » ou soit mobilisé pendant le geste. Certaines veines très calcifiées sont littéralement poussées par l’extrémité du trocart qui peut peiner à les percer.
En tapotant la zone de ponction, on peut provoquer une légère inflammation qui va favoriser la dilatation veineuse. C’est un geste qui est réalisé presque machinalement par les soignants lorsqu’ils cherchent une veine.
Faire plus confiance à ses sensations de palper qu’aux veines qui sont visibles. L’élasticité d’une veine s’évalue au toucher. Entre une « belle veine » qu’on voit et une « belle veine » qu’on touche, il faut préférer la seconde.
Éviter les tendons. On peut parfois confondre un tendon et une veine. Pour lever le doute, demander au patient de serrer le poing, de plier le bras, d’ouvrir la main pour mobiliser ses tendons. Il sera ainsi aisé de faire la différence entre un tendon et une veine au palper.
Le mandrin liquide, il s’agit d’une technique employée pour mettre en place correctement le cathéter. Il arrive parfois qu’il ne « monte » pas dans la lumière d’une veine fine ou bute sur une bifurcation. En utilisant une seringue adaptée sur le cathéter, injecter franchement du sérum salé 0,9%. Le liquide fera office de mandrin (d’où le nom de cette technique) en dilatant ce qui se trouve en aval de l’extrémité du cathéter. On peut ainsi parvenir à en terminer la mise en place correctement. Une alternative consiste à purger le cathéter avec du sérum salé isotonique sans laisser la seringue en place. Ainsi un reflux de sang sera plus rapide et plus immédiat. Cette technique est largement employée en particulier chez les très jeunes enfants dont les veines provoquent plus rarement des reflux lorsqu'elles sont perfusées.
Utiliser le côté dominant. Si le patient est réputé difficile à perfuser, commencer par chercher les veines sur le bras dominant, là où les veines sont de meilleure qualité.
Chauffer la zone de ponction. Utiliser les effets de la chaleur pour dilater les veines. Soit avec des champs chauds, soit avec un vecteur imprégné d’eau chaude à laisser quelques minutes au contact de la zone de ponction. Par exemple un gant rempli d’eau chaude.
Utiliser un brassard de mesure de pression artérielle. A l'aide d'un brassard manuel placé de la même façon que pour mesurer une tension, provoquer une ischémie transitoire du membre. Gonfler le brassard au-delà de la pression systolique du patient (on peut se fixer 200mmHg par exemple) et laisser l'effet garrot opérer pendant une minute. Prévenir le patient que le geste peut être désagréable et provoquer des sensations de fourmillement au niveau de la main. La minute passée, dégonfler progressivement le brassard jusqu'à palpation du pouls radial. Maintenir ce niveau de pression. Le brassard fait alors office de garrot veineux uniquement. Le sang afflue rapidement dans le bras et les veines vont se dilater de façon plus importante que lors de l'utilisation d'un garrot veineux classique. En raison de l'inconfort qu'elle engendre, cette technique est à utiliser chez un patient dont le capital veineux est déjà reconnu comme difficile ou faible.
Piquer sans garrot. Chez certains patients, en particulier les personnes âgées, le capital veineux est réputé « fragile ». L'apparition d'hématomes est fréquent d'autant plus que les anticoagulants sont régulièrement utilisés pour traiter certaines affections. Ces patients ont parfois des veines saillantes qui semblent larges et faciles à cathétériser. Cependant, elles « claquent » souvent malgré toutes les précautions que l'on peut prendre. Parfois il peut être utile de ne pas utiliser de garrot pour perfuser ces patients. La présence d'un reflux n'est alors pas toujours observable, mais les chances de succès n'en sont pas moins augmentées.
Piquer un bras œdématié. Même s'il est déconseillé de poser une perfusion sur un bras œdématié, certaines situations ne laissent pas le choix. Dans ce cas, afin de révéler plus aisément la position des veines, il peut être utile de poser une bande de contention sur le bras concerné. Après l'avoir laissée en place quelques minutes, poser le garrot veineux et retirer la contention. L’œdème interstitiel aura normalement régressé suffisamment pour identifier une zone de ponction potentielle.
Pour conclure
La pose de voie veineuse périphérique est un geste technique à la portée de tout infirmier diplômé. Il doit être pratiqué le plus régulièrement possible afin de devenir routinier et habituel et être enseigné aux étudiants en soins infirmiers. C’est un geste symbolique de notre profession, il ne se limite cependant pas à « piquer » et comme nous l’avons vu dans ce document, il implique un certain nombre de connaissances et de décisions qui resteront opaques si une formation adéquate n’est pas suivie.
Vincent ELMERRédacteur Infirmiers.comvincent.elmer@infirmiers.com
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