Kevin Peiro, actuellement étudiant infirmier en deuxième année, n’avait jusque-là jamais été confronté à un patient séropositif (VIH) et n’avait sur le sujet que des connaissances "purement théoriques". C'est lors d'un stage en octobre 2018 dans un Centre d'Accueil et d'Accompagnement à la Réduction des risques des Usagers de Drogue (CAARUD) qu’il se retrouve pour la première fois en contact avec le virus, détecté chez un jeune usager. Le suivi de ce patient lui permet de rencontrer de nombreux professionnels spécialisés et de s’apercevoir que ses connaissances sur le Sida sont soit incomplètes soit dépassées… La notion de "charge virale indétectable", notamment, est trop peu connue des professionnels de santé, constate l’ESI. Après de nombreuses recherches, il souhaite aujourd’hui partager un article sur le sujet. Nous l’en remercions.
J’ai d’abord été surpris d'apprendre qu'une fois la charge virale rendue indétectable par le traitement, le virus du Sida devenait intransmissible
, raconte Kevin Peiro. "Surprise encore plus grande quand je me suis aperçu au cours de mes recherches qu'une campagne sur le sujet avait été lancée deux ans plus tôt. Une campagne qui s’était accompagnée d’une déclaration de consensus signée par une trentaine d’associations de lutte contre le Sida à travers le monde. Si ce message s’avère très clair pour les professionnels travaillant avec les personnes séropositives, il ne l’est pas pour les professionnels travaillant peu avec ce type de pathologie.
U=U
pour Undetectable=Untransmittable
que l'on peut traduire en Français sous le nom Indétectable=Intransmissible
est une campagne de prévention lancée en 2016 par l'organisation américaine Prevention Access Campaign. Celle-ci met en avant le résultat de nombreuses études scientifiques qui montrent qu'une personne sous antirétroviraux avec une charge virale indétectable [d’après les analyses] ne peut pas transmettre le Sida.
Qu’est-ce qu'une charge virale indétectable ?
La charge virale correspond à la quantité de VIH présent dans le sang d'une personne séropositive. Si les médicaments anti-VIH (trithérapie) ne peuvent totalement venir à bout du virus, ils permettent du moins de contrôler l’infection en bloquant sa multiplication dans l’organisme. Si le patient prend régulièrement son traitement, la charge virale devient « indétectable » lorsque qu'elle n'est plus assez élevée pour pouvoir être détectée par un test sanguin. Ce seuil de détection correspond, selon les études et les progrès des test utilisés, à environ 40 copies /mm3.
Toutefois, la charge virale doit régulièrement être contrôlée par des analyses biologiques. En effet, l’oubli du traitement ou à la survenue d’une autre infection sexuellement transmissible peut l’augmenter.
Les données de PARTNER2 apportent des preuves solides aux hommes homosexuels que le risque de transmission du VIH sous traitement antirétroviral suppressif est effectivement nul, Dr Alison Rodger, co-auteure de l’étude.
Le traitement comme outil de prévention
Le traitement antirétroviral efficace (TAR) peut réduire la charge virale jusqu'à ce que celle-ci soit indétectable. Les deux études HPTN 052 (en 2011) , PARTNER (en 2014) et PARNER 2 (en 2018) affirment l’efficacité de la TAR comme moyen de réduire énormément le risque de transmission du VIH lors des relations sexuelles anales et vaginales
1. La TAR et une charge virale indétectable peuvent donc être envisagés comme une stratégie de prévention contre la transmission du VIH notamment auprès des couples hétérosexuels ainsi qu’auprès des couples homosexuels sérodifférents.
Le but : rassurer et combattre les stigmatisations
L'une des principales craintes des personnes séropositives est de transmettre le virus. Être informé par une source fiable, médicale ou associative, de l'intransmissibilité du virus lorsque la charge virale est indétectable permet de changer le rapport à leur corps et à leur partenaire et de ne plus se considérer comme des bombes vivantes
. Il est important aussi de parler ici des craintes de certains personnels de santé dues à une méconnaissance du virus qui entraîne des comportements pouvant être vécus comme très stigmatisants
comme le port de deux paires de gants lors d'une prise de sang. La mise à jour de ces connaissances permettrait donc aux professionnels de santé de prendre en charge les personnes séropositives sans stigmatisation mais aussi de participer activement à ce nouveau moyen de prévention.
Vers une plus large diffusion de ce message
Faire confiance aux personnes séropositives et faire connaître aux personnes séronégatives qu'un traitement efficace élimine le risque de transmission devrait être le but ultime de cette campagne de prévention. L'infirmier a toute son importance dans la diffusion de ce message qui s'inscrit parfaitement dans son rôle de prévention et d’éducation à la santé."
Sources
Bibliographie
PEIRO Kévin étudiant en soins infirmiers 2ème année.kevinpeiro95@gmail.com
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